Secrets d'entrepreneurs : comment faire décoller son projet ?

Alain Clapaud
Publié le 23 mars 2016 à 14h09
Alors que des milliers de projets sont en ligne sur les grandes plates-formes de crowdfunding, pousser les gens à participer financièrement à sa campagne est capital. Amis, réseaux sociaux, journalistes, il faut user de tous les moyens pour déclencher un effet boule de neige. C'est dans les premiers jours, les premières heures que se joue le succès ou l'échec d'une campagne.

Une fois la plate-forme choisie, il faut rédiger le contenu de la page qui va décrire la campagne. Attention à l'amateurisme, les internautes vont très rapidement rejeter les projets dont la présentation est bâclée. Même lorsqu'on est qu'un groupe d'étudiants, il faut faire forte impression avec des contenus de qualité professionnelle, notamment la vidéo de présentation qui va faire la différence.

« Nous avons tout fait nous-mêmes car nous n'avions pas de budget avant de lancer la campagne » reconnait Séverin Marcombes, PDG de Lima. « Les photos ont été faites avec mon appareil et nous sommes allés dans les locaux d'une autre start-up pour les prendre car nous n'avions pas encore de locaux. Nous avons négocié avec une start-up dans le domaine de la vidéo pour nous tourner la vidéo gratuitement et nous n'avons pu les rémunérer qu'après la campagne ».

Outre l'aspect purement visuel et bien entendu la qualité du produit, un autre critère clé participe au succès où à l'échec d'une campagne : c'est son montant. « Au plus tôt vous atteignez votre objectif initial, au plus vous allez dépasser ce seuil » résume Jean-Luc Vallejo, fondateur d'ISKN. Sa campagne Kickstarter est parvenue à rassembler près de 350 000 dollars auprès de 2 400 contributeurs.

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Tablette Slate de chez ISKN


« Décoller rapidement vous permet de vous retrouver sur la page d'accueil Kickstarter et ainsi bénéficier d'une très forte visibilité. D'autre part, vous avez plus de chances que les gens misent sur votre projet plutôt que sur les autres car ils sont rassurés de voir que vous avez déjà atteint votre objectif ». Ainsi, l'entrepreneur conseille de volontairement réclamer moins que nécessaire dans l'objectif initial de la campagne afin d'atteindre ce montant le plus rapidement possible et dépasser l'objectif initial.


Edwin Van Ruymbeke, concepteur du Bionic Bird, cet oiseau en carbone dont il est possible de contrôler le vol avec une application pour smartphone, précise ce point de vue : « Le montant demandé doit être atteignable dans les 2-3 premiers jours de campagne, de façon à avoir une progression très rapide en % de votre objectif, et être mentionné dans la Newsletter d'Indiegogo ».

Il conseille : « Il faut fédérer autour de soi, c'est à dire sa famille, ses amis, son réseau pour le 1er jour ou avoir un investisseur qui met en route. Le but est d'obtenir la newsletter de la plateforme dès la première semaine. C'est essentiel pour lancer votre campagne au grand public. Ensuite, une fois le lancement réussi, il faut avoir une équipe motivée pour relancer les média avec un plan sur les 40 jours suivants. Mais surtout, il ne faut pas négliger la préparation de sa campagne en amont, et en pas lésiner sur les moyens pour faire une page attractive dans l'esprit crowdfunding ».

Pour sa part, Jean-Luc Vallejo a élaboré une formule mathématique à appliquer pour calculer l'objectif initial de la campagne : « La règle est assez simple : il faut demander le tiers de ce que l'on souhaite vraiment. Nous avions besoin de 100 000 dollars, nous en avons demandé 35 000. Il faut essayer d'atteindre l'objectif sur le premier tiers de la campagne pour déclencher cet effet boule de neige qui vous permettra d'atteindre les 100 000 dollars à la fin de la campagne ». Un objectif qu'ISKN a largement dépassé puisque les 35 000 dollars ont été atteints en 12 heures seulement et, au final, 2 395 contributeurs ont misé 346 127 dollars sur le projet.

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Constituer une communauté sur les réseaux sociaux est impératif

Pour ISKN comme pour tous les entrepreneurs qui se sont frottés aux plates-formes de crowdfunding, les premières heures de la campagne sont cruciales pour sa réussite. Il est absolument nécessaire de faire décoller rapidement le compteur des contributeurs et l'argent collecté et, pour y parvenir, il faut véritablement s'attacher à créer une communauté autour du projet avant de lancer la campagne.

Blogs, mais aussi et surtout réseaux sociaux, il faut accumuler les « likes », les followers et autres abonnés à une newsletter, tous les moyens sont bons pour constituer une communauté que l'on va pouvoir solliciter le jour J. « La réussite d'une campagne de crowdfunding n'a rien de magique. Il faut absolument établir une communauté avant de lancer la campagne. Nous pouvions compter sur une communauté de 10 000 personnes qui suivaient nos développements avant de nous lancer » explique Séverin Marcombes, PDG de Lima.

« Nous avons prévenu cette communauté avant tout le monde que nous allions lancer une campagne sur Kickstarter et, quelques jours avant le lancement officiel, nous avons envoyé des messages de rappel, mis en place un compte à rebours en cherchant à privilégier un aspect viral pour que la nouvelle se propage. Cela nous a énormément aidés car dès le jour du lancement, beaucoup d'internautes sont effectivement venus acheter un Lima. » Outre cette communauté, il ne faut pas hésiter à solliciter ses proches, sa famille pour gonfler, même artificiellement, les ventes le premier jour. L'objectif est véritablement d'accéder à la page d'accueil du site de crowdfunding et amorcer ainsi la pompe.


Les médias traditionnels font exploser le nombre de visites

Autre levier à ne pas négliger, la presse, comme le souligne Séverin Marcombes : « Nous avons bénéficié de 4 à 5 articles et surtout d'un article publié par Techcrunch exactement au moment du lancement de la campagne qui a eu un gros impact sur l'arrivée de nouveaux souscripteurs. » Néanmoins, il n'est pas simple, pour une start-up désargentée qui n'a pas les moyens, d'avoir une agence de relations presse et d'accéder aux journalistes et aux médias traditionnels. « A l'origine du projet, nous étions trois étudiants sans aucune connaissance du monde de la presse » retrace Bruno Lussato, fondateur de Wistiki.

« Nous avons écrit un communiqué de presse à partir d'un modèle trouvé sur le web et l'avons envoyé à une liste de journalistes. Nous n'avons obtenu aucun résultat, aucun article ! Les journalistes allaient sur Google pour voir si on était sérieux et ils ne trouvaient rien sur nous. » Les fondateurs de Wistiki décident alors de prendre leur bâton de pèlerin et d'aller rencontrer des blogueurs influents un par un.

C'est comme cela que les premiers billets évoquant le projet Wistiki sont publiés sur le Web. Forts de ce premier résultat, les étudiants vont alors faire le siège des rédactions, attendant les journalistes en bas de leurs immeubles pour leur présenter le projet. « On les attendait à la porte de leurs immeubles pour les "pitcher" sur Wistiki. Certains l'ont mal pris, mais quelques-uns ont eu un coup de cœur pour notre projet ». C'est ainsi que la start-up a décroché ses premiers articles dans la presse régionale, puis nationale. « C'est là que nous avons véritablement changé de dimension et avoir des reportages sur TF1, France 2, Les Echos et obtenir une audience qui n'avait plus rien à voir avec ce que nous avions jusqu'alors. »

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Si, depuis quelques années, les techniques de promotion des campagnes de crowdfunding sont en train de se professionnaliser, ces pionniers du financement participatif ont démontré que l'on pouvait ainsi lancer pratiquement sans dépenser un centime une campagne qui fonctionne.

A suivre la semaine prochaine, la quatrième et dernière partie de nos "secrets d'entrepreneurs" : gérer l'après campagne
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