Si la bataille des contrôleurs fait rage, la guerre que se livrent les différents fabricants de SSD se joue également sur le terrain de la mémoire flash. Samsung l'a bien compris et profite de sa position enviable de constructeur de puces mémoire pour être le premier sur la TLC, ce nouveau type de mémoire amené à remplacer la MLC aujourd'hui présente sur une écrasante majorité de SSD.
Qu'est-ce exactement que cette mémoire TLC ? Quelles sont les implications en termes de coût, de performance et d'endurance ? Autant de questions auxquelles nous répondons dans ce test !
La NAND TLC : avantages et inconvénients
Un SSD, c'est un contrôleur et son firmware, mais aussi et surtout de la mémoire flash. Cette dernière a en effet un rôle primordial à jouer en ce qui concerne les performances, bien sûr, mais aussi sur le terrain de l'endurance. Et sur ces deux critères, la mémoire de type TLC part avec un certain handicap.Les premiers SSD étaient faits à base de mémoire SLC, ou Single Layer Cell, capable de ne stocker qu'un seul bit de donnée. Puis est arrivé la mémoire MLC, qui gère deux bits. Désormais, c'est avec la NAND TLC, pour Triple Layer Cell, qu'il faudra compter. Comme son nom l'indique, ces cellules sont capables de stocker jusqu'à 3 bits. Une technologie qui passe pour être désormais au point, alors qu'elle fut présentée par Intel et Micron dès octobre 2009.
L'intérêt est évident du point de vue du stockage : on accède par ce biais à une densité de données plus importante. Ce qui permet mécaniquement et à capacité constante de réduire le nombre de puces, et donc en théorie, le prix et la consommation du SSD. Le meilleur des mondes ? Pas tout à fait.
D'une part parce que l'écriture de 3 bits sur une cellule prend davantage de temps que d'en écrire 2. Du coup, les performances en écriture devraient en toute logique être moindres qu'avec des puces de type MLC.
Ensuite parce que l'écriture de 3 bits par cellules a un effet plutôt destructeur sur cette dernière. En effet, à chaque cycle d'écriture, la couche isolante de la cellule est légèrement dégradée. L'usure est modérée avec l'écriture d'un bit par cellule, et cette dernière peut alors supporter jusqu'à 100 000 cycles. Pour de la NAND MLC, la durée de vie est divisée par 10 et passe à 10 000 cycles, et même à 5 000 voire 3 000 cycles pour les puces gravées en 2x nm. Avec la TLC, ce chiffre diminue encore pour passer à 1 250 cycles, voire 750 cycles pour les puces les plus finement gravées, comme c'est le cas sur le 840 Series. Par rapport aux puces de type SLC, la chute est spectaculaire, puisque l'endurance annoncée a été divisée par 133 !
Pour une capacité de 250 Go, ces 750 cycles correspondent en théorie à 25 ans durant lesquels vous allez écrire 20 Go par jour sur votre SSD. Relativement confortable. Mais pour un modèle de 64 Go, on passe à environ 6 ans et demi. Et là, ça commence à faire peu, même si Samsung revendique l'optimisation des algorithmes de garbage collection et autres over-provisioning qui visent à prolonger la durée de vie des puces NAND. Aveu de faiblesse à propos de ces puces TLC ? Certes, les besoins sont différents, mais Samsung a prévu une version Pro du 840 Series... qui utilise des puces MLC.
Les composants du Samsung 840 Series
Vous ne verrez malheureusement pas les composants du nouveau SSD de Samsung, faute d'avoir pu l'ouvrir. Ah, l'utilisation du Torx 4... Toutefois, on sait de ce SSD qu'il n'utilise plus le contrôleur du 830 Series, basé pour rappel sur un ARM9 cadencé à 220 MHz. Place désormais à un MDX Cortex-R4 fonctionnant à 300 MHz et utilisant de la mémoire base consommation de type LPDDR2 pour le cache. En revanche, on retrouve la présence de 3 cœurs dans cette puce, dont on ne sait s'ils ont ou non une réelle influence sur les performances du contrôleur.Performances | |||
120 Go | 240 Go | 500 Go | |
Lecture séquentielle (Mo/s) | 530 | 540 | 530 |
Écriture séquentielle (Mo/s) | 130 | 250 | 330 |
Lecture aléatoire 4 Ko (IOPS) | 85 000 | 95 000 | 97 000 |
Écriture aléatoire 4 Ko (IOPS) | 32 000 | 44 000 | 63 000 |
Comme on pouvait s'y attendre avec la mémoire TLC, les performances en écriture séquentielle du 840 Series sont nettement en deçà de ce qui existe par ailleurs sur le marché. Le modèle 120 Go, notamment, est particulièrement limité en la matière, avec un débit qui n'excédera pas les 130 Mo/s. En lecture en revanche, les chiffres sont conformes à ceux que l'on trouve chez la concurrence.
Sachez enfin que ce contrôleur gère évidemment le TRIM et le NCQ, mais Samsung a choisi de réserver le chiffrement AES 256-bit à la version pro de son SSD, comme c'était déjà le cas sur la génération précédente.
Concernant les puces mémoire utilisées, on a ici affaire à des NAND gravées en 21 nm et issues naturellement des usines Samsung. Des puces qui utilisent l'interface « Toggle-mode » développée par le constructeur. Notez que notre modèle de 250 Go contient 8 puces de 64 Go, pour un total de 256 Go. Cela signifie que Samsung réserve un peu plus de 2% de la capacité de son SSD aux algorithmes d'over-provisioning. C'est mieux que sur le 830 Series, qui ne possédait pas de réserve dédiée, alors qu'il est toujours possible de forcer un espace supplémentaire via le SSD Magician livré avec le 840 Series.
Performances
Ce test du Samsung 840 Series nous permet d'innover quelque peu dans nos articles dédiés aux SSD. En effet, nous regroupons désormais nos graphiques au sein d'un diaporama.De plus, nous avons ajouté quelques tests qui apparaissent ici avec les derniers SSD en date, à savoir le 335 Series d'Intel, le Vector d'OCZ et bien entendu le 840 Series de Samsung. Enfin, nous avons ajouté le logiciel ATTO à notre panel de programmes de test.
Le test sous ATTO montre clairement que le 840 Series atteint son rythme de croisière en écriture dès les 4 Ko, sans dépasser les 255 Mo/s. La lecture parvient aux 540 Mo/s attendu dès 64 Ko. En lecture sous Everest, le SSD de Samsung prend la tête de notre classement, que ce soit sur les tests séquentiels ou sur les tests aléatoires. En écriture, c'est tout l'inverse, puisqu'il prend la dernière place sur les tests séquentiels. Sur les petits fichiers en accès aléatoire en revanche, il se comporte très bien, puisqu'il n'est devancé que par le Vector d'OCZ.
Le 840 Series confirme ses prestations en lecture sur nos tests de copie. En écriture et en copie proche en revanche, on est loin des ténors du marché. Sur nos tests pratiques (lancement de Windows, ouverture de Photoshop et lancement de Far Cry 2), les prestations sont bonnes, mais si PC Mark n'arrive pas à différencier nos trois derniers modèles testés, WinRAR s'en charge : le 840 Series arrive bon dernier au jeu de la décompression.
Notre avis
En revanche, la question de l'endurance de ce SSD et de ses puces TLC peut légitimement être posée. Évidemment, nous ne l'avons pas eu entre les mains suffisamment de temps pour en juger, et l'avenir nous dira si l'emploi de telles puces NAND pose ou non problème. Là où nous attendions Samsung, c'est sur le prix. Certes, la marque n'a pas pour politique habituelle de casser les prix. Mais compte tenu de sa capacité à fabriquer l'ensemble du SSD seule (et donc à réduire les coûts) et compte tenu de l'utilisation de la mémoire TLC, nous pensions que la firme coréenne allait en profiter pour frapper un grand coup et casser les prix.
Las, ce n'est pas vraiment le cas. Certes, le prix du modèle 240 Go est, à l'heure actuelle, près d'une trentaine d'euros moindre que celui d'un Intel 335 Series ou d'un Vertex 4. Certes, on tombe à 0,65 euro du Go sur ce modèle. Mais nous attendions mieux de la part de Samsung, et au moment de faire son choix, l'incertitude qui pèse sur la durée de vie des puces TLC et le sacrifice quant aux performances en écriture risquent de peser dans la balance.