Stéphane Negre, Intel France : "Maîtriser le modem pour être leader du SoC"

Julien Jay
Publié le 05 juin 2015 à 17h45
C'est à l'occasion du MedPi, le salon annuel réunissant les acheteurs de la grande distribution et les acteurs de l'industrie informatique que nous avons pu nous entretenir avec Stéphane Negre, directeur général d'Intel France.

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Peut-on parler de retard sur les Core de cinquième génération Broadwell pour desktop ?

Non, pourquoi parler de retard ?

Broadwell a démarré sa carrière sur Core M en octobre 2014 avant d'arriver en début d'année sur mobile avec les Core i3 et Core i5-U et finalement le desktop est bon dernier, plus de six mois après les premières puces Broadwell...

Sur notre ensemble de produits et notre transition en 14 nm, on est allé moins rapidement que souhaité. Depuis les premières fabrications, les problèmes de démarrage ont été solutionnés et maintenant on est dans une transition. Il faut donc s'attendre à ce que régulièrement nous annoncions des produits qui migrent vers les nouvelles générations, vers le 14 nm. Et donc ça se passe correctement, même si on souhaiterait que cela soit toujours plus rapide. Ça se passe tout à fait correctement.

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Y compris pour les Atom ?

Oui, les Atom X5 et X7 annoncés au MWC, même si nous n'avons pas encore de date sur la disponibilité des produits commerciaux.

Mais l'Atom X3 n'est pas en 14 nm...

Le X3 n'est pas en 14 nm, en effet.

Pourtant, c'est le plus intéressant pour les smartphones, l'un des form-factors que vous poursuivez...

Le X3, gamme Sofia, n'est pas gravé chez Intel au départ. Il migrera plus tard dans les lignes de production Intel pour le 14nm. En attendant, ce sont d'autres partenaires qui le fabriquent.

Mais la visibilité d'Intel sur les smartphones ne progresse toujours pas !

Nous avons tout de même quelques designs comme le ZenFone d'Asus, un très bon produit avec de très bons résultats.

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Sur la globalité du marché, que ce soit chez Wiko, Kazam, BQ, que nous avons vus sur le MedPi, il n'y a rien en Intel. Quelles sont vos prétentions sur le marché smartphone ?

Nous avons annoncé des partenariats au niveau des développements SoC, des partenariats structurants qui auront pas mal d'impact sur notre présence, notamment sur les marchés Smartphones ou sur Chinatech au sens large.

Chinatech ?

Chinatech, le pôle en Chine où sont concentrés tous les ODM (NDLR : Original Design Manufacturer, en clair un fabricant qui conçoit des terminaux qu'il vend ensuite clés en main à des marques pour qu'elles apposent leur nom dessus) qui alimentent les Wiko, Logicom, la plupart du marché. Il faut gagner des designs là-bas au niveau des composants, des cartes, à différents niveaux d'intégration.

On a signé - et c'est quand même nouveau dans la stratégie d'Intel - des partenariats technologiques au niveau des SoC. On parlait de Sofia 3G, il y a un partenariat avec Rockchip sur cette technologie où ils développent leur propre SoC, mais en architecture Intel, qui devrait arriver sur le marché dans le courant de l'année. Plus ou moins au même moment, un peu avant ou après, par rapport aux produits purement Intel Sofia 3G. Ces produits vont donner un accès au marché plus important à l'architecture Intel. Il faut s'attendre à ce qu'il n'y ait pas qu'Intel et des SoC d'Intel présents sur le marché des smartphones.

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Il va y avoir des partenaires. Rockchip a déjà annoncé et communiqué sur ce qu'il faisait. Il y a un autre partenariat qui a été annoncé avec Spreadtrum : c'est un intégrateur au niveau du silicium important sur le marché chinois. Cela va diversifier l'offre de sous ensemble, d'ingrédients, pour les gens qui font des smartphones en architectures Intel.

Aujourd'hui pour avoir de l'architecture Intel c'est uniquement Intel avec les partenaires existants. Très rapidement, notamment avec Rockchip, il y aura une diversité, pas comme dans le monde ARM, mais une diversité des offres de SoC basés sur l'architecture Intel. Il faut s'attendre assez rapidement, sur la deuxième partie de l'année, à voir des produits sur le marché en architecture Intel sur des SoC qui n'ont pas été développés par Intel, mais par Rockchip.

Quelle est votre stratégie actuelle ? L'an dernier, je me souviens que l'objectif était assez clair : vendre des puces pour tablettes. Mais cette année qu'en est-il ?

Au niveau des tablettes, nous avions communiqué un objectif de 40 millions qui avait fait sourire lorsque nous l'avions annoncé, mais nous avons livré 46 millions de tablettes l'an dernier, si l'on ajoute Surface. Et ce, dans un contexte de marché qui devait croître fortement mais qui n'a pas crû comme attendu. C'est-à-dire en parts de marché, en représentativité du marché, nos plans à 40 millions donnaient une certaine part de marché, on a fait plus sur un marché qui n'a pas crû de la même manière. Notre représentativité est meilleure qu'attendue.

Et cette année ?

Cette année, l'objectif est d'être stable en termes de volume sur un marché qui ne croit pas forcément. On a un potentiel de gain éventuel en part de marché mais ce n'est pas ce qu'on vise. On vise une stabilité, de faire à peu près comme le marché en termes de croissance pour les tablettes.
Sur les smartphones on met en place des partenariats, une rupture technologique, à un niveau tout à fait nouveau pour Intel, et là j'en reviens à Rockchip. On prépare une présence de nos technologies et architectures en diversifiant l'arrivée sur le marché.

Pourquoi ne pas mettre en place des partenariats similaires à celui de Rockchip pour le développement de la partie modem ?

Mais nous avons nos propres solutions modem 3G & LTE.

Oui, enfin, elles ne sont pas toujours bien en avance... Et récemment, nous apprenions que NVIDIA se débarrassait de sa division Icera. Comme Intel vise de plus en plus partenariats, notamment au niveau de la partie graphique pour certains SoC, pourquoi ne pas faire faire le modem par un tiers ?

Nous avons investi dans le modem. C'est une différentiation importante. C'est un axe stratégique. Le computing et la connectivité, ces deux parties-là sont des axes stratégiques pour Intel. Ce n'est pas que la partie computing, ce n'est pas que le x86, c'est aussi la connectivité. La connectivité aujourd'hui, on parle beaucoup de 4G, mais c'est aussi les prochaines générations. On investit donc très lourdement sur la partie connectivité.

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Certains produits, quand on regarde les SoC aujourd'hui en fonction du produit visé, du produit cible, certains sont architecturés autour du modem, d'autres sont architecturés autour du computing, d'autres sont assez équilibrés. J'entends sur un smartphone d'entrée de gamme, la partie computing, ce n'est pas ça qui est différenciant.

Il me semble pourtant que le marketing se fait aujourd'hui beaucoup autour du nombre de cœurs sur ces produits ?

Il y a une segmentation importante. Lorsqu'on a vu la 4G arriver dans les smartphones, c'était un point extrêmement différenciant. Dans l'entrée de gamme, c'était peut-être plus important d'avoir un produit 4G que d'avoir un produit 4 cœurs.

Ça, c'est les smartphones ; le marché des tablettes réagit de manière un petit peu différente avec une partie computing qui reste extrêmement visible. La partie connectivité sur le marché des tablettes est moins sensible que dans les smartphones, ce n'est pas architecturé sur les smartphones et varie en fonction des marchés. En France, il y a quand même assez peu de tablettes qui sont équipées de 3G ou de 4G, et encore moins qui sont activées. Dans un marché comme l'Italie, la proportion des tablettes équipées 3G/4G et connectées est très importante. Après, c'est une stratégie historique des opérateurs, des offres de forfaits données, qui fait qu'il y a une différenciation.

Côté smartphones, la partie modem reste donc très importante. Cela reste un de nos commitment (NDLR : engagement). C'est situationnel : il y a des lignes de produits dans les SoC, très orientées autour du modem, pour d'autres marchés, c'est plus équilibré.

Pour revenir à la stratégie, on a parlé tablettes et smartphones, il y a quand même un peu de PC qui reste important... les serveurs qui sont primordiaux. Dans le PC, on pousse toujours la stratégie d'innovation, de création de l'innovation, au niveau des facteurs d'utilisation comme les 2-en-1, avec les transformables et détachables.

C'est intéressant car ils communiquent une notion d'innovation, mais aussi des passerelles qui, pour nous, sont importantes. Les produits qui se détachent comme ça sont importants, parce que c'est une passerelle entre le monde de la tablette et le monde du PC. Si on arrive à communiquer, on essaie de le faire bien, mais des fois, on ne le fait pas aussi bien qu'on le souhaiterait, le potentiel d'innovation et de montée en gamme venant des tablettes où il y a une crise de valeur importante vers les 2-en-1, tout le monde est gagnant parce que nous recréons de la valeur en partant d'un marché où on perçoit que la valeur est en chute libre.

A partir du moment où l'on voit des tablettes à 49 euros dans les rayons, pourquoi pas 39, pourquoi pas 29 ? Sur le marché des tablettes, si la perception est qu'il n'y a pas vraiment d'innovation, on est en chute libre de valeur comme sur tous les marchés. Il faut donc remettre de l'innovation. Les 2-en-1 c'est de l'innovation qui crée des passerelles de tablette vers le 2-en-1 quand il se détache, mais c'est aussi de l'innovation sur le marché du notebook parce qu'il se transforme, parce qu'on a des utilisations qui sont plus simples, etc. Potentiellement, c'est un véhicule d'innovation cross-platform, c'est pour ça qu'il est si important pour nous.

AMD s'intéresse à ARM. N'aurait-il pas été plus intelligent de développer des puces ARM plutôt que de faire un partenariat avec Rockchip ?

Ça nous donnerait quoi ?

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Votre process de fabrication en 14 nm vous assurerait-il rapidement une présence large sur la plupart des smartphones avec une puce ARM ?

Le business d'Intel, on favorise le 14 nm, on favorise le 10 nm et on fait les investissements qu'il faut. On sait faire du transistor, on est leader et on a probablement les meilleurs transistors du marché sur cette génération, sur la prochaine et encore celle d'après. L'intérêt de nos investissements est notamment de valoriser le transistor, valoriser l'architecture et les produits.

Si on se dit : on utilise notre licence ARM et on met nos transistors sur ARM, on coupe une des stratégies d'Intel qui est de valoriser l'architecture et les produits.

L'utilisateur final n'achète pas un ZenFone, pour reprendre votre exemple, car il y a du Intel dedans : plutôt parce que le design est sympa, le prix lui convient et c'est du Android avec de la 4G.

Il n'y a pas que du smartphone pour nous sur le marché. Les objets connectés, les smartphones, les tablettes, les 2-en-1, les PC, les serveurs : c'est une chaîne de valeurs qui est extrêmement importante. On tient absolument à défendre notre architecture pour que la création de valeur se fasse au niveau de l'architecture, et pas uniquement au niveau des transistors, sur cet ensemble là. C'est stratégique pour Intel.

Je comprends la question et on se la pose. Si on se dit « on n'a pas réussi à pénétrer les smartphones, ça serait bien qu'on prenne une licence ARM pour mettre notre 14 nm dessus », ce qu'on gagne dans les smartphones, on peut perdre énormément sur nos autres marchés. Après, il y a une hémorragie et d'un seul coup, on se rend compte : ARM est devenue l'architecture de base pour tout ce qui est end-to-end. Ce n'est pas du tout notre approche.

La marque Ultrabook est-elle morte ?

La marque existe encore.

Vous communiquez encore dessus ? Certains partenaires nous disent qu'ils ne parlent plus d'Ultrabook car ça serait fini chez Intel.

Indépendamment de la marque, quand on a pris conscience qu'il n'y avait plus suffisamment d'innovations sur les notebooks parce que l'écosystème avait mis ses meilleurs ingénieurs sur d'autres lignes de produits, il a fallu réagir. Sinon, le notebook du MedPi 2015 ferait toujours 3 cm d'épaisseur, comme celui du MedPi 2011.

La réaction, dont l'exécution marketing était la marque Ultrabook, c'était de remettre de l'innovation, changer notre ligne de produits : diminuer le TDP, la consommation, etc. Car il faut remettre visuellement de l'innovation sur le marché du notebook. Il faut faire des machines fines, des machines sexy, du design, il faut accompagner les OEM qui avaient refocusé leurs budgets et capacités de R&D sur d'autres produits pour les refocuser sur le notebook.

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On a fait un effort technologique, un effort de R&D sur les produits d'intégration, un effort marketing pour communiquer sur le marché. C'est l'historique de l'Ultrabook. Maintenant on évolue, aujourd'hui on est sur un form-factor 2-en-1. Le 2-en-1 n'est pas une marque Intel, c'est un segment qui doit porter de l'innovation. L'innovation ne doit pas être perçue uniquement sur Intel mais sur tout l'écosystème. Pour nous, une stratégie qui a du succès dans ce domaine-là : c'est que tout l'écosystème se remet à investir pour qu'il y ait de l'innovation sur le marché du PC. En regardant Ultrabook face à 2-en-1 : Ultrabook Intel a porté à bout de bras les efforts marketing... sur le 2-en-1, il est beaucoup plus diffus.

Aujourd'hui il n'y a plus de stickers Ultrabook ?

Ils existent toujours. Les spécifications qualitatives sur la finesse, le design sont toujours là, en même temps qu'il y a de l'innovation sur les usages. C'était une urgence parce qu'il n'y avait pas assez d'innovation et il y a eu un accompagnement fort marketing où on a pris nos responsabilités de marque, mais quand tu vois « de marque » c'est-à-dire de financement des campagnes. Aujourd'hui, le 2-en-1 est bien mieux porté naturellement par l'écosystème qui voit l'intérêt d'innover et de continuer à innover.

Y a-t-il une raison alors pour laquelle les partenaires nous disent que le programme Ultrabook est fini ?

Nous ne mettons plus les mêmes niveaux de financement derrière Ultrabook qu'il y a quelques années. On les mets pour créer une offre produit et une catégorie 2-en-1.

Les discussions avec les retailers, c'est actuellement la création de la catégorie 2-en-1... qu'elle soit visible. Les gens, lorsqu'ils vont dans un magasin, s'il n'y a pas écrit « 2-en-1 » ils sont un petit peu perdus puisqu'ils ne vont pas savoir se repérer : « En lisant Clubic, j'ai compris que le 2-en-1 c'est vachement bien, mais je vais dans le magasin, et je ne sais pas où ils sont, je ne les reconnais pas ». Il faut donc créer cette catégorie-là. C'est pas une catégorie avec un produit. Il y a un an, 2-en-1 c'était l'Asus T100, un très bon produit... mais une catégorie portée par un produit ça n'en fait pas une catégorie. Il faut de l'entrée de gamme, il faut du haut de gamme : la catégorie s'est beaucoup étoffée. HP a de bons produits, Asus continue d'avoir de bons produits, Acer a des produits, Microsoft a des bons produits dans la catégorie...

Donc la perception d'une catégorie qui se fait est pour nous très importante. Dans une segmentation comme ça, on revient sur un marketing plus standard de montée en gamme. A partir du moment où les gens savent ce qu'est un 2-en-1, la catégorie est établie dans les magasins ; on va leur dire : « le 2-en-1 en Atom n'est pas aussi bien que celui en Core i3 qui est moins bien que celui en Core i5 et avec le Core i7 », là vous seriez super cool. On recentre notre marketing sur la montée en gamme à travers une catégorie : ça ne marche que si la catégorie est perçue, visible, comprise et systématique.

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A propos de segmentation, quelle est la place aujourd'hui du Core M dans la gamme ?

Core M c'est le niveau d'intégration. Pour faire du design et de la mobilité, la priorité c'est l'intégration. L'ultra-mobilité, la finesse, le rendu, le fanless, etc. C'est une approche « ingénieur », le mieux possible, pour faire du design fin fanless. La génération Core, c'est des paramétrages un peu différents. Lenovo, par exemple, a de superbes machines Core M, et de superbes machines Core i, mais les Core i sont un peu plus épaisses, pas de beaucoup, le poids est un peu différent, la batterie peut être un peu réduite. Elle offre un potentiel de performances supplémentaires. Pour nous, c'est un effort de segmentation.

N'est-ce pas la segmentation de trop ?

C'est le marché qui peut le dire en termes de réactivité, de perception, d'effort. Ce n'est pas le produit de trop. Est-ce que c'est la marque de trop, et ça crée une certaine confusion ? Il y a une référence à Core. On aurait pu l'appeler autrement, certainement, mais on l'a laissée dans la marque Core avec la priorité mobilité. On a donc un sous-segment dans Core qui est « priorité mobilité », le meilleur de la technologie par rapport à l'intégration, et Core i, avec le meilleur de la technologie et une priorité performance. Ça fait des lignes de produits, des designs qui sont un petit peu différents. On va voir comment va se comporter le marché. Aujourd'hui, la grande majorité de nos volumes reste du Core i.

Est-ce un échec de Core M ? Non, ça permet d'avoir des produits sexy.

Pourtant à titre personnel si j'ai le choix entre Core M et Core i5, j'opterais pour le Core i5...

Très bien. Vous valorisez plus l'aspect performances. A l'inverse, ma maman prendra peut-être le Core M en me disant : « Tu crois vraiment que j'ai besoin du Core i5 ? ». Le Core M est plus léger et plus fin : c'est une segmentation.

Dans ce cas, pourquoi la Surface 3 de Microsoft qui vient de sortir est en Atom et non pas en Core M ?

C'est là encore une segmentation. Si la demande est de donner le Core M au prix de l'Atom, technologiquement ce n'est pas le même produit.

On parlait d'Ultrabook tout à l'heure qui était une communication sur une plate-forme pour le segment slim... c'était une association. Avec Core en-dessous d'Ultrabook, on a deux marques une au-dessus de l'autre pour un même produit. Core M par rapport à Core i c'est plus horizontal.

Typiquement, ce qu'on veut exprimer avec Core M, c'est que c'est le meilleur de la mobilité dans un form factor de PC. Si on le portait au travers d'une communication Ultrabook, on aurait eu un effet sandwich avec un étage de plus, par rapport à Core i. Je pense que c'est quand même une certaine simplification. Rappelons que quand on a sorti Ultrabook, les PC super slim ça n'existait pas... sauf le MacBook Air. Mais sur le marché standard il n'y en avait pas. Aujourd'hui il y en a, donc on se remet sur une communication proche du processeur, pas de la plate-forme. On communique sur d'autres artifices de la plate-forme. On est revenu à un marketing de marque plus cohérent par rapport à nos produits, sans trop diverger entre Core M et Core i.

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Dans tous les cas je ne comprends pas le prix du Core M par rapport au Core i5 mobile : sur votre grille tarifaire, les deux produits ont le même prix. Ça n'a pas de sens : deux produits aux performances très différentes et pourtant au même prix. Sauf si bien sûr vos plus proches partenaires, comme Lenovo, ne paient pas le prix affiché dans votre grille.

Plutôt que de se focaliser sur l'aspect performances, il faut prendre en compte l'argument sleekness du design et autonomie.

Dans ce cas-là je réponds que les premiers MacBook Air n'avaient pas de Core M...

(...Silence...)

Oui, mais ils sont moins performants que les Core M.

Pas si sûr ! Il me semble bien que les nouveaux MacBook en Core M ont le niveau de performance des MacBook Air de 2011...

L'autonomie est en augmentation, le design est encore plus fin. Ce sont des paramétrages : tu as performance et consommation. Les deux influent sur la température. Quand la priorité est aux performances avec la technologie Core, il y a Core M, pour une même technologie, la priorité est sur la consommation. Ce qui veut dire moins de batterie, plus de finesse, température plus basse pas besoin de refroidissement, etc.

C'est le meilleur compromis en mettant en priorité deux vecteurs différents. C'est ce qu'on essaie de réaliser. Aujourd'hui, certains designs en Core i ne sont pas très différents de designs en Core M pour des problèmes d'intégration. Technologiquement, ils justifient une différence. Un design avec un châssis uniquement pour Core M sera différent du design d'un châssis qui permet de faire du Core i5/i7.

Oui, c'est ce genre de souci qui a quelque peu saboté votre lancement du Core M avec le Lenovo Yoga 3 Pro, non ?

C'est rentré dans l'ordre depuis. C'est un très beau produit. Il est maintenant arrivé à maturité.

Windows 10 est une opportunité pour Intel ?

C'est un élément important pour le marché du PC, et pas uniquement. C'est une transition importante pour le marché du PC. Il y a une grosse attente.

L'approche retenue par Microsoft avec Windows 10 est de proposer le même OS sur toute la chaîne : du smartphone, à la tablette, en passant par les PC et les serveurs. Mais sur les smartphones... il n'y a toujours pas de version x86 de Windows Mobile. Vous n'y serez donc pas ?

On verra au lancement de Windows 10 Mobile s'il y a des smartphones Intel ou pas. Il y a une grosse attente du marché sur Windows 10, tout le monde s'organise et optimise sa stratégie pour ce lancement. Nous souhaitons que Windows 10 crée l'intérêt des gens et donc, un potentiel de rafraichissement du parc installé qui est très important dans le domaine du PC.

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Et par rapport à Windows Hello qui utilise votre technologie Intel RealSense, vous avez des annonces en ce sens ?

La volonté pour nous est de l'intégrer. Ce n'est pas d'en faire des webcams. Cela fait partie des technologies qui doivent suggérer un rafraichissement de l'innovation sur le PC. Si c'est une webcam, ça perd de son intérêt. Vous aviez vu la Dell Venue 8 au CES avec RealSense, c'est un super produit !

Oui mais pas vendu en France...

C'est la stratégie de Dell mais ça n'empêche pas que le produit soit superbe. Il est superbe technologiquement, il est super au niveau des usages qui sont montrés, il est superbe en termes de design car super fin et quali, le positionnement prix est intéressant donc des produits comme ça, il faut s'attendre à en voir de plus en plus. Le marché devrait réagir, et de plus en plus de produits devraient intégrer RealSense de manière standardisé. Il faut le valoriser sur des usages, et c'est bien que Windows 10 utilise notre technologie, notamment pour la reconnaissance, et ça, de manière native. Pour nous, c'est très intéressant, mais il ne faut pas que ça soit le seul usage sinon cela va lasser les gens assez rapidement.

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C'est nécessaire, mais ce n'est pas suffisant comme usage et il faut venir avec une batterie d'usages divers et variés, très créatifs dont on ne perçoit pas aujourd'hui encore tous les intérêts. Parmi les efforts technologiques pour réinventer l'usage et l'expérience avec le PC, RealSense est primordial. C'est réinventer l'interaction avec l'écran alors que les 2-en-1 ne sont qu'une simple réinvention d'usage presque de manière statique où le form factor est plus fin, mais où ce qu'on voit à l'écran est toujours identique. C'est la même chose qu'il y a trois ans mais en plus fin et plus léger. C'est une proposition de valeur très intéressante. Mais avec RealSense, c'est un axe d'innovation qui n'a rien à voir avec ce qu'on a vu ces dernières années. C'est toujours un risque, car les gens doivent comprendre, valoriser et utiliser la technologie.

Y a-t-il des 2-en-1 avec caméra RealSense ?

Non je ne crois pas. On a des notebooks classiques Acer et Asus. Et dans un tout autre registre, il y a le HP Sprout qui est un concept extraordinaire ! Est-ce qu'il va trouver son marché, ses clients ? Est-ce que ça sera compris ? Mais ça on verra... C'est un véhicule d'innovation qui ouvre la voie à d'autres produits peut-être plus faciles de compréhension et d'usage. Il faut savoir prendre des risques pour montrer des choses nouvelles. Et le risque est que la chose nouvelle ne soit pas perçue comme prête ou répondant à un besoin. Cela prend du temps. Bienvenue à des produits comme Sprout. Car la technologie de base derrière, c'est RealSense !

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Avec la Freebox Mini 4k, il n'y a plus de puce Intel. Est-ce le début de la fin du règne d'Intel dans les box françaises ?

Aujourd'hui, Intel est dans beaucoup de box françaises sur la partie computing des set-top box, les décodeurs. On n'est pas dans les gateway ni dans le modem des gateway (NDLR : une passerelle pour accéder à Internet). On a investi récemment coup sur coup sur des sociétés qui développent la partie modem. On a fait l'acquisition de Lantic en Allemagne, l'un des leaders de la partie modem pour ADSL qui équipe un certain nombre de box françaises, toujours sur la partie modem.

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C'est comme la discussion des smartphones. L'évolution d'une box il y a la partie computing/Settop box, et peut-être que ce marché tel qu'on le connait est en transition complète, mais la gateway est toujours nécessaire. Elle peut alimenter un certain nombre de box en home automation, sécurité, vidéosurveillance, etc. La partie gateway est très structurante dans une maison, le settop box peut évoluer à tel point qu'il peut ne pas être nécessaire du tout. Dans certains marchés la gateway attaque directement la SmartTV. En France, les SmartTV ne servent à rien car les settop box des opérateurs sont en-dessous des SmartTV. Donc la première chose que l'on fait après avoir allumé la TV est de poser sa télécommande pour prendre celle de la box. Tout passe alors par la box. Ce scénario ne se reproduit pas dans tous les pays.

On ne veut pas se retirer des settop box mais à terme, le marché structurant le plus important c'est la gateway qui alimente pas mal de choses. On investit dans la gateway afin d'y être présent.

Mais alors ça ne sera pas du x86 ?

Cela revient à dire que le 7360, notre modem pour smartphone n'est pas x86. Quand on le met dans un SoC et qu'on veut être leader du SoC et que le smartphone, c'est un composant, si une des composantes de ce SoC est ratée, le SoC est raté. Il faut maitriser le modem et être leader du modem pour avoir pour stratégie d'être leader du SoC. Dans les gateway ce sont des SoC spécifiques qui sont en train de se développer : sans la composante modem on est en dehors du marché de la gateway.

Le marché de la gateway est un marché d'avenir pour Intel ?

C'est un marché important, oui. C'est le modem de la maison ! Que l'on connecte au câble, à l'ADSL, au satellite, à la 4G ou à la 5G, etc. Mais ça, c'est la technologie de connectivité dans la gateway.

J'avais plutôt l'impression que la gateway était un mal nécessaire imposé par l'opérateur pour avoir TV et téléphone sans quoi tout le monde s'en passerait bien...

Oui, c'est le modem français, ça. Où on se connecte de manière filaire à une infrastructure qui est dédiée à l'opérateur. C'est pas pareil dans tous les pays.

Le marché du dongle, du routeur Wi-Fi connecté à la 4G mobile indépendant est presque inexistant en France. Pourquoi ? Car les opérateurs tiennent au filaire. C'est stratégique parce qu'en étant accroché au filaire, il y a moins de mobilité client, mobilité vis-à-vis de la facture. On parle bien de rétention client et en France, il y a une stratégie d'accrocher, de maintenir le client sur du filaire. Et là où le filaire était la technologie à grand-papa, il y a dix ans, car tout partait sur le mobile, les opérateurs se sont rendus compte que les revenus, la fidélité et la rétention client, passent par le filaire. Mais c'est assez franco-français bien que pas uniquement.

On peut imaginer des gateway filaires ou sans-fil. C'est le point d'entrée à la maison et on a pour stratégie d'être dans ce hub.

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Êtes-vous inquiets pour AMD ?

Pour ?

AMD.

Pourquoi serait-on inquiets pour AMD ?

Si AMD disparaissait vous n'auriez plus de concurrent sur le x86...

La concurrence x86 aujourd'hui est sur la quasi-totalité des produits dont on a parlé, elle est plutôt en dehors de x86 qu'à l'intérieur du x86. Si on dit x86, ce n'est que le marché du PC, c'est un marché fermé. Il y a la concurrence d'AMD, mais le PC lui-même - si ce n'est dans son facteur de forme, dans les usages vus d'un utilisateur - est concurrencé par une multitude de devices. Pour nous, c'est une concurrence qui est plus sérieuse. Parce qu'elle peut rendre non crédible, non valorisé, un device sur lequel on est bien positionné et en concurrence avec AMD. Il est primordial qu'on ait toutes les concurrences possibles en tête. AMD est toujours un concurrent sur le marché du PC. La concurrence est bien plus multiple pour Intel aujourd'hui qu'elle ne l'était historiquement.

La visibilité d'AMD s'amoindrit considérablement dans les rayons des grandes surfaces...

La concurrence, il y a des hauts, il y a des bas en fonction des lancements, des positionnements, des cycles. On a vu AMD plus faibles qu'ils ne le sont aujourd'hui, mais on les a aussi vus plus forts. Vu d'Intel, la concurrence s'est énormément diversifiée parce qu'on va sur des marchés qui n'étaient pas les nôtres, où il y a des gens en place. C'est les gens en place sur ces marchés qui sont nos nouveaux concurrents. Parce que, nous, on se projette sur des marchés qui ne sont pas nos marchés historiques. Si on reste sur ceux-ci, les perspectives de croissance sont faibles, mais ça ne suffit pas à nos attentes de croissance. Et si on fait ça, on sait qu'on ne se protège pas. Le marché, des serveurs, aux objets connectés... Rassurez-vous, il y a de la concurrence de partout. Sur certains, c'est AMD, sur d'autres, ce sont d'autres acteurs.

Un mot sur la loi de Moore et son cinquantième anniversaire ?

C'est grâce à Gordon Moore et tous ceux qui ont investi pour la rendre possible ces cinquante dernières années, c'est absolument phénoménal ce qui a été créé par l'Homme. Moore c'est un asset de l'humanité. On peut le dire comme ça. Ça peut paraître arrogant mais si on regarde les cinquante dernières années, ce qu'a rendu possible cette industrie, dont Intel fait partie, c'est absolument phénoménal. C'est un changement gigantesque. On ne sait même pas imaginer ce que cela changera dans les cinquante prochaines années, ce n'est pas Star Wars 7 ! Il faut rester optimiste sur le fait que la loi de Moore va encore continuer, et être encore plus optimiste sur ce qu'elle va rendre possible.

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Merci pour votre temps Stéphane.
Julien Jay
Par Julien Jay

Passionné d'informatique depuis mon premier Amstrad 3086 XT et son processeur à 8 MHz, j'officie sur Clubic.com depuis ses presque débuts. Si je n'ai rien oublié d'Eternam, de MS-DOS 3.30 et de l'ineffable Aigle d'Or sur TO7, je reste fasciné par les évolutions constantes en matière de high-tech. Bercé par le hardware pur et dur, gourou ès carte graphique et CPU, je n'en garde pas moins un intérêt non feint pour les produits finis, fussent-ils logiciels. Rédacteur en chef pour la partie magazine de Clubic, je fais régner la terreur au sein de la rédaction ce qui m'a valu quelques surnoms sympathiques comme Judge Dredd ou Palpatine (les bons jours). Mon environnement de travail principal reste Windows même si je lorgne souvent du côté de Mac OS X.

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