Journaliste dans un gilet pare-balles tenant une caméra © Jose Luis Carrascosa / Shutterstock
Journaliste dans un gilet pare-balles tenant une caméra © Jose Luis Carrascosa / Shutterstock

Dans son rapport annuel 2024 sur la liberté de la presse, le Conseil de l'Europe fait part de sa vive inquiétude quant à l'utilisation de logiciels espions. Il estime qu'elle menace la sécurité des journalistes.

« Liberté de la presse en Europe : il est temps d'inverser la tendance ». Les mots choisis par le Conseil de l'Europe sont forts pour titrer le rapport de la plateforme pour la sécurité des journalistes. Parmi les préoccupations de l'organisation internationale, l'utilisation illégale de logiciels espions arrive en tête. Mais elle est aussi inquiète des poursuites judiciaires abusives et de la précarité en exil dont les journalistes peuvent pâtir, en particulier ceux originaires de Russie ou du Bélarus.

Les journalistes espionnés, une inquiétude prioritaire du Conseil de l'Europe

En 2023, malgré une légère baisse du nombre de journalistes assassinés, le rapport souligne une diversification croissante, donc pas franchement rassurante, des menaces, pressions et contraintes signalées. Les organisations partenaires de la plateforme du Conseil de l'Europe ont publié 285 alertes l'an dernier, correspondant à ces signalements de menaces ou atteintes à la liberté des médias sur le Vieux continent.

La Secrétaire générale Marija Pejčinović Burić appelle à une action déterminée des États pour contrer les menaces pesant sur la liberté des médias. Les poursuites judiciaires abusives et la surveillance illégale sont particulièrement mises en avant dans le rapport. Elles justifient la nécessité d'engagements fermes des États membres envers les normes de liberté des médias.

Le rapport met aussi – et surtout – en garde contre l'utilisation persistante de technologies d'espionnage, qui mettent en danger la sécurité numérique des journalistes sous surveillance. Le recours à cette méthode est hélas en hausse. Beaucoup se souviennent encore du traumatisme Pegasus, le logiciel espion israélien. L'obligation de rendre des comptes pour les abus signalés reste aujourd'hui insatisfaisante aux yeux du Conseil.

De la détention de journalistes en Russie aux poursuites judiciaires abusives, les journalistes plus exposés que jamais

Une autre tendance inquiète le Conseil de l'Europe : le nombre sans précédent de professionnels des médias en exil, particulièrement originaires de Russie et du Bélarus. Les risques physiques et les poursuites judiciaires les contraignent à quitter leur pays, ce qui crée une diaspora médiatique fragilisée et vulnérable.

Les entraves à la liberté des médias dues aux poursuites judiciaires abusives préoccupent l'organisation internationale. Parmi elles, on peut citer les fameuses poursuites-bâillons, derrières lesquelles on retrouve les procès abusifs, l'appropriation des médias et les attaques contre les médias par les personnalités politiques. Les actions en justice engagées par des responsables politiques qui cherchent à harceler les journalistes sont dans le viseur du Conseil, en ce qu'elles exposent à des sanctions pénales, des amendes et des dommages et intérêts élevés.

La guerre d'agression russe contre l'Ukraine, enfin, continue d'avoir des conséquences majeures dans les médias. Des journalistes ont été tués et blessés. La détention de journalistes (59, au 31 décembre 2023) en Europe et dans les territoires occupés par la Russie souligne l'ampleur des défis auxquels les médias sont confrontés. En Russie justement et au Bélarus, deux pays qui ne font pas partie du Conseil, 65 journalistes seraient encore détenus.