De la SF qui mise sur le spirituel pour se démarquer, avouez que ce n’est pas banal. C’est pourtant la formidable histoire que nous dépeint Arthur C. Clarke dans Les Enfants d’Icare.
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Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.
Les Enfants d’Icare (2013)
Arthur C. Clarke
Le XXème siècle fut un vivier inépuisable de créations fantastiques portées par des auteurs de génie tels que Isaac Asimov, Robert A. Henlein ou encore Arthur C. Clarke. Autant de noms qui resteront dans la postérité et surtout dans le cœur des fans de mondes imaginaires.
Moi-même, j’ai grandi avec ces récits empreints d’une certaine magie, à une époque où la hard science était encore balbutiante, voire inexistante. Une époque où le réchauffement climatique ne faisait pas encore parler de lui. Une époque où porter un costume d’argent ridicule était la classe absolue pour un héros de SF. La belle époque quoi !
Je vais donc vous présenter aujourd’hui Les Enfants d’Icare, un roman de 1953 réédité par Bragelonne en 2013. Écrit de main de maître par Arthur C. Clarke, ce récit s’est vite transformé pour moi en un page turner de l’enfer tant il m’a envoûté. Diantre, que la SF d’antan est bonne !
“Nous leur démontrerons que la démocratie peut arriver sur la Lune avant eux.”
Êtes-vous prêts à une aventure au long cours ? Car c’est ce que vous allez vivre avec Les Enfants d’Icare. Cette pépite de Clarke se déroule en effet sur une période de 200 ans, commençant durant la Guerre Froide et sa course effrénée à la Lune. Un événement incroyable va bouleverser les humains, mais ils n’en sont bien entendu pas conscients, trop occupés qu’ils sont à se tirer la bourre comme des gamins dans la cour de récré...
Enfance et passage à l’âge adulte sont d’ailleurs les mamelles de ce roman. Mais commençons par le commencement si vous le voulez bien. Les Enfants d’Icare est découpé en trois grandes parties, chacune représentant un stade d’évolution dans l’histoire de l’humanité. Vous vous en doutez, nous commençons le récit à une époque où les Hommes sont comme des enfants.
La Guerre Froide bat son plein. Les humains viennent de découvrir la puissance de l’atome. Chaque pays sort les muscles pour prouver sa supériorité sur les autres. Bref, pas le pan le plus glorieux de notre histoire. C’est alors que survient un événement majeur qui va amener l’humanité vers son âge d’or, mais aussi vers sa perte : l’invasion des Suzerains.
“Comme tous les hommes de la Terre, il resta immobile à contempler pendant quelques secondes qui semblaient durer une éternité les gigantesques vaisseaux qui descendaient majestueusement.”
Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Nul ne le sait. Et pourtant, l’arrivée de mystérieux vaisseaux argentés – l’argent était visiblement très en vogue au XXème... – va bouleverser notre monde jusque dans ses racines les plus profondes. J’ai eu l’impression de revivre le film Independence Day, les morts à la pelle et les aliens moches en moins !
C’est justement ce que j’ai apprécié dans cette “invasion” façon Clarke. Ici, les envahisseurs ne sont pas hostiles. Ils se contentent de voler au-dessus des grandes villes, sans aucune intention belliqueuse. Pas de rayon de la mort, pas d’extraterrestres au cerveau hypertrophié amateurs de porno, pas de robots tueurs venus du futur à la recherche de John Connor ou autre. C’est d’ailleurs là toute la magie de ce roman : il est d’une douceur revigorante.
Les Suzerains – comme ils se font surnommer par les humains – ne se dévoilent pas. On ne sait rien de leur apparence physique. Ils affirment seulement que leur présence sur Terre est inévitable et que l’explication en sera donnée quand les Hommes seront suffisamment mûrs pour accepter la vérité. Rien que pour ça, on a envie de tourner les pages sans s’arrêter, un vrai coup de génie de la part du papa de 2001 : l’Odyssée de l’espace.
“Dans cinquante ans, c’est-à-dire deux générations, nous sortirons de nos vaisseaux et l’humanité nous verra alors tels que nous sommes.”
Les Suzerains ne restent pas totalement silencieux. Ils créent des contacts avec les humains par l’intermédiaire de Karellen, leur porte-parole. Les réactions habituelles ne se font pas attendre : certains pays lancent leurs armes nucléaires contre les vaisseaux d’argent, sans aucun succès. D’autres basculent dans le fanatisme religieux. Et certains tentent de découvrir l’apparence des Suzerains avec divers subterfuges.
Il s’avère vite que l’humanité est incapable d’entreprendre quoi que ce soit d’autre que le dialogue. La technologie des nouveaux arrivants est telle que rien ne les atteints. S’ensuit alors une vague de changements dans notre évolution. Les guerres cessent. Les dictatures meurent petit à petit. De même, religions et racisme disparaissent purement et simplement de notre belle planète bleue.
On assiste à un véritable passage à l’âge adulte, récompensé cinquante ans plus tard par la révélation de… Skippy le Grand Gourou ! Non... pardon, je m’égare...
Comme promis, les Suzerains débarquent de leurs vaisseaux après ces cinquante années à surveiller notre planète depuis les cieux. Dès lors, on comprend mieux pourquoi les hommes n’étaient pas prêts à les voir d’entrée de jeu.
“La plus terrifiante de toutes les légendes, surgissant d’un passé inconnu, s’était faite chair.”
Décidemment, les aliens n’ont pas de bol avec leur look. Vu celui des Suzerains, on comprend pourquoi ils ont souhaité attendre que les hommes mûrissent avant de fouler le sol terrien. Les bougres ressemblent en effet... au diable !
Cornes, ailes, queue fourchue : toute la panoplie est là. Mais les humains n’ont plus peur. La présence des Suzerains est maintenant considérée comme acquise. Commence alors pour l’humanité un nouvel âge d’or. Arthur C. Clarke nous dévoile dès lors une véritable utopie qui laisse rêveur. Le monde ne fait plus qu’un.
Enfin, pas totalement. Au cours des années, l’homme perd peu à peu le goût de la découverte car il maîtrise tout. Art et science perdent leur intérêt premier. Chacun est en mesure de créer ce qu’il désire. Toutes nos échelles de valeur sont bouleversées, au point qu’une certaine oisiveté semble s’installer. Et au milieu de tout ça, les Suzerains continuent de nous observer...
“Nous attendons cet événement depuis que nous sommes arrivés sur la Terre.”
Grandeur et décadence. Après avoir vécu plus de 150 ans d’utopie, il est l’heure pour l’humanité de tirer sa révérence. Pourquoi ? Comment ? Vous le saurez en lisant Les Enfants d’Icare. Je ne peux décemment pas vous spoiler la fin de ce magnifique roman écrit par la main d’une des maîtres de la SF moderne !
Sachez juste que vous assisterez à des événements qui dépassent le cadre de la science, du moins telle qu’on la connait. Arthur C. Clarke mêle avec brio science et mysticisme, brouillant la frontière entre ces deux mondes, laissant certaines zones d’ombres ou faisant la lumière sur des faits considérés comme paranormaux.
Les Enfants d’Icare est un véritable blockbuster qui mérite toute votre attention, ne serait-ce que pour profiter d’un agréable moment de cette SF magique venue tout droit du XXème siècle. La plume de Clarke est toujours aussi accrocheuse, impossible de lâcher ce bouquin avant de l’avoir fini. Et quel plaisir d’assister à cette évolution poignante de l’humanité. Croyez-moi, après avoir tourné la dernière page, vous ne verrez plus notre monde du même œil !
Les Enfants d'Icare (2013) est édité chez Bragelonne en version papier et EPUB. Il est aussi disponible sur 7Switch en version EPUB et sur Amazon en version Kindle.