Le Sénat a publié, lundi, ses 20 propositions correspondant à des mesures dites « pragmatiques et de bon sens », destinées à réduire le fossé qui existe entre certains territoires, sur le terrain numérique.
Quatre ans après le lancement de la Stratégie nationale pour un numérique inclusif, destinée à lutter contre la fracture technologique globale, les Sénateurs font un nouveau constat alarmant. Pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, les choses n'évoluent pas comme elles le devraient. En témoigne selon elle une part majoritaire de Français qui affirme avoir renoncé à effectuer certaines démarches en ligne, à cause d'un manque de clarté de ces dernières.
Près de 2 Français sur 10 ne maîtrisent pas encore la moindre compétence numérique de base
La sénatrice LR Patricia Demas, rapporteure de la commission, juge l'engagement de l'État encore parcellaire et insuffisant, appelant au passage à faire de l'inclusion numérique une priorité nationale, avec des financements valant sur le long terme. En premier lieu, le Sénat appelle à mieux appréhender la fracture numérique pour élaborer une politique ambitieuse.
Derrière cette qualification très politicienne, les Sages pointent du doigt un difficile accès aux compétences numériques, aux réseaux et aux équipements numériques dans certains territoires. 17 % des Français ne maîtrisent pas la moindre compétence numérique de base encore aujourd'hui, et la couverture en fibre optique est encore loin d'être totale, alors que la fin de l'année 2022 est censée correspondre à une dématérialisation des services publics à 100 %.
Affirmant que la Stratégie nationale de 2018 n'est pas pleinement efficace, les sénateurs proposent de dresser une feuille de route nationale sur l'inclusion numérique, avec des objectifs clairs et un calendrier pour les atteindre.
Des hubs territoriaux d'accompagnement qui luttent pour leur propre survie
Concernant l'inclusion numérique, la commission sénatoriale s'interroge sur le fonctionnement en silo des interventions territoriales, entre acteurs publics, privés et associatifs, qui aboutissent à un éclatement des sources de financement. En ce sens, désigner un « chef de file » ne semble pas être une bonne idée pour le Sénat, qui estime que chaque échelon peut apporter sa propre valeur. « L'observation du terrain plaide en faveur de la mise en place de coalitions locales au format souple, permettant de renforcer la coordination entre les acteurs », explique-t-il.
Le renforcement de l'inclusion numérique doit aussi passer par le renforcement des hubs territoriaux, dans leur rôle d'appui aux collectivités territoriales, qui aujourd'hui serait insuffisant. Ces hubs (Hinaura, Hub Bretagne, NUMI, Hubik, RhinOcc, Hub du Sud, Les Assembleurs, Hub'Est ou encore Hub-Lo) constituent les interlocuteurs privilégiés des collectivités et de l'État dans la diffusion des dispositifs nationaux sur l'inclusion numérique (réalisation de cartographies, levée de fonds, ingénierie de projet etc.). Les hubs auraient du mal, actuellement, à mobiliser des fonds et assurent en réalité leur propre survie, plutôt que de répondre à leur cœur de mission.
L'importance de l'accès aux réseaux
Enfin, il est aussi évident que l'inclusion numérique passe par un accès aux réseaux internet sur l'ensemble du territoire. Si la généralisation de la fibre optique (prévue pour 2025) avance, les territoires ruraux, plus difficiles à équiper, pourraient encore souffrir de cette absence de déploiement. Le Sénat veut ainsi encourager le recours aux technologies sans fil (comme la 4G fixe par exemple), pour permettre aux logements qui ne peuvent pas bénéficier de la fibre de disposer d'une connexion de 8 Mbit/s au minimum.
Globalement, les collectivités territoriales devront être accompagnées dans leurs projets de soutien aux personnes éloignées du numérique, 8 élus sur 10 affirmant notamment ne pas disposer d'un recensement des acteurs de médiation numérique pourtant présents sur leur territoire. Ce qui rend d'autant plus difficile la tâche qui consiste à atteindre les citoyens qui n'ont pas accès au numérique. En ce sens, l'État devra accélérer et pérenniser le déploiement des conseillers numériques .
Source : Sénat