La commission spéciale sur l'intelligence artificielle propose une feuille de route globale pour l'Europe, avec une vision à 2030. Elle alerte sur le retard de l'UE en matière technologique.
L'Union européenne doit agir au niveau mondial pour fixer les normes en matière d'intelligence artificielle. C'est ce qu'il ressort, en substance, des 18 mois d'enquête de la commission spéciale du Parlement sur l'IA à l'ère numérique (AIDA), qui attire l'attention aussi bien sur les carences actuelles que sur le « potentiel énorme qu'offre cette technologie ».
Un retard à combler en matière technologique
Dans ses recommandations finales, qui font suite à des travaux débutés en septembre 2020 visant à examiner les conséquences de l'IA sur l'économie de la zone et à proposer une feuille de route à l'horizon 2030, la commission AIDA avertit que l'Union européenne est en retard dans la course mondiale pour être un leader en matière technologique. Des mots qui ont leur importance.
Les prochaines normes « risquent d'être développées ailleurs », avertit la commission, qui étoffe ses craintes en soulevant la possibilité que ces normes soient développées par des acteurs souvent non démocratiques. Elle appelle ainsi l'UE à agir en tant que créateur de normes en matière d'intelligence artificielle, et ce, au niveau mondial.
Pour y parvenir, les députés européens ont identifié diverses options politiques dans l'optique de libérer le potentiel dans l'IA dans divers secteurs, comme l'environnement, le changement climatique, la santé, ou la lutte contre la famine et les pandémies dans le monde. Si l'Europe met en place les bonnes infrastructures d'éducation et de formation, la commission semble convaincue de la capacité de l'IA à booster la productivité en matière de travail, d'innovation, de capital et de création d'emplois.
Un développement de technologies IA à encadrer face aux risques liés à la surveillance de masse
À l'inverse, développer les technologies d'IA pourrait faire naître des interrogations à la fois éthiques et juridiques. L'UE appelle la communauté mondiale à un consensus autour de normes minimales, tout en s'inquiétant de la recherche militaire dans des domaines comme les systèmes d'armes létales autonomes.
Les membres de la commission du Parlement européen sont aussi soucieux de l'utilisation de l'IA à des fins d'automatisation du traitement de l'information à une échelle encore jamais atteinte. Cela « ouvre la voie à la surveillance de masse et à d'autres ingérences illégales », indiquent les élus, qui parlent d'une « menace pour les droits fondamentaux, en particulier le droit à la vie privée et à la protection des données ».
L'UE rappelle qu'à l'heure actuelle, certains régimes autorités autoritaires utilisent déjà des systèmes d'intelligence artificielle pour contrôler et opérer une surveillance de masse des citoyens, voire pour les classer et restreindre certaines libertés, comme celle de se déplacer. La commission effleure aussi la question de l'impact des grandes plateformes technologiques, qui ponctionnent toujours plus d'informations sur les individus. « Un tel profilage présente un risque pour les systèmes démocratiques ainsi que pour la sauvegarde de nos droits fondamentaux », concluent les députés.