Plus petite et moins coûteuse que ses grandes sœurs, la Model 3 est aussi la Tesla qui se compare le plus facilement à des modèles européens conventionnels. En acceptant de descendre dans l'arène, Tesla serait-il devenu un constructeur comme les autres ? Réponse dans notre banc d'essai.
Introduction
Premier constructeur à proposer des modèles haut de gamme électriques, Tesla pouvait jusqu'ici se permettre de sortir des catégories habituelles de l'automobile, particulièrement en Europe, ou les Model S et Model X affichaient des dimensions extrêmes au regard du réseau routier du Vieux Continent. Essayez-donc de garer un Model X dans une rue parisienne ou toulousaine ! Ces autos avaient également le défaut de n'être accessible qu'à l'élite, à des tarifs flirtant ou dépassant les 100 000 €. C'est dire si la promesse d'une Tesla plus raisonnable en taille et surtout plus accessible a de quoi susciter l'intérêt.C'est tout l'objet de la Model 3 annoncée par Elon Musk en 2014 avec son emphase habituelle et des annonces de prix mirobolantes. L'objectif des 35 000 $ annoncé au départ n'a pas été tenu, même si Tesla a annoncé le 28 février dernier qu'une version finirait effectivement par être proposée à ce prix grâce à la vente directe en ligne.
En attendant, le modèle « Grande Autonomie » est facturé chez nous 59 500 € bonus écologique de 6 000 € non inclus, en attendant l'arrivée d'une version moins coûteuse au rayon d'action réduit. Quant à notre modèle d'essai « Performance », il s'échange contre 70 300 €. Des tarifs qui la placent au niveau d'une BMW Série 3 Gran Coupé 440i ou d'une Audi S4 avec lesquelles elle partage peu ou prou le même gabarit.
« La Model 3 affiche une capacité inférieure aux autres modèles de la gamme : c'est ce qui lui permet d'économiser des kilos et de minimiser son prix »
La Tesla Model 3 est un tout nouveau modèle, qui ne doit rien à ses sœurs de gamme. Sa plateforme mais aussi ses batteries lui sont spécifiques. Avec 75 kWh pour notre version Performance, elle affiche une capacité inférieure à celle des autres modèles de la gamme (à noter qu'il faut aller pêcher ces infos en dehors de Tesla, la marque refusant de communiquer ces informations pourtant essentielles). C'est bien sûr ce qui lui permet d'économiser de précieux kilos et de minimiser son prix. Esthétiquement, aucun problème pour reconnaître en elle un modèle de la marque américaine : les surfaces lisses et les lignes douces typiques sont au rendez-vous. Un dessin efficace, puisqu'il permet un Cx très favorable de 0,23, presqu'au niveau du record du monde pour une voiture de série détenue par la Mercedes CLA et son score de 0,22.
Pour l'instant, l'américaine ne compte aucune rivale directe, mais elle ne devrait pas rester seule en piste aussi longtemps que la S : BMW annonce une i4 comparable en 2021 et la marque électrique de Volvo a présenté en février la Polestar 2 aux apparences de berline SUV façon AMC Eagle des années 70.
Un habitacle encore plus radical
Celui qui monte à bord d'une Tesla doit s'habituer à abandonner certaines habitudes prises dans les autos conventionnelles. La Model 3 passe un nouveau cap en concentrant toutes les informations et la plupart des commandes sur l'écran central. Plus petit que celui des Model S et X, il est désormais horizontal et mesure 15 pouces, une taille déjà plus que respectable. En l'absence d'instrumentation en face du conducteur il faudra s'en remettre à lui pour consulter la vitesse, dans un mouvement oculaire que les possesseurs de Renault Twingo 1 connaissent bien.Au demeurant, la lisibilité paraît excellente et l'ergonomie des menus, pratiquement identique à celles des autres modèles de la marque, bien pensée. Mais on ne peut s'empêcher de se dire qu'à ce prix, un système de vision tête haute l'aurait utilement complété pour éviter de détourner constamment le regard de la route.
« La qualité de la finition apparaît plutôt en hausse, mais certains plastiques continuent à choquer »
Parmi les autres spécificités du modèle, on remarque les commandes d'ouvertures de portes qui ne sont pas des poignées mécaniques mais bien des contacteurs situés en haut des poignées. Cependant, les portières ne sont pas motorisées comme sur les X et S. Les amateurs de détails constateront également la disparition des boutons et des comodos d'origine Mercedes, remplacés par des modèles dessinés en interne.
Notons enfin que sur notre modèle la qualité de finition apparaît plutôt en hausse par rapport aux habitudes du constructeur. Néanmoins, certains plastiques continuent à choquer vu le montant de la facture et on ne peut passer sous silence les nombreux problèmes de qualité que les premiers propriétaires américains de Model 3 ont rencontrés. Espérons que les Européens n'auront pas à essuyer les mêmes plâtres.
Tesla se vante de l'habitabilité de son nouveau modèle qui profiterait de l'emplacement des batteries sous le plancher. Avec deux coffres dont un à l'arrière de 425 litres, la Model 3 est en effet au niveau du point de vue chargement, même si on regrette l'absence de hayon pour ce modèle à carrosserie deux volumes. On apprécie également les généreux rangements, notamment entre les deux sièges.
En revanche le confort à l'arrière est loin d'être idéal : le plancher relevé par les batteries impose aux passagers une position peu confortable, les genoux relevés. Tout compte fait, elle ne fait donc pas mieux que les berlines de luxe classiques même si l'espace aux jambes est généreux.
« Elle propose pour la première fois l'ouverture avec le téléphone portable »
Sur le plan des équipements et du divertissement, la Model 3 est proche de ses grandes sœurs. Elle propose pour la première fois l'ouverture avec le téléphone portable, une fois que celui-ci est appairé à la voiture par le biais de l'application. Rassurez-vous (ou pas) : la voiture est également accessible grâce à une petite carte en plastique dédiée.
La Model 3 propose l'abonnement à Spotify pendant un an et toute une série de gadgets parmi lesquelles le logiciel de dessin et une fonction coussin péteur : effet garanti pour amuser les enfants... ou Patrick Sébastien.
Toujours performante
Depuis sa création, Tesla se fait fort de donner une image ludique de la voiture électrique en la dotant de performances hors du commun. Comme son nom l'indique, la Tesla Model 3 « Performance » n'échappe pas à la règle.Dotée de deux moteurs électriques qui entraînent les quatre roues, elle offre des capacités d'accélération redoutables : Tesla annonce un 0 à 100 km/h en 2,9 secondes. Déjà impressionnant en soit, ce résultat est accru par la sensation de couple immédiatement disponible typique des voitures électriques et la motricité offerte par la transmission intégrale. A la moindre pression sur l'accélérateur, la Tesla Model 3 décolle et offre un niveau de performances de sportive, en tout cas aux allures légales.
La brièveté de l'essai ne nous a pas permis de tester le mode circuit sur un terrain adéquat. Celui-ci modifie le comportement du contrôle de stabilité, augmente le frein moteur et la récupération d'énergie au freinage et renforce le refroidissement de la batterie, crucial pour préserver les performances de l'auto en usage intensif. Il s'agit d'un point faible récurent des modèles électriques souvent incapables de soutenir longtemps un usage à haute vitesse en raison de l'échauffement de la batterie.
Nous n'avons pas pu non plus mettre à l'épreuve le système de conduite autonome qui n'était pas activé sur notre modèle. On sait toutefois qu'il reprend exactement les mêmes composants que sur les S et X : huit caméras, 12 capteurs ultrasons et un radar frontal. On peut donc accorder à ce système le bénéfice du doute tant il a déjà fait la preuve de son efficacité par rapport aux concurrents.
Un amortissement perfectible
La Model 3 s'attaque au gratin des berlines de luxe européennes. Avec 4,68 m de long, elle débarque dans le jardin des BMW Série 3, Mercedes Classe C et peut même être comparée à notre Peugeot 508 nationale, d'autant que celle-ci sera bientôt proposée dans une version hybride rechargeable. Privée de coussins pneumatiques même en option, l'américaine est dotée d'une suspension conventionnelle non pilotée. Toutefois, ses trains roulants font preuve d'une sophistication certaine, avec un train arrière multibras et un train avant à double triangulation, alors que la plupart des modèles équivalents ont recours à un système McPherson moins coûteux.Sur les routes de campagne sinueuses, la Tesla est sans doute la plus agréable de la gamme grâce à son gabarit qui contraint moins le placement, mais aussi en raison d'une direction remarquablement calibrée. Très directe, elle fait preuve d'une précision irréprochable qui profite à l'agilité. Bien entendu, comme toute direction électrique, elle manque de retour d'information mais apparaît dans l'ensemble au meilleur niveau des berlines européennes.
Chaussée d'excellents pneumatiques Michelin Pilot Sport 4, la Model 3 Performance offre un niveau d'adhérence sur le sec étonnant. Il est tout de même possible de faire glisser légèrement l'arrière à la demande en sortie de courbe, ce qui ravira les amateurs de conduite sportive.
« La Model 3 est de loin la Tesla la plus amusante à conduire depuis le retrait du Roadster »
L'amortissement suscite moins de louanges. Rabaissé sur cette version Performance, il offre certes une bonne qualité de filtrage des petites irrégularités mais fait preuve d'une fermeté certaine sur certaines fréquences sans pour autant freiner suffisamment les mouvements de caisse. En la matière, la Peugeot 508 fait mieux, beaucoup mieux, sans perdre en efficacité. Ne boudons cependant pas notre plaisir : la Model 3 est de loin la Tesla la plus amusante à conduire depuis le retrait du Roadster.
Une consommation en forte baisse
Plus petite, plus fine et surtout plus légère que les S et X, la Model 3 affiche enfin des facteurs d'efficience à peu près compatibles avec le concept même de voiture électrique. 1 800 kg sur la balance, c'est encore beaucoup en valeur absolue mais c'est une masse dans la moyenne des modèles à forte capacité de batterie, sachant que la version « Grande Autonomie » tombe à 700 kg, soit à quelques kilos près d'un Hyundai Kona EV. Ces caractéristiques produisent leurs résultats.Malgré sa batterie de capacité inférieure, la Tesla Model 3 Performance affiche 530 km d'autonomie en cycle WLTP. Difficile pour l'instant de comparer ces données avec celles des Model S et Model X dont les valeurs sont encore exprimées selon l'ancien cycle NEDC. Cependant, nous avons réalisé sensiblement le même trajet qu'avec le Model X essayé dans la même rubrique, c'est-à-dire un parcours mixte composé d'autoroute, de voies rapides et de route de campagne sur une distance de 341 km.
« Sur un parcours réalisé sans aucun souci d'économie, nous avons consommé en moyenne 205 Wh/km »
Nous avons rendu la voiture avec 6 % d'autonomie restante sans avoir besoin de recharger et surtout en profitant en permanence de ses jouissives accélérations. Sur le SUV, nous avions modéré nos ardeurs au bout de quelques kilomètres seulement et avions craint de ne pas rentrer à bon port... Sur ce parcours réalisé sans aucun souci d'économie, nous avons consommé en moyenne 205 Wh/km contre 225 Wh/km sur le Model X en gardant constamment un œuf sous le pied. On a hâte de voir ce que donne le modèle propulsion encore plus léger et doté d'un seul moteur.
En ce qui concerne la charge, la durée du prêt ne nous a pas permis de la mettre à l'épreuve. Notons toutefois que sa batterie de capacité réduite permet de raccourcir les temps de recharge par rapport aux modèles S et X. Signalons également que contrairement à ces dernières, elle dispose d'une prise CCS Combo au standard européen ce qui lui permet d'accéder au futur réseau Ionity de charge rapide. Autant dire que dans ce domaine aussi, la Model 3 sera de loin la plus utilisable des Tesla.
Bilan : faut-il acheter la Model 3 Performance ?
Dans la lignée de son créateur, Tesla ne résiste jamais à la coupable envie de faire le buzz. C'est sans doute pourquoi il ne propose pour l'instant à l'essai aux journalistes que la version « Performance » présentée comme une alternative aux berlines sportives allemandes.« Elle apparaît comme la plus polyvalente et la plus facile à utiliser de toutes les Tesla »
Si elle se révèle effectivement amusante à conduire, c'est d'abord par son gabarit réduit et son efficience qu'elle nous a convaincu. Elle apparaît en effet, et de loin comme la plus polyvalente et la plus facile à utiliser de toutes les Tesla. A notre sens, la version « Grande Autonomie » dotée de suspensions plus souples et de performances déjà respectables s'annonce encore plus cohérente. A vérifier sur le terrain !
Fiche technique Tesla Model 3 Performance
Dimensions L x l x h (en m) | 4,69 x 1,93 x 1,44 |
Empattement | 2,87 |
Volume de coffre arrière | 425 |
Volume de coffre avant | NC |
Poids à vide | 1 847 kg |
Nombre de places | 5 |
Moteur | Deux moteurs électriques : asynchrone à l'avant, synchrone à l'arrière |
Puissance | NC (Tesla refuse de communiquer les chiffres) |
Batterie | 75 kWh |
Direction | Électrique à crémaillère |
Suspension avant | Double triangulation, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs télescopiques |
Suspension arrière | Multibras pneumatique, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs télescopiques |
0 à 100 km/h | 3,5 secondes |
Vitesse maximale | 250 km/h |
Autonomie WLTP | 530 km |
Prises de recharge | Suparchargeurs / CSS Combo / Prise classique |
Prix et équipement
Prix Tesla Model 3 Performance : 70 300€Bonus écologique : 6 000€
Equipement | Série | Options |
Peinture métallisée | De 1 600€ à 2 600€ | |
Caméra de recul | Oui | |
Sellerie cuir noire et blanche | 1 050€ | |
Jantes alliage | Oui (20 pouces) | |
Entrée et démarrage sans clé | Oui | |
Connectivité (streaming,etc.) | Oui pendant 1 an | |
Navigation | Oui | |
Connectivité | Oui pendant 1 an | |
Phares à LED | Oui | |
Pilotage automatique amélioré | 5 300€ | |
Sièges et volant chauffants | Oui | |
Toit panoramique | Oui |