Après le très politique Fondation du maître Asimov, j’ai ressenti le besoin de me lancer dans une lecture SF plus légère. Ça tombe bien, Nous sommes Bob traînait depuis quelques temps dans ma liseuse. C’est donc parti pour un voyage interstellaire bourré de hard science et de références à la pop culture !
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Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.
Nous sommes Bob (2018)
Dennis E. Taylor
J’imagine que, comme moi, vous êtes peu à avoir eu l’occasion de lire des bouquins de SF tournés vers l’humour. Ce genre se prête de fait plus souvent à des univers sombres, bourrés d’extra-terrestres belliqueux, de bataille spatiales homériques et autres joyeusetés… Alors quand Nous sommes Bob s’est présenté à moi, c’est avec un soupçon d’étonnement et pas mal de curiosité que je me suis plongé dans ses pages.
On part ici sur une trilogie éditée en 2018 dans nos contrées par Bragelonne, une des meilleures épiceries pour dégoter de la SF bien sympa. Au programme : hard science, pas mal d’humour et, surtout, des tonnes de référence à la culture SF du XXe siècle. De quoi ravir tous les fans de Star Wars, Star Trek et autres Star Machin !
« - Donc… Vous allez me décapiter. »
Aujourd’hui, je me sens de bonne humeur, l'état d'esprit parfait pour une petite chronique légère. Alors, pourquoi pas parler de décapitation ? Oui, oui, vous avez bien lu. C’est bien comme ça que démarre le tout premier roman de la trilogie de Dennis E. Taylor !
Notre héros, Robert Johansson, est devenu immensément riche suite à la vente de son entreprise d’ingénierie informatique. Et plutôt que de claquer son argent en sexe, drogue et rock’n’roll, le brave Bob décide de se faire cryogéniser, en cas de pépin. Sauf que la cryogénie présente un petit inconvénient : elle ne permet pas de conserver le corps entier, juste la tête… Malgré ce léger désagrément, Bob signe le contrat et continue sa vie, fêtant avec amis et famille ce joli coup, qui le mettra à l’abri du besoin jusqu’à la fin de sa vie.
Toutefois, vous vous en doutez bien, les choses vont mal tourner, et ce de manière très rapide. Une convention SF, un groupe de cosplayers, un moment d’inattention et Bob finit sous une voiture… C’est ce qu’on appelle une introduction sur les chapeaux de roues (pardonnez-moi le jeu de mots bancal) !
« Nous préparons l’un d’entre vous à devenir l’intelligence aux commandes d’une sonde de von Neumann »
Bienvenue en 2133. Bob se réveille d’un long sommeil cryogénique de 117 ans. De quoi laisser au monde (et aux procédés cryogéniques) le temps de changer. Et de fait notre héros n’est plus tout à fait lui-même : il est devenu un réplicant, soit une copie parfaite du cerveau du Bob d’origine. Bien entendu, ledit cerveau a été détruit lors de la procédure, faisant de Robert Johansson un programme informatique sans corps physique.
Ce n’est pas le seul petit incident de parcours que va devoir endurer notre héros. Le monde a totalement changé de visage. Les USA sont maintenant une sorte de dictature religieuse du nom de FAITH qui ferait passer le mandat de Trump pour une utopie pacifiste. Le pays est d’ailleurs passé au bord de la troisième guerre mondiale et la course à l’espace a été relancée à vitesse grand V. Bref, ça fait beaucoup à encaisser pour un esprit qui vient de se réveiller d’un sommeil de 117 ans, surtout quand il apprend qu’il va être balancé dans l’espace aussi vite que possible afin de coiffer les autres pays au poteau…
L’auteur arrive ici à nous mettre un grand coup dans les dents en nous livrant un univers totalement décalé, sorte de caricature de notre monde moderne. On se sent pris aux tripes par ce brusque réveil qui pourrait bien présager de notre futur. Du coup, on comprend mieux pourquoi les autres réplicants deviennent tous plus ou moins cinglés après quelques jours de « vie » !
« Très bien, Guppy. Déploie les systèmes de fabrication. Que la fête commence. »
La première partie de Nous sommes Bob se déroule à 100 à l'heure. Attentat terroriste d’une faction de FAITH, attaque d’un pays concurrent, début de guerre mondiale… Bob passe de peu à côté de l’écran bleu de la mort à plusieurs reprises, laissant finalement derrière lui une Terre au bord de l’implosion. Mais son objectif est atteint : il devient le premier exemplaire opérationnel d’une sonde de von Neumann, un appareil destiné à se répliquer à chaque système qu’il explorera.
Sauf que notre héros, lui, ne l’entend pas de cette oreille. Doté de capacités informatiques hors normes, il fait sauter tous les contrôles qu’aurait pu avoir FAITH sur lui. Il commence ensuite à se répliquer, constatant d’ailleurs au passage que chacun de ses clones hérite d’une personnalité différente. Et comme tout geek qui se respecte, chacun choisi un nom qui prête à sourire : Homer, Goku et ainsi de suite. Ils sont d’ailleurs accompagnés par une IA, dont Bob crée un avatar ressemblant à… L’amiral Ackbar de Star Wars, mais avec un corps de poisson !
Je dois d’ailleurs vous prévenir, Nous sommes Bob regorge de références à la culture pop/SF. Le livre est bourré de citations et de noms de personnages qui ne manqueront pas de faire sourire les plus geeks d’entre nous. Cela rend d'ailleurs cette trilogie assez unique en son genre tant on sent bien que l’auteur est un vrai geek en puissance ! Pas d'inquiétude toutefois, il n'y a pas non plus besoin d’être un ou une pro de la SF moderne pour apprécier le bouquin.
« Les enfoirés. Ils balancent des astéroïdes sur Terre. »
Même transformé en programme informatique capable de réfléchir en quelques millisecondes et de se cloner tout seul, Bob n’en reste pas moins « humain ». Il revient donc sur Terre – enfin un de ses clones, qui n’est autre que lui, sans être vraiment lui, bref vous voyez le topo – quelques dizaines d’années après son départ mouvementé. Ce qu’il y découvre dépasse l’entendement…
Le monde tel qu’on le connaît n’existe plus. Les humains ont fini par s’auto-détruire, allant jusqu’à lancer des astéroïdes sur les puissances qu’ils considèrent comme des ennemis. Un véritable massacre qui se poursuit même si personne ne sait plus pourquoi les choses ont tourné au vinaigre. C’est beau la bêtise humaine.
Une grosse partie du roman se joue ainsi dans notre bon vieux système solaire. Les clones de Bob réussissent tant bien que mal à trouver quelques survivants et mettent à profit leurs capacités technologiques pour tenter de les sauver en les envoyant coloniser d’autres planètes. Un projet d’envergure qui ne se déroulera bien entendu pas sans quelques accrocs, démontrant au passage que ces réplicants ont visiblement plus de cervelles que leurs homologues de chair et d’os…
« Je venais de découvrir une forme de vie intelligente non humaine »
Il y a tant à dire sur Nous sommes Bob. Impossible de tout compacter en cinq paragraphes. Je vais donc aller à l’essentiel en espérant que vous aurez le temps de savourer cette belle épopée spatiale. Car c’est aussi de cela qu’il s’agit : d’un voyage aux confins de notre univers, une sorte de Star Trek où l’exploration joue un rôle central. En s’éparpillant aux quatre coins de la galaxie, les Bob découvrent de vraies merveilles, dont une forme de vie intelligente.
Le roman mêle avec brio son propos et ces phases d’exploration aux inévitables batailles spatiales contre les sondes ennemies, qui elles aussi essaiment dans l’espace. J’ai d’ailleurs eu l’impression de replonger dans le fabuleux Cal de Terre quand Bob décide d’aider les Deltaiens dans leur évolution. Quel plaisir de voir nos réplicants mener les aliens vers leur évolution !
Je vais devoir m’arrêter là afin de ne pas vous gâcher le plaisir de la découverte. Je vous invite fortement à vous pencher sur la trilogie Nous sommes Bob. Dennis E. Taylor y réussi le pari de faire cohabiter exploration spatiale, hard science, action et humour avec un véritable savoir-faire.
Du début à la fin je me suis régalé des péripéties de Bob et de ses clones. En bref, Nous sommes Bob est une véritable petite pépite de la SF que je ne peux que vous recommander !
Nous sommes Bob (2018) est édité chez Bragelonne en version papier. Il est aussi disponible sur 7Switch en version EPUB et sur Amazon en version Kindle.