Les montres connectées fournissent de précieuses informations sur le rythme cardiaque et la variabilité de la fréquence cardiaque de leur utilisateur, deux valeurs susceptibles d’être impactées par une infection au coronavirus.
Les montres et autres bracelets connectés pourraient contribuer, à leur échelle, à minimiser la propagation de la COVID-19. En effet, l’infection au coronavirus transparaîtrait dans certaines mesures recueillies par ces dispositifs ; et ce, avant même l’apparition de premiers symptômes manifestes comme la perte d’odorat ou la fièvre.
Deux études convergent en ce sens. La première, a été réalisée par le Mount Sinai Health System de New York ; la seconde a été menée par des membres de l’Université de Stanford en Californie et publiée dans Nature Biomedical Engineering en novembre dernier. Dans les deux cas, les résultats des études tendent à démontrer que le coronavirus a un impact mesurable sur le rythme cardiaque et la variabilité de la fréquence cardiaque, jusqu’à neufs jours avant l’apparition des premières manifestations flagrantes de la maladie. Surtout, ces recherches font état de signes avant-coureurs qui seraient détectables par les montres connectées.
Une altération de la VFC
L’étude du Mount Sinai Health System stipule que les signaux précurseurs de la COVID- 19 impacteraient la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC), une mesure à ne pas confondre avec le rythme cardiaque. Selon la définition de l’Académie de médecine, la VFC est la variation dans le temps des battements cardiaques consécutifs, quand le rythme cardiaque est le nombre contractions du cœur en une minute.
Pour prendre un exemple concret, pour un individu qui a une fréquence cardiaque de 60 BPM, son cœur ne se contracte pas à chaque seconde tel un métronome ; il peut s’écouler 0,90 seconde entre deux battements successifs, puis 1,10, etc. Vous pouvez d’ailleurs facilement ressentir cette variabilité en prenant votre pouls lors d’une expiration suivie d’une inspiration ; vous devriez ressentir un raccourcissement du délai entre deux contractions lorsque vous inspirez. Plus le cœur d’un individu bat à un rythme régulier, plus sa VFC est faible ; à l’inverse, plus il varie, plus sa VFC est élevée.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, une VFC faible n’est pas gage d’une meilleure santé, au contraire ; un cœur sain doit faire preuve de réactivité et d’adaptabilité, tant en matière de BPM que de VFC. Or, le coronavirus, prompt à causer des réactions inflammatoires, altèrerait la VFC : les personnes infectées auraient une VFC plus faible que les personnes non contaminées.
Rob Hirten, professeur adjoint de médecine à l’Icahn School of Medicine et auteur de l'étude Warrior Watch, explique : « Notre objectif était d'utiliser des outils permettant d'identifier les infections au moment même de la contamination ou avant que les gens ne se rendent compte qu'ils sont malades. Nous savions déjà que la variabilité du rythme cardiaque change au fur et à mesure que l'inflammation se développe dans le corps, et que la COVID est un événement incroyablement inflammatoire. Cela nous permet de déterminer si les gens sont infectés avant qu'ils ne le sachent ».
Cette étude Warrior Watch a été réalisée sur une période de cinq mois, entre le 29 avril et le 29 septembre. Elle a porté sur 300 personnels de santé du Mount Sinai dotés d'une montre Apple Watch. Notons toutefois que Apple n’a pas participé à l’étude et ne l’a pas non plus financée.
Une augmentation de la fréquence cardiaque au repos
L’étude de l’Université de Stanford, elle, se base sur les données des 50 personnes testées positives au coronavirus sur les 5 000 participants. Celles-ci portaient des objets connectés de divers fabricants, dont Garmin, Fitbit ou Apple.
Les chercheurs ont relevé une augmentation de la fréquence cardiaque au repos chez 81 % des sujets testés positifs au coronavirus, jusqu'à neuf jours et demi avant l'apparition des symptômes.
Des alarmes pour avertir les gens
Bien sûr, d’autres facteurs peuvent expliquer ces phénomènes. La variation doit notamment être observée sur une période suffisamment longue pour être pertinente. Quoi qu’il en soit, les chercheurs estiment que ces découvertes peuvent faciliter une détection précoce de la maladie.
Les équipes du professeur Michael Snyder de l'Université de Stanford, qui a dirigé l'étude, ont ainsi mis au point un système d’alarme pour avertir le porteur d’une montre ou d’un bracelet connectés d’un changement d’état manifeste.
Michael Snyder décrit son fonctionnement ainsi : « Des fluctuations régulières ne déclencheront pas l'alarme - seuls des changements significatifs et durables le feront. […] cela permet d'alerter les gens pour qu'ils ne sortent pas et évitent de rencontrer d’autres personnes ». Le professeur, dont l’alarme s’est déjà déclenchée une fois, a ainsi dû reporter préventivement une réunion.
D’autres projets similaires sont prévus. Parmi ceux-ci, on peut citer celui de la société Oura Health, mené en partenariat avec plusieurs universités californiennes, autour d’un bracelet capable de détecter certains symptômes légers ; l’entreprise Whoop travaille avec l’université de Queensland en Australie sur un dispositif d’étude de la fréquence respiratoire pendant le sommeil.
Enfin, comme le précise Rob Hirten, ces solutions présentent l’avantage de recueillir des indices de manière non invasive mais « ont toutes des limites », bien qu’elles « se complètent les unes les autres ». Il conclut « Actuellement, nous comptons sur les personnes qui disent être malades et ne se sentent pas bien, mais le port d’une montre connectée ne nécessite aucune intervention active de l'utilisateur et permet d'identifier les personnes qui pourraient être asymptomatiques. C'est un moyen de mieux contrôler les maladies infectieuses ».
Source : CBSNews