La SNCF, qui a installé son Lab sur Viva Technology, du 16 au 18 mai 2019 Porte de Versailles à Paris, a présenté de nombreuses start-up et entreprises partenaires, parmi lesquelles Immersion 4, une solution contre la surconsommation d'énergie des data centers.
Et si la solution à la surchauffe et à la surconsommation d'énergie des data centers avait été trouvée ? C'est en tout cas ce qu'espère Immersion 4, société issue du Lab techno de la SNCF. Présent au salon Viva Tech, Xavier Wybo, co-fondateur de la société, nous a éclairé sur l'innovation défendue porte de Versailles : un système de refroidissement pour centres de données, bien utile lorsque 2,5 milliards de données sont gérées dans les data centers chaque jour.
Des serveurs plongés dans un fluide diélectrique
Clubic : Bonjour Xavier, pouvez-vous nous présenter Immersion 4, que l'on vend comme un système de refroidissement durable de data centers ?Xavier Wybo : Bonjour Alexandre. Ce projet est totalement innovant et remet en cause le principe même de l'existence d'un data center, qui consiste à refroidir un espace pour refroidir les équipements électroniques. Nous n'allons pas refroidir un espace mais directement refroidir les équipements électroniques, en les plongeant dans un fluide diélectrique de notre composition. Différents formats existent, et il est même possible de faire du design sur-mesure.
Nous allons immerger les serveurs dans ce système, ce qui va nous octroyer un gain d'énergie considérable en termes de PUE (Power Usage Effectiveness, qui mesure l'efficacité énergétique d'un data center), et nous assurer de rejeter moins de gaz à effet de serre et de CO2 dans l'atmosphère.
Comment peut-on quantifier cette économie d'énergie ?
Le gain d'énergie est facile à quantifier. Comme nous ne réchauffons pas l'espace, et que nous avons les éléments chiffrés de ce que coûte la consommation énergétique des équipements électroniques versus la consommation énergétique de tout un data center, nous pouvons faire des déductions certifiées. Autre aspect : nous allons enlever les ventilateurs des serveurs puisqu'ils vont être immergés. Le serveur va consommer moins d'énergie. Le troisième point, c'est que nous avons un système de froid. Le frigidaire ne rejette pas de CO2 donc nous allons émettre de la chaleur, mais le principe du système veut que l'on rejette moins de CO2 dans l'atmosphère.
Les serveurs pourront être immergés n'importe où ou presque
À quelle échelle peut-on imaginer le déploiement de la technologie ?Nous allons équiper des solutions destinées au gaming notamment. Mais aujourd'hui, nous avons une offre qui s'adresse au monde de l'entreprise, avec des marchés B2B dans un système de revente indirecte avec des distributeurs.
Dans les solutions industrielles que nous livrons à nos clients, un certain nombre de composants assurent l'autonomie complète de ce système que l'on va pouvoir installer dans n'importe quel bâtiment ou local. Il n'y a plus de destination précise pour la pose de l'engin. On peut très bien le placer dans un bureau, dans un sous-sol, ou dans un local technique. Nous ne sommes pas obligés de bâtir et de designer. Nos tanks sont solides et bénéficient des systèmes de sécurisation classiques, avec l'empreinte digitale par exemple, ou la rétine. Nous repensons l'accès aux données en les ramenant au plus près des utilisateurs.
Nous allons redonner un peu plus de pouvoir aux régions. Nous participons à la souveraineté des États, et je le dis sérieusement. Aujourd'hui, des données peuvent être mises dans le cloud, qu'il soit public ou privé. Ensuite, nous avons les data centers de proximité. Ce que nous pouvons faire avec ce système-là, c'est mailler l'ensemble de ces data centers de proximité.
Vous en êtes à quelle phase de développement actuellement ?
Aujourd'hui, nous ne sommes plus dans la phase d'exploitation, même si dans l'industrie, elle reste permanente. Nous avons mis des produits sur étagère et avons commencé à les commercialiser. Les premières livraisons de produits se font chez les industriels, les opérateurs télécoms, les intégrateurs ou les hébergeurs, qui vont aujourd'hui utiliser la solution Immersion 4.
Nous allons tester ces solutions, avec la SNCF, sur des systèmes de calcul. Le bénéfice de la solution nous permet d'utiliser les serveurs en mode overclocking, en mode saturation. Nous pouvons les utiliser ainsi en discontinu, sans avoir besoin de beaucoup plus d'énergie, et sans rejeter trop de chaleur grâce à une dissipation conduite par le fluide diélectrique. La solution est faite pour ce que l'on appelle le HPC, le High Power Comuting.
Entre 80 et 90% de réduction des coûts de refroidissement des équipements
Comment convaincre une entreprise de s'équiper de votre solution ?On va clairement insister sur le retour sur investissement potentiel sur une année. Il y a le coût d'achat de l'équipement, certes, mais ensuite, nous allons dupliquer cet équipement. Et le coût de refroidissement des équipements diminue de façon drastique : entre 80 et 90% selon les utilisateurs et la destinée finale des produits. Les coûts, l'économie et les gains sont considérables. Aujourd'hui, cela intéresse la Fédération Française du Bâtiment, par exemple, mais aussi les gens qui bâtissent notre vie future dans le digital, et dans tout ce qui fait notre vie.
Cette innovation, c'est le fruit de combien d'années de travail ?
Serge Conesa, qui est le président-fondateur de l'entreprise, travaille sur le projet depuis de nombreuses années. Il a ressenti très fortement ce qui s'est passé à Fukushima. Et il est porté depuis par un discours auquel il croit profondément, qui est le discours écologique et éco-responsable. La communication de notre entreprise, avant d'être technique et financière, se veut d'abord d'être véritablement éco-responsable.
Qui dit data center dit cloud dit blockchain... avec des data centers moins gourmands en énergie, on imagine qu'Immersion 4 peut intéresser les gouvernements ?
Bien entendu. Aujourd'hui, nous sommes contactés par des acteurs liés à la cryptomonnaie. La blockchain s'y intéresse parce que nous allons manipuler des milliards de données. Et plus on manipule de données, plus nous allons avoir besoin d'équipements électroniques, plus nous allons induire de la chaleur et plus nous allons avoir besoin d'énergie. Se faisant, on se propose de réduire ce besoin d'énergie pour pouvoir entrer dans l'ère nouvelle du digital.
Merci beaucoup Xavier, et bonne continuation avec Immersion 4 !
Merci à vous.