Le logo AWS, ici au AWS re:Invent 2022 (© Alexandre Boero pour Clubic)
Le logo AWS, ici au AWS re:Invent 2022 (© Alexandre Boero pour Clubic)

À l’occasion du AWS re:Invent 2022, Amazon Web Services a mis au centre de la table les sujets des données personnelles et de l’environnement, traitant notamment de la consommation d’eau, impérieuse question liée à l’exploitation de ses data centers. Avec son directeur général France, nous avons voulu en savoir plus sur l’implantation de l’entreprise dans l’Hexagone.

En France, Amazon Web Services prend de plus en plus de poids, s’érigeant comme un acteur incontournable du Cloud en séduisant aussi bien petites, moyennes et grandes entreprises, à coups de solutions toujours plus fiables et nombreuses. Bien que les autorités françaises et européennes prônent l’utilisation de services européens, AWS s’emploie à enrôler toujours plus de clients, et multiplie les initiatives pour apaiser les esprits autour de la notion de Cloud de confiance. Mais où en est Amazon Web Services en ce qui concerne la France ? Lors du AWS re:Invent à Las Vegas, nous avons rencontré Julien Groues, le directeur général de l’entreprise dans l’Hexagone, pour en savoir plus sur les ambitions, les projets et l’installation de la firme dans le pays.

AWS en France, ce sont plusieurs milliards d’euros investis

Depuis sa création en 2006 et l’arrivée de ses premiers employés en France en 2011, Amazon Web Services a fait du chemin dans le monde et dans l’Hexagone. À date, AWS possède une région de data centers en France, en Île-de-France, disponible depuis 2017. L’entreprise compte, sur cette même région, trois zones de disponibilité. Chaque zone de disponibilité comporte au moins un centre de données, ce qui offre une certaine capacité de résilience aux clients AWS français.

Si la France n’est pas le premier pays où AWS a pu s’installer sur le Vieux Continent, le marché hexagonal devrait représenter 6 milliards d’euros d’investissements pour la société, sur la période 2017-2031. Cet investissement global concerne les data centers de l’entreprise, mais aussi « le personnel, la formation, l’accompagnement des clients et des partenaires », ajoute Julien Groues.

Julien Groues, directeur général d'AWS France (© Alexandre Boero pour Clubic)
Julien Groues, directeur général d'AWS France (© Alexandre Boero pour Clubic)

Aujourd’hui, plus de 1 000 personnes accompagnent les clients et partenaires d’AWS en France, avec une politique axée autour de la réduction des coûts et des émissions de CO2, un impératif environnemental marketing certes, mais ô combien impérieux.

Une crise mondiale et une autre des talents : AWS se porte bien mais a vu sa croissance ralentir

AWS est aujourd’hui installée en région parisienne, mais l’entreprise a su prendre une dimension locale, avec des antennes hors de la zone francilienne. « L’accompagnement des clients se fait en local, rappelle Julien Groues, avant d’ajouter : notre premier bureau en France fut ouvert à Paris, mais nous sommes rapidement allés à Lyon, à Toulouse, à Bordeaux, à Nantes et à Lille. Et nous poursuivrons notre implantation, pour être toujours plus près de nos clients ».

Selon diverses sources, le New York Times étant le premier média à avoir évoqué la possibilité, Amazon pourrait se séparer de 10 000, voire de 20 000 salariés, comme d’autres géants de la Tech avant lui, touchés aussi bien par la guerre en Ukraine que par des coûts énergétiques élevés et des soucis dans l’approvisionnement. Chez AWS, pourtant division la plus rentable du géant du e-commerce, le ralentissement est réel. Au trimestre dernier, la croissance de son chiffre d’affaires ne fut « que » de 27,5 %, loin de ses dernières années fastes. Rien de dramatique donc, mais une petite alerte.

On ignore véritablement si la division Cloud d’Amazon peut être touchée par les licenciements ni à quelle hauteur. « On fait attention de voir comment on se prépare pour l'année 2023. Nous sommes dans une phase d'accompagnement et de développement. On est peut-être plus précautionneux sur les recrutements, mais nous allons continuer de nous développer extrêmement rapidement », promet le patron d’AWS France. Une demi-réponse – légitime de son point de vue de dirigeant – qui ne nous avance pas plus.

Mais le constat est le suivant : « Il manque environ 20 millions de personnes formées au numérique pour accélérer la transformation numérique des entreprises, des organisations et du secteur public », ajoute Julien Groues. Pour essayer d’accélérer les recrutements et les montées en compétences, AWS mise sur divers éléments, autres que les juniors qui sortent d’écoles : « de nombreux talents existent déjà dans les entreprises ; d’autres peuvent transformer leurs compétences via la formation, la formation en continu par exemple ».

« Évidemment, toutes les personnes et ingénieurs qui sortent des universités aujourd'hui, les plus jeunes aussi, sont autant d'opportunités », reconnaît M. Groues, qui tient à rappeler qu’AWS forme aussi des personnes parfois très éloignées du marché de l'emploi, avec la formation re/Start, en collaboration avec Simplon (l’école de la deuxième chance du numérique) et Pôle Emploi. Cette dernière formation permet d’ailleurs, au bout de six mois, d'obtenir les premières certifications d'AWS et d'accompagner les partenaires de la firme et ses clients. Julien Groues en est convaincu : « Tout ça permettra à la France d'aller chercher de la valeur ».

Aujourd’hui, Amazon Web Services indique sur son site de recrutement vouloir attirer des techniciens de data center, des ingénieurs ou encore du personnel pour la maintenance de ses sites. La data, le FinOps, le DevOps, la migration, la modernisation, l’analytics, l’intelligence artificielle et la data sont autant de domaines qui intéressent l’entreprise.

Une très forte présence en France, jusque dans le quotidien des Français

80 % des entreprises du CAC 40 travaillent avec Amazon Web Services. 80 % des entreprises du fameux indice Next 40 cher à Bruno Le Maire également. Engie (avec qui les liens sont plus forts que jamais depuis le AWS re:Invent 2022 et une volonté d’aider leurs clients respectifs à réduire leurs émissions de carbone), Veolia, Schneider Electric, Qonto, ManoMano, Content Square, M6, Gameloft, 20 Minutes, mais également la SNCF, PMU et Radio France font partie de ses clients en France. « Plusieurs milliers de clients du pays, plusieurs millions dans le monde utilisent nos technologies », nous dit l’entreprise.

« Si le matin vous vous réveillez et que vous écoutez la radio, regardez la télévision ou accédez à une émission en replay, que ce soit MYTF1 ou myCanal, derrière, ce sont des technologies d'AWS. Si vous réservez un restaurant sur The Fork, ce sont des technologies d'AWS. Si vous allez dans une chambre d'hôtel du groupe Accor, ça aura été nos technologies derrière. Elles permettent de créer des applications, des expériences pour les clients de nos clients », explique Julien Groues.

Derrière les doutes, la volonté d'accélérer

Aussi puissant soit-il dans son domaine, le géant AWS vit comme tout le monde avec certaines craintes. « La situation géopolitique dans laquelle nous sommes est compliquée », reconnaît le patron de la division française. « Nous faisons en sorte de répondre aux attentes de nos clients, qui cherchent à gagner en flexibilité. Pendant la période COVID, les entreprises travaillant avec AWS ont pu s'adapter extrêmement rapidement, réduire leurs coûts (Ndlr : une volonté des entreprises) et répondre vite à de nouvelles demandes ».

« L’augmentation des coûts de l'énergie et de certains autres domaines n’est pas à négliger », ajoute Julien Groues. « Cependant, passer sur des solutions AWS permet de réduire ses coûts grâce à l'efficacité dont nous parlions », précise-t-il, prêchant en toute logique pour sa paroisse.

Concernant la France, nos confrères du Journal du Net révélaient récemment l’existence d’un projet de data center géant d’Amazon en Île-de-France. Relancé par nos soins à ce sujet du côté de Las Vegas, Julien Groues a sans surprise botté en touche, respectant la culture du secret propre à l’entreprise américaine. « Nous ne dévoilons pas nos plans sur les data centers », nous a-t-il répondu, tout en précisant néanmoins vouloir « continuer d'investir dans la création de centres de données, pour que nos clients en France aient accès à notre technologie. Nous continuerons aussi d’investir dans l'énergie renouvelable, pour que d'ici 2024, 100 % de nos infrastructures soient fournies par de l'énergie verte ».