Le projet Asahi Linux, pionnier du support Linux sur les puces Apple Silicon, subit un coup dur. Son leader historique, Hector Martin, claque la porte en dénonçant les méthodes de Linus Torvalds, créateur du noyau Linux. Un départ qui intervient après des mois de tensions autour de l’intégration du langage Rust.
![Le départ d’Hector Martin, figure clé du portage de Linux sur les Mac Apple Silicon, met en lumière les défis de gouvernance et les tensions communautaires dans l’écosystème open source. © The KDE Community](http://pic.clubic.com/b5b91f012278239/1200x675/smart/asahi-linux-banner.png)
Depuis 2021, Asahi Linux permettait d’exécuter Linux sur les Mac M1/M2 grâce au travail acharné d’Hector Martin et son équipe. Mais ce vendredi 14 février 2025, le développeur annonce sa démission sur son blog personnel, pointant du doigt la gestion « défaillante » de Linus Torvalds. Cette crise survient dans un contexte de débats houleux sur l’évolution technique du noyau Linux, où le langage Rust joue un rôle central.
Conflits techniques et management contesté
La goutte d’eau remonte à un désaccord technique sur l’intégration des pilotes Rust dans le noyau Linux. Hector Martin avait publiquement soutenu cette initiative face à l’opposition de certains mainteneurs, comme Christoph Hellwig. Une position qui lui a valu une rebuffade publique de Linus Torvalds : « Et si le problème venait de vous ? », avait rétorqué le créateur de Linux, critiquant les « campagnes sur les réseaux sociaux » menées par Martin.
Pour l’ex-leader d’Asahi Linux, cet incident illustre un « échec majeur de leadership ». Dans un billet détaillé, il dénonce un système qui laisse les mainteneurs de sous-projets « abuser de leur position sans conséquences », citant le départ d’autres contributeurs comme Wedson Almeida Filho (Microsoft) en 2024. Une critique qui résonne avec le rapport 2024 de Sonatype : plus de 300 000 projets open source ont ralenti leurs mises à jour ces quatre dernières années, signe d’un épuisement généralisé.
Malgré ce coup de tonnerre, le projet devrait survivre. Une équipe de sept développeurs – dont Alyssa Rosenzweig et Sven Peter – prend la relève. Leurs priorités : finaliser le support des Mac M3/M4 et combler les lacunes techniques (microphones internes, écrans USB-C…).
![Hector Martin. © The KDE Community](http://pic.clubic.com/9e46c0a22278245/686x386/smart/hector-martin-asahi-linux.jpg)
Mais le défi est de taille. Les composants clés comme le pilote GPU, bien qu’upstreamés vers Mesa, restent désactivés en attente de validation. « Notre code est intentionnellement désactivé et nous n’avons pas le droit de proposer son activation », précisait Martin dans son dernier post technique. Un frein qui explique les retards dénoncés par la communauté.
Le spectre du burnout dans l’open source
Ce cas n’est pas isolé. Dès 2024, la mainteneuse Rust Jynn Nelson alertait : « Le nombre de départs pour cause d’épuisement dans la communauté Rust est alarmant. » Brian Fox, CTO de Sonatype, y voit une menace pour la sécurité logicielle : « Les projets abandonnés deviennent des passoires. »
Hector Martin évoque des causes personnelles aggravantes : « Des harceleurs ont attaqué ma famille et moi. Certains collaborateurs feignaient leur soutien tout en manigançant dans mon dos. » Une situation qui questionne la soutenabilité du modèle open source traditionnel, entre bénévolat et pression industrielle.
Alors que Torvalds défendait encore en 2024 une approche « positive des débats sur Rust », ce départ marque un tournant. Il intervient alors que le langage atteint 18% de parts de marché (Index TIOBE 2025). La relève d’Asahi Linux devra maintenant concilier innovation technique et apaisement communautaire – un équilibre délicat pour un projet au carrefour d’Apple, de Linux et des géants de la tech.
Source : Asahi Linux
03 décembre 2024 à 17h21