L'Assemblée nationale, puis le Sénat, devraient rapidement adopter une proposition de loi visant à interdire les appels, e-mails et SMS de démarchage au compte personnel de formation (CPF).
Il est rare qu'une proposition de loi fasse consensus comme celle déposée par le député MoDem et Indépendants Bruno Fuchs, qui entend lutter contre la fraude au compte personnel de formation et interdire le démarchage de ses titulaires. Un texte très court (deux à trois articles, les élus trancheront), qui devrait tour à tour être adopté par les députés et sénateurs, pour une promulgation espérée avant la fin de l'année et une entrée en vigueur au tout début 2023. C'est en tout cas le souhait de son rapporteur.
Le CPF, très lucratif pour les escrocs et organismes malveillants, doit être mieux protégé et encadré
Le compte personnel de formation (CPF) est particulièrement lucratif pour les escrocs. Chaque année, ce dernier est alimenté à hauteur de 500 euros pour les salariés au moins à mi-temps, et de 800 euros pour ceux qui sont les moins qualifiés ou qui sont en situation de handicap.
Et forcément, le fait que les Français aient directement accès à leurs droits individuels et aux formations disponibles via la plateforme « Mon Compte Formation » fait autant du dispositif un succès qu'un appât de rêve pour des individus malveillants, qui se livrent à des pratiques commerciales agressives et abusives pour pousser les individus à se lancer dans une formation payante contre leur gré.
On connaît désormais bien les dérives de ce succès : spam téléphonique (appels, SMS) et e-mails provenant de centres d'appels et organismes de formations qui n'hésitent pas à entamer des démarches frauduleuses, qui viennent s'ajouter à d'autres fraudes, encore plus graves, comme l'usurpation d'identité ou le détournement des droits CPF, ces deux dernières étant néanmoins davantage encadrées par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
C'est dans l'optique de lutter contre ces dérives et de maintenir une certaine lisibilité et crédibilité du compte personnel de formation que les députés Bruno Fuchs (Modem), Sylvain Maillard (Renaissance) et Thomas Mesnier (Horizons) ont présenté une proposition de loi, qui devrait être une formalité au niveau de l'Assemblée nationale, avant d'être discutée au Sénat, puis promulguée en fin d'année si tout va bien. Que retrouve-t-on dans le texte ?
Fin du démarchage, partage d'informations entre les services de l'État et lourdes sanctions : une « petite loi », mais un vrai arsenal de lutte
L'article 1er vise à interdire la prospection commerciale des titulaires d'un CPF, de quelle que manière que ce soit, qui viserait à collecter leurs données à caractère personnel ou à conclure des contrats portant sur des actions de formation éligibles au dispositif. Pour faire simple : il mettrait fin au démarchage téléphonique au CPF. Les parlementaires veulent inscrire la lutte contre la fraude au CPF dans le code de la consommation directement, au même titre que les démarches menées dans le cadre du dispositif MaPrimeRénov'. L'article s'inscrirait aussi dans le Code du travail, « dès lors que ce démarchage n'a pas lieu dans le cadre d'une prestation en cours entre un individu et un organisme de formation », lit-on dans le texte.
Cet article habiliterait les agents de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCF) à débusquer et constater les manquements potentiels. Tout acteur se rendant coupable d'un abus dans le démarchage et la souscription à une formation dans le cadre du CPF serait alors susceptible de se voir infliger une amende administrative.
Cette amende administrative pourrait alors atteindre un montant maximal de 75 000 euros, pour une personne physique, et de 375 000 euros, pour une personne morale.
L'article 2, lui, confère une base légale au partage d'informations entre les autorités compétentes pour intervenir dans la lutte contre la fraude au CPF. Autrement dit, l'article permettrait à la Caisse des dépôts et consignations, à l'institution France compétences et aux services de l'État habilités (DGCCRF, DREETS, etc.) de collaborer pour prévenir et détecter des fraudes, mais aussi de mener des contrôles et prononcer des sanctions à l'encontre des individus ou organismes qui se livreraient à des abus.
Et si à l'origine le texte comportait deux articles, un troisième est venu s'ajouter lors de son examen en commission. Introduit par amendement, cet article 3, s'il est adopté, permettrait la mise en place d'une procédure de référencement poussée des organismes de formation sur le portail « Mon Compte Formation », référencement qui passerait alors par la Caisse des dépôts et consignations, qui donnerait son feu vert ou pas aux différents organismes.