Venus, notre proche cousine à la météo brûlante

Eric Bottlaender
Par Eric Bottlaender, Spécialiste espace.
Publié le 13 avril 2021 à 17h03
Venus par Venus Express
Venus, vu par la sonde Venus Express. © ESA

Une voisine de la Terre, de la même taille, accessible en quelques mois de trajet ? Vous pouvez la retrouver facilement dans le ciel nocturne, c'est Venus bien sûr !

Mais ne vous y trompez pas : sur place, c'est l'enfer.

Proche cousine

Etant donné qu'il s'agit de l'objet du ciel nocturne le plus visible après la Lune, on peut affirmer que des humains observent Venus depuis des dizaines de milliers d'années. On lui donne même encore parfois son ancien nom « Etoile du Berger », même s'il est techniquement incorrect... Venus est la deuxième planète la plus proche du Soleil, qu'elle orbite à environ 108 millions de kilomètres de distance. Comme sa petite cousine Mercure, elle n'a pas de lune, et partage en fait plusieurs caractéristiques avec la Terre. Un diamètre très proche de celui de cette dernière (12 103 km), une masse qui s'en rapproche aussi, la présence d'une atmosphère, de volcanisme, et même des conditions qui furent peut-être propices à la vie, il y a quelques milliards d'années. Alors pourquoi si peu de réservations pour des voyages vers Venus ?

Venus par Pioneer Venus Explorer
Venus et ses nuages, vus par la sonde Pioneer Venus Explorer. © NASA

Highway to Hell

Un adage populaire voudrait que « les femmes viennent de Venus »... Si c'est le cas, il est facile de comprendre pourquoi elles en sont parties. Pour commencer, il y a l'atmosphère. Celle-ci est particulièrement dense et constituée à plus de 96 % par du CO2. Il y a aussi les vents, qui soufflent à plus de 300 km/h (jusqu'à 700 km/h à 55 km d'altitude environ), les nuages aux gouttelettes d'acide sulfurique, et une pression au niveau du sol qui atteint... 92 bars (soit l'équivalent de la pression qui s'exercerait à 910 mètres de profondeur, sur Terre) !

Si vous hésitez encore, sachez que Venus offre aussi les températures moyennes les plus élevées du Système Solaire (hors Soleil) avec 467°C à l'ombre, en moyenne. Clairement les conditions les plus horribles possibles. Les paysages sont des monochromes dégradés entre le jaune et l'orange, et la planète connaît des tremblements de Venus, des éruptions, voire les deux, ce bien qu'il n'y ai pas de tectonique des plaques et même si aucune coulée de lave n'a encore été observée - ce qui compléterait bien la carte postale par ailleurs.

On vise Venus, mais...

Figurez-vous tout de même que malgré ces caractéristiques extrêmes, l'exploration de Venus, du fait de sa proximité avec la Terre, a connu de belles avancées en 60 ans d'aventures spatiales. La première mission à destination de Venus a décollé de l'URSS avant Youri Gagarine ! Bon, malheureusement, elle fait partie des nombreux échecs de l'époque.

Il faudra en effet attendre le 14 décembre 1962 pour que la sonde américaine Mariner-2 survole Venus, à quelques dizaines de milliers de kilomètres de sa surface, parvenant ainsi à mesurer la température de son atmosphère. Toutefois il faut admettre que les soviétiques ne manquaient pas de détermination. Après 12 échecs d'affilée (dont des missions qui ont failli réussir), la sonde Venera 4 fut la première à transmettre des données à travers l'atmosphère de Venus.

Venus surface par Magellan
L'un des relevés radar les plus précis de la surface de Venus, par l'orbiteur Magellan. © NASA

Planète communiste

Durant plus de 20 ans ensuite, et jusqu'à la chute de l'URSS, Venus fut un formidable terrain de jeu pour la technologie spatiale soviétique, qui y écrivit ses lettres de noblesse (à défaut de réussir sur Mars). En 1973, la sonde Venera 8 devient le tout premier atterrisseur à se poser et à transmettre des données depuis le sol d'une autre planète, Vénus donc. En octobre 1975, nouvelle première pour l'URSS, qui devient la première à photographier la surface de Venus avec Venera 9 et 10 (les américains n'arriveront que six mois plus tard à se poser avec succès à la surface de Mars).

Le succès des missions Venera se prolongera jusqu'au début des années 80, avec les exceptionnels panoramas de l'aride surface de Venus, et une véritable collection d'autres données moins prisées par le grand public. Mais se poser en enfer est un exercice qui ne pardonne rien : malgré leur taille et leur conception à toute épreuve, les sondes Venera ne résisteront pas plus d'une heure et demie à la surface.

Venus Surface
La surface de Venus vue par la sonde Venera 13

Missions cosmopolites

Entre 1990 et 1994, la NASA pilote la sonde Magellan, qui réussit une cartographie complète de la planète grâce à son radar à haute résolution, livrant des clichés inégalés aujourd'hui. Plus récemment, d'autres missions se sont intéressées à l'atmosphère de Venus (Venus Express, ESA) et même spécifiquement à ses nuages et courants de vents (Akatsuki, JAXA, la seule sonde encore active en orbite aujourd'hui).

Si elle n'est pas boudée par les scientifiques qui demandent régulièrement de nouvelles missions pour étudier Venus, les décideurs n'ont pas le même attrait pour Venus que pour sa cousine Mars. Il faut toutefois s'attendre à de nouvelles découvertes dans la décennie à venir : plusieurs missions sont en préparation pour aller cartographier sa surface avec une nouvelle précision, traverser son atmosphère, faire survivre de petits robots plusieurs heures sur son sol ou même, luxe futuriste, envoyer des ballons dirigeables pour des missions au long cours dans la haute atmosphère.

NASA Rover Venus concept
Vue d'artiste d'un concept de robot à la surface Venus. © NASA/JPL-Caltech


Fun fact :
Une année sur Venus dure 224,7 jours terrestres, et c'est moins qu'une journée sidérale (le temps pour la planète de faire un tour sur elle-même) à la surface de Venus, qui dure, elle, 243 jours terrestres ! Sa rotation est en effet très lente (et à l'envers par rapport à toutes les planètes du Système Solaire, sauf Uranus), en tout cas à la surface. Car les vents en haute altitude, eux, forment un jet-stream continu. Et pour les touristes ? La durée d'une journée solaire est tout de même de 116 jours...


Notes touristiques :
- Voyage 8/10 : À condition de partir lorsque Venus est proche de la Terre, le trajet ne dure que quatre mois, ce qui est loin d'être désagréable. Figurez-vous que cela a même sérieusement été envisagé dans les années 70 (survol, puis retour dans la foulée).
- Paysages 3/10 : Malgré quelques canyons et montagnes (quelques sommets à plus de 5 000 m dans Beta Regio), il y a beaucoup de plaines et de toutes façons, on n'y voit pas grand-chose. C'était peut-être joli, mais ça c'était avant.
- Habitabilité 1/10 : Le sol est solide. C'est à peu près la seule caractéristique positive. Tout le reste essaie de vous tuer en permanence.



Eric Bottlaender
Spécialiste espace
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Commentaires (10)
Side_a9

« Le sol est solide. C’est à peu près la seule caractéristique positive. Tout le reste essaie de vous tuer en permanence. » On parle de l’Australie? ^^

DrGeekill

J’apprécie vraiment cette idée sur les planètes. Bravo, vraiment.
Les fun fact et les notes de voyage apportent une touche personnelle unique et bien agréable en cette période. Félicitations à vous.

dududuche

Cette note me parait incomplète. Il me semble que certaines missions se sont posées sur le sol dur de Vénus et ont pris des clichés en beaucoup plus qu’1h30 comme mentionné dans la nouvelle. Les derniers atterrisseurs sont restés une journée entière et même plus. D’autre part, je crois que la température n’est pas de 460 degrés partout sur Vénus (c’est la température au sol) ; il me semble que la température à une certaine altitude, dans les couches nuageuses supérieures et là où le ciel est bleu (et où l’air est respirable je crois avec de l’oxygène), avoisinne les 30°. Il était en effet question d’envoyer des ballons dirigeables ou de construire des citées suspendues dans l’air pour vivre sur Vénus. Merci de me contacter sur MP, car je ne crois pas à cette nouvelle digne d’un site techno, c’est du « phishing » pur et dur non ? Ou alors vous êtes vraiment perdus et aveuglés dans vos pixels informatiques :wink: Autre chose aussi, je crois qu’il est assez facile de se rendre sur Vénus autrement que par un vaisseau spatial qui traverse le Cosmos. Il me semble qu’il y a des routes plus directes, comme le laissait d’ailleurs supposer « l’étoile du berger » depuis tout temps. Le ciel et l’espace n’ont pas là-haut la définition ou la représentation, la « modélisation » qu’on leur donne ici bas.

ebottlaender

Même si Clubic est orienté « informatique » ce n’est pas mon cas, je suis rédacteur spécialisé sur le spatial :slight_smile:
Pour ce qui est des atterrisseurs sur Venus, désolé de vous décevoir, vous pouvez trouver la liste des missions sur Wiki : aucune ne dépasse environ 90 minutes d’activité au sol. Nous sommes bien d’accord par rapport à la température (mais je n’écris jamais dans l’article qu’elle est uniforme sur l’ensemble de la couche atmosphérique), toutefois l’air n’y est pas respirable ou en tout cas, ça n’a jamais été prouvé.

Pour la fin de votre commentaire, merci de nous envoyer la recette de vos space-cakes, ils intéressent l’ensemble de la rédaction.

ebottlaender

Merci !

dududuche

Mais je vous en prie ! De la farine, trois œufs, une demi-tablette de chocolat, un yaourt, du sucre, un peu de levure, de l’eau et une pincée de sel. De la résine de canabis effritée, du « black Bombay » ou un émulsifiant psychothrope assez puissant comme cela. Mélanger bien le tout, mettre dans un moule à tarte et placer au four 30mn. C’est prêt !

dududuche

Je plaisante, bien entendu. Je n’ai jamais fait de space cake (j’en ai mangé des tonnes et des tonnes, mais je n’en ai jamais fabriqué un). Hum, bon bref… pour rester un peu sérieux et ne pas être confiné hors de la nouvelle, il faut dire que les informations sur le Wikipédia concernant les sciences (et particulièrement l’astrophysique et la physique des particules) sont fausses selon moi. Wikipédia est un peu le terrain de jeu des mathématiciens, tout ce qui y est explicité l’est par des formules complexes, intégrales triples, séries de fourrier et autre et on tend à s’égarer des vrais problèmes physiques et de leur définition intrinsèque. Selon moi ! Pour l’espace, Vénus est une planète qui se situe dans la direction du soleil à l’opposé je crois. Comme toutes les planètes, son corps est défini par la courbure de l’espace ; il s’agit donc des nuages au-dessus de notre tête, arrondis par la rotondité de l’espace. Peut-on la définir comme cela ? On peut peut-être y aller à pied, et ensuite faire un petit bout de chemin en hélicoptère ou quelque chose comme cela. En admettant que la terre se définit aussi comme un plan dans un espace courbe. Il faut alors suivre la bonne direction sur terre, c’est tout. Ou alors Vénus est accessible par la voie des airs mais il faut prendre le bon « canal aérien » qui ne nous enverra pas sur des corps rocheux comme Mars au-delà de la « troposphère », ou quelque chose comme cela. Avez-vous des avis, j’ai bon ?

ebottlaender

Vous avez très mauvais.
L’espace, tout comme la sphéricité de la Terre, n’est pas un concept mathématique mais une réalité physique. La notion de distance n’est pas adaptable à votre bon vouloir ni aux croyances des uns ou des autres. Et si vous ne suivez pas Wikipédia (c’est votre choix), au moins lisez les articles Clubic…

philouze

Par contre, c’est vrai que l’article aurait mérité un gros détour sur les projets de conquête aérienne de Vénus : c’est simple la haute atmosphère vénusienne est l’endroit (actuellement connu ) le plus accueillant après la terre :

  • 1 bar de pression
  • ciel bleu
  • environ 40°C
  • atmosphère de co2 ( à changer en 02 + carbone) + 3% d’azote a extraire pour créer un air respirable qui sur vénus a le bon gout d’être un gaz porteur (en gros « vivre » dans une bulle d’air est suffisant pour obtenir une flottabilité à haute altitude)
  • une circulation atmosphérique contra rotative permettant un jour permanent
  • acide sulfurique stocké plusieurs dizaines de kilomètre plus bas

Les projets de cités flottantes existent vraiment et son assez inspirants, faut juste pas trop se pencher du balcon

dududuche

ebottlaender, je veux bien suivre les articles Clubic mais ils ne m’apportent rien que je ne sais déjà. Exemple ces 3 voyageurs dans l’ISS jeudi, ils vont encore nous raconter en direct comment ils font pipi, de quelle façon ils mangent un poisson pané aux algues vertes, etc… en se moquant un peu des internautes. J’en ai marre, je veux de la vraie news ! Pour l’ISS par exemple, ça fait des années que l’on sait qu’on peut recréer la pesanteur sur une station spatiale (avec un bras rotatif qui emmène la station dans un mouvement circulaire). Pourquoi on nous montre encore cette station de chimpanzés alors qu’il existe sûrement une vraie station orbitale quelque part autour de la terre beaucoup plus sophistiquée ? À bas la propagande Clubic, de la vraie news !

Philouze, ah enfin quelqu’un qui semble partager mes points de vue. Oui je me demande si dans l’atmosphère vraiment haute de Vénus, l’attraction ne diminue pas aussi (d’où fini les problèmes de « chute du balcon »). Peut-être qu’on peut très bien léviter entre 2 corps célestes, la terre et le sol rocheux de Vénus, qu’en pensez-vous ? Dans le film « warriors of the galaxy » l’espace n’est pas toujours représenté comme une entité sombre et vide comme d’habitude (comme dans la guerre des étoiles, etc…). Il y a des coins colorés, sans doute des nuages i ci et là. Pensez-vous qu’il pourrait y avoir des endroits (Vénus pourquoi pas) avec ce genre d’atmosphère. Ou des voisinages de planètes, disons. Warriors of the galaxy est un film de SF ok, mais quelquefois certaines choses sont plausibles. Et la science a évolué depuis le film de Méliès en 1910 le voyage sur la lune. Je verrais bien la possibilité pour ma part, de respirer dans certains coins de l’espace, de jouer à la pétanque sur un petit astéroïde, etc… ou des choses comme ça. J’ai bon ? Validez-vous mes théories ? Ebottlaender, j’ai un peu bon ? Je sens que je peux être dans la bonne direction.

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