L'État et l'ANSSI joueraient au chat et à la souris avec les opérateurs, qui commencent à s'impatienter alors que les demandes d'installation d'équipements 5G se multiplient.
Si l'ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) gère les fréquences 5G, l'ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information), elle, est chargée d'autoriser l'installation des équipements, comme nous vous l'expliquons chaque mois avec le baromètre des stations et antennes 4G et 5G. Selon Les Échos, l'ANSSI multiplierait les demandes de précisions quant aux requêtes d'autorisation faites par les opérateurs télécoms, qui veulent installer des équipements chinois. Ce qui occasionnerait du retard dans le déploiement de la technologie.
Malgré la législation, les opérateurs veulent inclure des équipements 5G chinois
Si le calendrier et les modalités d'attribution pour l'usage de fréquences 5G, notamment celles dans la bande 3,4 - 3,8 GHz, ont été fixés et que la procédure a démarré avec un appel à candidatures ouvert pendant huit semaines, l'incertitude règne toujours s'agissant des équipementiers avec lesquels collaborer. Trois mastodontes se partagent le gâteau : le Finlandais Nokia, le Suédois Ericsson, et le Chinois Huawei, le plus controversé.Selon les USA, utiliser des équipements Huawei pour la 5G britannique relèverait de la "folie"
S'il est délicat de l'avouer encore, plusieurs opérateurs ont déjà pu nous confirmer, en off, vouloir s'équiper en installations Huawei, réputées plus en avance et moins coûteuses que celles concurrentes (hormis Free, qui ne travaille qu'avec Nokia). Sauf que la loi 5G, adoptée l'été dernier en France, impose aux équipementiers d'obtenir une autorisation officielle provenant du Premier ministre ou de ses services (l'ANSSI donc), s'ils veulent déployer leurs logiciels et équipements 5G sur le territoire.
Ensuite, Matignon a deux mois pour répondre en autorisant une exploitation pour une durée maximale de huit ans, ou en refusant.
Tout le monde pourrait y perdre... sauf Free
À la fin du mois de décembre, Orange, SFR et Bouygues Telecom ont souhaité tester le dispositif de cette loi surnommée « loi anti-Huawei » en déposant plusieurs demandes d'autorisation pour déployer des antennes 5G de l'empire du Milieu. Pour le moment, les dossiers sont étudiés par l'ANSSI. Mais selon nos confrères des Échos, qui se prévalent de plusieurs sources, les experts en cybersécurité de l'agence multiplieraient les demandes de précisions : « Avez-vous déjà testé ces équipements ? », « Pouvez-vous nous envoyer la carte considérée pour la demande ? », « Comptez-vous activer toutes les fonctionnalités ? » font partie des interrogations posées par l'ANSSI.Pour les opérateurs, l'agence et l'État chercheraient en réalité à gagner du temps jusqu'à l'attribution des fréquences 5G, pour ainsi s'éviter d'adresser des refus aux opérateurs quant à la volonté d'utilisation des équipements chinois. Et si l'absence de réponse positive de l'ANSSI dans les deux mois équivaut à un refus, la demande de pièces et d'informations supplémentaires permettrait de proroger ce délai. Un opérateur dénonce les « manœuvres dilatoires » des autorités.
Dans le jeu entre opérateurs, SFR et Bouygues Telecom équipent la moitié de leurs réseaux respectifs avec des technologies Huawei. Orange ne veut pas se priver des équipements de la firme de Shenzhen. Si Huawei venait à être écartée en France, Free pourrait ouvrir une bouteille de champagne. Outre les trois plus gros opérateurs, l'État français serait aussi perdant, avec des enchères qui prendraient du plomb dans l'aile. En somme, tergiverser n'aide personne, ou presque.
Source : Les Échos