Ce conseil est présenté comme une entité indépendante, à portée internationale ; Facebook devra se plier à ses décisions, rendues de manière transparente.
La modération des contenus sur les réseaux sociaux est régulièrement débattue, et celle de Facebook n’échappe bien sûr pas aux critiques. Il faut dire qu’avec ses 2 milliards d’utilisateurs encouragés à publier régulièrement, cela représente un sacré défi. Dans ce but, l’entreprise planche depuis plusieurs années sur la constitution d’un Conseil de surveillance. Les utilisateurs ont maintenant la possibilité de le saisir, s’ils estiment que le réseau social a injustement modéré une de leur publication.
Mots d’ordre : indépendance, compétence, accessibilité et transparence
Dorénavant, si Facebook ou Instagram censure un post, la victime pourra contester cette décision en interpellant l’organe de contrôle. Ce conseil comprend 40 membres. Parmi eux, une lauréate du prix Nobel de la paix, Tawakkol Karman, une ancienne Première ministre du Danemark, Helle Thorning-Schmidt, des professeurs d’universités, des avocats, etc. Chaque membre est mandaté pour trois ans. Sur un plan purement financier, pour assurer pérennité et indépendance à l'entité, Facebook a alloué 130 millions de dollars sur un fond fiduciaire irrévocable.
Sur la page qui lui est consacré, il est écrit que ce conseil a pour mission « de promouvoir la liberté d’expression en prenant des décisions raisonnées et indépendantes concernant le contenu publié sur Facebook et Instagram, ainsi qu’en émettant des recommandations sur les règles de Facebook relatives au contenu impactées ». Quatre principes clés sont mis en avant : l’indépendance, la compétence, l’accessibilité et la transparence.
Son directeur administratif, Thomas Hughes, a déclaré à la presse hier : « Notre objectif est de construire une institution qui ne se contente pas de réagir à un seul mouvement ou de suivre un cycle d'information spécifique, mais qui protège les droits humains et la liberté d'expression sur le long terme ».
Des affaires étudiées au cas par cas
Le principe de fonctionnement de ce conseil est le suivant : les membres siègent à tour de rôle dans un comité qui sélectionne les cas par un vote majoritaire. Ensuite, un jury composé de cinq membres, dont au moins un doit être originaire du pays où a été publié le contenu litigieux, aura la lourde tâche de déterminer si celui-ci respecte « les règles et valeurs de Facebook ».
D’autre part, avant de prendre une décision, les jurés inviteront les utilisateurs de Facebook à s’exprimer et à débattre sur l’affaire en question via un espace dédié ; ceux qui le souhaitent auront la possibilité d’être avertis à chaque nouveau cas examiné. En outre, Helle Thorning-Schmidt précise que chaque verdict rendu sera publié et archivé sur le site web du conseil ; cela, dans un souci de transparence.
Bien sûr, les membres du conseil ont conscience qu’ils ne pourront traiter toutes les demandes. Jamal Greene, professeur de droit à Columbia et co-président du conseil d'administration, explique : « Nous ne pourrons pas entendre tous les appels, simplement parce que le volume soumis sera trop élevé, mais nous voulons que nos décisions soient influentes et aient un impact au-delà de la seule affaire ».
La possibilité de demander l'examen d’une publication tierce possible d’ici quelques mois
Actuellement, les utilisateurs n’ont pas la possibilité de désigner des contenus tiers qu’ils souhaiteraient soumettre au jugement du conseil. Cette fonctionnalité sera néanmoins disponible « dans les prochains mois ».
Ainsi, en l’état, Facebook n’autorise que l’auteur d’une publication retirée à demander une réévaluation de cette décision auprès du conseil. Dans certains cas, la procédure pourra bénéficier d’un processus accéléré ; toutefois, cette modalité est suspendue jusqu’aux élections américaines du 3 novembre.
Pour qu’un utilisateur puisse faire appel auprès du conseil, il faut donc que son contenu ait été modéré par Facebook ou Instagram au préalable ; il bénéficie ensuite de 15 jours pour lancer un recours. Dans le cas où celui-ci serait accepté, la commission dispose de 90 jours pour rendre son verdict.
De son côté, Facebook a promis de ne pas interférer avec les décisions prises par l’organe de contrôle ; en outre, celui-ci aura le choix d’accepter ou de refuser les cas soumis par Facebook, dans le cadre de la procédure de votes mentionnée plus haut.
Le P.-D.G. de Facebook, Mark Zuckerberg, a déclaré dans une interview accordée à The Information être « optimiste » à propos du rôle du conseil et estime « qu'il est très important de créer une gouvernance plus indépendante » ; il ajoute qu'en « supposant que le modèle fonctionne comme prévu, j'espère, soit étendre son rôle, soit ajouter d'autres formes de gouvernance formelle à d'autres aspects de nos politiques de contenu ».
Sources : Oversightboard, TheVerge