Mattel renonce à un jouet embarquant une IA beaucoup trop curieuse

Alexandre PAULSON
Publié le 05 octobre 2017 à 16h52
Le fabricant de jouets Mattel a décidé d'abandonner le développement d'un objet intelligent destiné aux enfants baptisé Aristote. Le groupe joue la prudence suite à la pression exercée par deux élus américains et des associations de défense de l'enfance, qui redoutaient une atteinte sans précédent à la vie privée des petits consommateurs.

Mattel avait déjà essuyé des critiques similaires l'an dernier avec une poupée Barbie parlante, capable de restituer dans sa conversation avec l'enfant des éléments de sa vie privée.

Conversation et aide au devoir

Pressentie comme la prochaine révolution à venir de l'industrie dans son ensemble, l'intelligence artificielle intéresse aussi le monde du jouet. Mais ses débuts se heurtent à des résistances farouches. Le groupe Mattel, propriétaire entre autres de la licence Barbie, vient d'en faire les frais. L'une de ses filiales, Nabi, s'apprêtait à lancer sur le marché un jouet intelligent baptisé Aristote et destiné à intégrer une chambre d'enfant. Mais la maison-mère Mattel a préféré renoncer à son lancement suite aux vives critiques que le projet suscite.

Doté d'une caméra et d'un micro, Aristote interagit avec son environnement et a la capacité d'allumer une lumière quand un bébé couché dans la même pièce que lui se met à pleurer. Mieux : Aristote peut aider un enfant à faire ses devoirs et lui tenir une conversation. L'objet dispose en fait d'une intelligence suffisamment avancée pour apprendre à connaître l'enfant et nouer une sorte de relation avec lui.

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Une délégation de parentalité ?

Des capacités qui ont interpellé deux sénateurs américains, qui ont pris leur plume pour demander des explications à Mattel. Leur questionnement se situe à deux niveaux. Ils s'interrogent premièrement sur ce qu'Aristote va faire des données collectées auprès de l'enfant, amené à fournir des informations à la machine sur sa vie. Mattel avait fait face l'an dernier à des reproches identiques au sujet d'une Barbie parlante, capable d'enregistrer des informations sur la vie privée de l'enfant, comme le nom de son chien, que la poupée restituait ensuite dans ses conversations. Mattel a donc publiquement répondu à l'interrogation des sénateurs en leur garantissant un haut niveau de cryptage des données, et que celles-ci ne seraient en aucun cas cédées à des annonceurs publicitaires, conformément aux lois protégeant l'enfance.

L'autre niveau de questionnement des deux sénateurs est d'ordre sociétal et interpellera tous les parents : quel impact un tel objet communiquant aura-t-il sur le développement des enfants ? Dans son désir de promotion d'une parentalité high-tech, Mattel encourage d'une certaine manière les parents à déléguer une partie de l'attention à leur bébé et de l'éducation de leurs enfants à la machine. Des inquiétudes régulièrement exprimées par les pédiatres américains, pour lesquelles Mattel n'a pour l'heure pas de réponse.

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