Des chercheurs sont parvenus à mettre au point une approche informatique inédite, qui permettrait de prédire les futures mutations dans les protéines du SARS-CoV-2, ou Covid-19. La méthode, également applicable à d'autres épidémies, pourrait aider à préparer de prochains vaccins.
Une équipe de recherche du Laboratoire de biologie computationnelle et quantitative (LCQB) composée de membres de l'IBPS - Sorbonne Université et du CNRS a publié, le 12 janvier 2022 dans la revue PNAS et en partenariat avec l'Université de Lausanne, des travaux détaillant une approche dite computationnelle. Celle-ci pourrait aider à prévoir les nouvelles mutations dans les protéines de la Covid-19 (ou SARS-CoV-2), susceptibles d'apparaître dans les futurs variants du virus. Ces travaux, qui pourraient révolutionner la recherche autour du virus aujourd'hui pandémique, vont encore plus loin.
Une méthode basée sur l'anticipation, capable de statistiquement prévoir l'apparition de nouveaux variants
L'Institut de Biologie Paris Seine (IBPS), qui a commenté les travaux, rappelle que tous les variants aujourd'hui connus de la Covid-19, Delta et Omicron compris, présentent un schéma caractéristique de mutations génétiques. Ces mutations peuvent renforcer la transmissibilité du virus, et ainsi réduire l'efficacité des vaccins et des traitements à base d'anticorps. La clé, pour les chercheurs, c'est donc l'anticipation. « Anticiper les mutations encore inconnues qui pourraient apparaître dans les futurs variants (…) est devenu un enjeu majeur ».
Sous la houlette de Martin Weigt, professeur à Sorbonne Université et en collaboration avec l'Université de Lausanne, une équipe de chercheurs du LCQB a donc scientifiquement documenté une nouvelle approche informatique visant à prédire la mutabilité de toutes les positions individuelles dans les protéines du SARS-CoV-2.
Leur méthode consiste à utiliser un seul génome du virus, en le combinant avec des séquences génomiques d'autres coronavirus. Les chercheurs indiquent que les prédictions obtenues sont « cohérentes » avec la variabilité actuelle des protéines de la Covid-19, qui a évolué ces deux dernières années, ce qui suggère donc que le modèle mis au point est capable de prévoir statistiquement l'apparition de nouveaux variants.
Des prédictions qui peuvent aboutir à de nouvelles solutions thérapeutiques et vaccins, même au-delà de la Covid-19
Les prédictions de l'équipe de recherche ont ensuite été combinées avec des données immunologiques, ce qui a permis aux chercheurs d'observer qu'Omicron mais aussi d'autres variants sont enrichis en mutations, dans des positions dangereuses dans le domaine de liaison au récepteur de la protéine Spike, qui rappelons-le est la clé qui permet au SARS-CoV-2 de pénétrer dans nos cellules. Les scientifiques ajoutent que cette protéine joue un rôle central à la fois dans la liaison, la fusion et l'entrée du virus dans les cellules hôtes humaines, et qu'elle reste la cible principale des thérapies par anticorps.
La protéine Spike demeure aussi la cible dans le cadre du développement de futurs vaccins. « Cette observation peut contribuer à orienter la conception de nouveaux vaccins ou de thérapies par anticorps qui combattront les futurs variants du SARS-CoV-2 en ciblant des positions moins mutables mais immunogènes », précisent le CNRS et Sorbonne Université.
Plus fascinant encore, les résultats présentés dans l'article des chercheurs, qui se concentrent ─ et c'est fort logique ─ sur la Covid-19, peuvent aussi s'appliquer « à de potentielles futures épidémies causées par de nouveaux pathogènes viraux », nous disent-ils. Les prédictions effectuées peuvent en effet être disponibles à un stade précoce d'une éventuelle épidémie, avant même que de substantielles quantités de données expérimentales ou observationnelles ne soient disponibles. Ces méthodes aideront ainsi à prévoir la variabilité future des virus.
Source : PNAS (Article de recherche)