SFF Invisible Man

L'édition ciné de votre chronique · S | F · fait sa rentrée, à pas de loup, mais avec grand plaisir. À cette occasion, votre serviteur souhaitait faire la lumière sur Invisible Man, un film passé inaperçu – avouez que c'est un comble – en ce début d’année !

Clubic aime la science, Clubic aime l'avenir, Clubic aime la science-fiction. Avec · S | F · nous vous partagerons régulièrement nos recommandations dans le domaine de l'imaginaire : littérature, bande dessinée mais aussi films...  

Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.

Invisible Man (2020)

de Leigh Wannel

Cela faisait plusieurs semaines que j'attendais, patiemment, de vous parler d'Invisible Man et vous encourager à le découvrir séance tenante… mais la fermeture des salles de cinéma en a décidé autrement. Le film n’est disponible que depuis le début de l’été en vidéo (légalement, on s’entend) et cette première chronique est l’occasion idéale de revenir sur cette nouvelle adaptation du roman d’H.G. Wells.

Invisible Man n’est pas la première relecture de ce monument de la littérature et l’on pouvait s’attendre à un film sans grande originalité. Et pourtant j’ai été totalement conquis par cette nouvelle version que je vous propose de découvrir sans attendre.

« J’ai promis à ta soeur que j’allais te faire sortir de la maison. »

Cecilia Kass se réveille dans une grande maison au bord de la mer. Prenant soin de ne pas réveiller son compagnon endormi à ses côtés, elle quitte le lit, déterminée à s’enfuir. Surveillée par un nombre désarmant de caméras, elle touche presque au but quand Aidrian, son "petit ami", tente de la retenir manu militari. Si notre héroïne arrive à s’échapper, elle sait que son ex-compagnon ne la laissera pas en paix et cherchera à la ramener, de gré ou de force.

Moins de 10 minutes que le film est démarré et la tension est déjà à son comble. La mise en scène joue ingénieusement avec nos nerfs en suivant l’héroïne dans cette vaste demeure où il est littéralement impossible de se cacher. La suite n’en sera que plus glaçante.

© Universal Pictures France
© Universal Pictures France

« Aidrian va te hanter si tu le laisses faire. »

Vous vous en doutez, Aidrian Griffin n’est pas un simple monsieur tout-le-monde : l’homme est un génie de l’optique qui a fait fortune en fondant sa société ; oui c'est original (non).

Cependant, tout riche qu'il est, accablé de désespoir suite au départ de sa compagne, l'homme se serait suicidé… laissant à notre héroïne une grande partie de sa fortune. Vous sentez le coup tordu venir ? En effet, le cauchemar, le vrai, va rapidement commencer : des événements étranges vont laisser penser qu’Aidrian est toujours vivant et utilise sa technologie pour terroriser son ex-compagne. Une présence se manifeste dans la maison, des objets bougent de place sans raison. Cecilia en est sure, quelqu’un l’épie en permanence.

Si vous aimez les films d’épouvante, Invisible Man va vous réjouir. Le film multiplie les scènes d’effroi et les fait durer pour installer une ambiance pesante qui ne retombera plus jusqu’à la fin. Le tout avec une économie de moyens qui se révèle très efficace.

« Il n’est pas mort. Je ne peux pas le voir c’est tout. »

Cecilia comprendra assez vite ce que nous savons déjà : Aidrian est désormais invisible. L’homme a utilisé ses connaissances et sa technologie pour développer une combinaison constituée de très nombreuses caméras et de miroirs qui lui permettent de se camoufler et de se fondre littéralement dans son environnement.

Très habile, cette modernisation du concept ancre le personnage de l’Homme invisible dans un univers « réaliste » ou en tout cas plus crédible que celui dépeint dans le roman d’origine et ses diverses adaptations. Jusqu’alors le scientifique s’injectait une « potion magique » qui le rendait miraculeusement invisible. On a connu plus plausible.

Dans cette version 2020, Aidrian Griffin est tout simplement un entrepreneur de la Silicon Valley, égocentrique, mégalomane et sociopathe comme peuvent être parfois dépeints les Elon Musk, Steve Jobs ou Mark Zuckerberg. Même si on ne voit jamais son visage durant la quasi intégralité du film et on ne l’entend que rarement, il hante le film à chaque seconde ; ses apparitions n’en sont que plus impressionnantes.

© Universal Pictures France

« Tu as pris tout ce que j’étais, il ne reste plus rien. »

À partir du moment où l’ennemi est identifié, le film se mute en thriller virant à l’affrontement psychologique où les deux personnages vont se confronter, quitte à sombrer l’un et l’autre dans la folie.

Je serai malhonnête si je vous disais que le mouvement #MeToo et la vague de libération de la parole des femmes n’a pas infusé dans l’écriture du scénario. Pourtant Invisible Man n'est pas un tract et s’apprécie avant tout comme un vrai divertissement au premier degré, jamais complaisant dans sa violence.

On suit une jeune femme sous emprise qui cherche à sauver sa peau et à fuir les violences sexistes infligées par son compagnon. Et cette menace est tout aussi invisible que l’agresseur. Cette manière de mêler l’intrigue au propos me parait aujourd’hui toujours aussi brillante et bien plus subtile qu’il n’y paraît au premier abord. Ce mélange fonctionne aussi grâce à l’immense prestation d’Elizabeth Moss, habitée comme toujours par son rôle et capable de vous faire ressentir de nombreuses émotions par un simple regard.

« Il a besoin de vous parce que vous n’avez pas besoin de lui. »

C’est dans un dernier tiers à 100 à l’heure que se conclura Invisible Man, enchainant les scènes de terreur, les face-à-face et les retournements de situation. On termine le film épuisé, sur une note douce-amère et une dernière scène tout aussi dérangeante et ambiguë.

Quel joie de commencer cette nouvelle saison par un vrai petit bijou de SF horrifique, un genre qui m’a paru si souvent malmené et relégué aux fins fonds des catalogues des éditeurs ces dernières années.

Si vous souhaitez une bonne dose de frissons et d’angoisse durant votre prochaine soirée TV, Invisible Man saura vous apporter votre lot de sueurs froides. Sur ce, bon film et à dans deux semaines pour un nouveau voyage forcément futuriste.

Invisible Man est disponible en DVD, Blu-Ray, Ultra-HD 4K et VOD chez Universal Pictures France.