© senat.fr
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Les sénateurs proposent une feuille de route visant à sensibiliser les autorités et acteurs économiques sur l'impact grandissant et inquiétant du numérique sur l'environnement.

L'impact du numérique sur notre société est tel qu'il pourrait représenter, en 2040, près de 7 % des émissions de gaz à effet de serre de la France. Ce serait 60 % de plus qu'aujourd'hui (2% des émissions de GES). Les membres de la commission de l'aménagement du territoire et du développement ont, dans le cadre de la mission d'information sur l'empreinte environnementale du numérique, présenté, mercredi 24 juin, leurs 25 propositions pour une transition écologique de l'écosystème. Et certaines sont assez radicales.

Les Sénateurs alarmistes sur l'impact carbone croissant du numérique

Avant de détailler ces propositions, la mission d'information du Sénat a procédé à un état des lieux de la numérisation croissante (et inquiétante sur certains aspects) de notre société, au sein de laquelle 93 % des Français disposent d'un téléphone portable, et qui a connu une poussée des usages (parmi lesquels le télétravail) avec le confinement et la crise sanitaire.

🔢 Le chiffre : 14%

En France, les data centers sont responsables de 14% de l'empreinte carbone du numérique. Un chiffre qui pourrait exploser à 86% en 2040.

En 2019, le numérique français a causé l'émission de 15 millions de tonnes de CO2 causant un coût collectif de 1 milliard d'euros. En plus de la forte croissance supposée des émissions liées au numérique d'ici 2040 (60 %), le coût collectif annuel de ces dernières devrait grimper à 12 milliards d'euros en 2040. L'essor de l'Internet de l'objet (IoT) et la poussée des data centers contribueront à cette croissance.

📈 La stat' : 5%

C'est le pourcentage actuel des réseaux sur l'empreinte carbone du numérique en France.

Les sénateurs notent aussi que 70 % de l'empreinte carbone totale du numérique en France est due à la fabrication des terminaux (contre 40 % au niveau mondial) et 80 % de l'empreinte carbone du numérique français est émise à l'étranger. La première des mesures d'importance des élus du Palais du Luxembourg consiste ainsi à rallonger la durée de vie d'un smartphone, qui est de 23 mois aujourd'hui, pour limiter de façon mécanique le renouvellement des terminaux.

Graphique émissions CO2

Non à la data illimitée ; limitation de la qualité des vidéos ; transformation des data centers ; étude sur la 5G : les propositions phares du Sénat

Les sénateurs ont réparti leurs 25 propositions au travers de quatre axes distincts : un premier destiné à faire prendre conscience aux utilisateurs du numérique de son impact environnemental pour les inciter à le réduire ; un second visant à limiter le renouvellement des terminaux, comme nous le disions ; un troisième dans le but de faire émerger et développer des usages du numérique écologiquement vertueux ; et un quatrième pour basculer vers des data centers et des réseaux (mobile et fixe) moins énergivores.

Parmi les propositions phares de la mission d'information, on retrouve :

  • l'introduction d'une taxe carbone aux frontières européennes, pour notamment internaliser le coût environnemental des terminaux importés,
  • un taux de TVA réduit sur la réparation de terminaux et l'achat d'équipements électroniques reconditionnés,
  • l'incitation à l'installation de data centers en France, motivée par des avantages fiscaux et en conditionnant l'opération à des critères environnementaux strictes,
  • lancer une étude sur l'empreinte carbone de la 5G, et réfléchir à une extinction des anciennes générations mobiles (comme la 2G par exemple),
  • l'instauration d'une mise en veille des box des opérateurs,
  • l'interdiction du lancement automatique de vidéos sur une page web et du scroll infini.

Une autre proposition a retenu notre attention, et elle est peut-être celle qui suscitera le plus de débats chez les consommateurs que nous sommes, vous et nous. Dans le prolongement de leur volonté de faire de la donnée « une ressource nécessitant une gestion durable », les sénateurs souhaitent en effet purement et simplement interdire les forfaits mobiles avec de la data illimitée (ou ceux, imagine-t-on, à plus de 100 Go de données) et que devienne obligatoire une tarification au volume (comme si vous étiez en hors forfait pour celles et ceux qui disposent d'une offre non bloquée).

🔢 Le chiffre : 61 %

Le streaming mondial représentait 60,6 % du trafic internet mondial, loin devant le chargement des pages web (13,1 %), des jeux vidéo (8,1%), des réseaux sociaux (6,1%) et du partage de fichiers (4,2%).

Sur le marché de la vidéo, les élus veulent responsabiliser les grandes plateformes, en faisant en sorte que la qualité de la vidéo téléchargée ou visionnée en ligne soit adaptée à la résolution maximale de l'écran de l'utilisateur. En outre, les sénateurs proposent d'instaurer une taxe qui serait prélevée sur les plus gros émetteurs de données. Ce qui ferait forcément grimper la facture pour les consommateurs.

Pour le président de la mission, le sénateur Les Républicains de l'Ain Patrick Chaize, les 25 propositions (que vous pouvez retrouver ICI) répondent « à une attente citoyenne forte, comme le montrent les propositions de la Convention citoyenne pour le climat ». Une proposition de loi, consécutive au rapport du Sénat, devrait être déposée cet automne.

Source : Rapport