Alors que la NASA et l'agence spatiale européenne préparent la mission Mars Sample Return (MSR), un haut responsable chinois a dévoilé l'architecture d'une mission récupérant elle aussi des échantillons pour les ramener sur Terre. Un plan plus simple et moins scientifique… Pour être les premiers ?
Ce ne sera toutefois pas une balade de santé.
Un peu de Mars à la maison
Cela fait plusieurs années que les autorités spatiales chinoises ont émis leur volonté de ramener des échantillons de la surface de Mars. Néanmoins, ces espoirs n'ont pu prendre corps que depuis le succès, l'an dernier, de la mise en orbite de la mission Tianwen-1, suivi quelques mois plus tard par l'atterrissage réussi du rover Zhurong. Ce dernier poursuit par ailleurs sa mission sur la surface actuellement, même s'il économise son énergie à cause de l'hiver martien.
Il n'est donc pas si surprenant de voir Sun Zezhou, responsable de Tianwen-1, présenter un concept détaillé de mission de récolte et de retour d'échantillons martiens. À un détail près : si elle venait à décoller dans la bonne fenêtre de tir, alors elle pourrait ramener son précieux matériel sur Terre deux années avant la mission conjointe entre Américains et Européens !
Concepts chinois, concepts américains
La mission chinoise (provisoirement appelée Tianwen-3) ferait appel à deux décollages, pour une architecture de mission assez simplifiée et basée sur des éléments éprouvés lors des dernières missions lunaires de la Chine. Un premier lancement aurait lieu avec un grand atterrisseur, se posant sur la surface martienne et récoltant des échantillons sur place (avec foreuse, pelleteuse, et éventuellement un tout petit rover) avant de faire décoller les éléments récoltés dans une capsule vers l'orbite.
Cette dernière serait alors rejointe par le deuxième véhicule de la mission qui les ramènerait vers la Terre, pour y larguer à son tour une capsule avec les échantillons. Ainsi, avec deux fusées « classiques » (une Longue Marche 5 et une Longue Marche 3B), la Chine pourrait, avec un premier décollage en 2027, se poser sur Mars en 2029 et revenir sur Terre en 2031.
La mission conjointe entre NASA et ESA pour récupérer des échantillons martiens a déjà démarré, avec le rover Perseverance qui, patiemment, parcourt le delta du cratère Jezero pour forer et capturer les précieux sédiments sur une quarantaine de sites d'intérêt. Mais la récupération de ces échantillons ne sera pas facile.
Dans le schéma de mission actuel, deux missions décolleront en 2028 puis atterriront dans le cratère Jezero : l'une avec un rover de récupération (et/ou un hélicoptère comme Ingenuity), l'autre avec une fusée qui, une fois les échantillons à bord, rejoindra l'orbite. Charge ensuite à une autre mission européenne de les ramener à la maison avec l'orbiteur ERO en 2033.
Au jeu des retards…
Néanmoins, on aurait tort de mettre la charrue avant les bœufs, que ce soit côté chinois comme américain. D'abord, même s'il y a tout lieu de croire que la présentation de Sun Zezhou est sérieuse et entérinée par les décideurs du programme spatial chinois, le décollage d'une mission aussi ambitieuse est encore loin. Et en cinq ans, c'est possible…
Mais il pourrait tout autant y avoir des retards : la Chine, souvent mise en avant comme « plus à l'heure » que les agences occidentales grâce à ses programmes de très long terme, a repoussé plusieurs fois ces dernières années ses missions lunaires Chang'E 5 puis 6. De la même façon, quelques hésitations ont mis des bâtons dans les roues du projet de la NASA, autant que les coûts estimés de la mission.
Une future « première » qui fait déjà couler beaucoup d'encre
Ensuite, on aurait tort de croire que les deux profils de mission sont équivalents. Certes, sur le plan du prestige, la Chine pourrait être la première nation à ramener des échantillons martiens. Ce qui ne serait pas sans un certain relent de « course à l'espace » façon années 60.
Mais étant donné la précision (et le danger) de l'atterrissage d'une plateforme, le dispositif chinois pour collecter et récupérer des échantillons sera forcément moins ambitieux que Perseverance, qui sillonne un paysage pendant des années et sur des dizaines de kilomètres pour trouver les sites géologiques les plus intéressants.
Ce qui ne veut pas dire non plus que le carottage d'un site « facile » est dénué d'intérêt scientifique… Simplement, les ambitions ne seraient pas les mêmes. Reste à savoir si ces prévisions se concrétisent : dans tous les cas, deux missions de récupération d'échantillons ont plus de chances de réussir qu'une seule !
Source : SPACE NEWS