Alors que Renault annonçait l’année dernière l’arrêt des modèles Talisman, Espace, mais aussi Scénic pour 2022, le constructeur au losange vient tout juste de présenter le Scénic Vision. Nous avons rencontré les équipes et vous allez voir que ce concept-car préfigure un modèle totalement différent du monospace d’antan. Une vraie « Renaulution » ?
Peut-être avez-vous entendu parler de la « Renaulution ». Selon Luca De Meo, le directeur général de Renault, ce plan stratégique pour le groupe Renault vise à « transformer la stratégie d’entreprise, en la faisant passer du volume à la valeur ». Et d'ajouter : « Nous allons redonner plus de force à nos marques, chacune avec son territoire clair et différencié ». Pas moins de sept véhicules sont attendus sous cette ère nouvelle. L’iconique Renault 5 dans sa version 100 % électrique en fait partie, mais celle-ci n’a pas encore vu le jour. Contrairement à la toute nouvelle Mégane E-Tech que nous avons testée dans nos colonnes et qui fait elle aussi partie de cette Renaulution.
Venons-en à la nouveauté de ce mois de mai, à savoir le concept Renault Scénic Vision, ou comment la marque au losange fait renaître ce modèle dont elle a annoncé arrêter la production, tout du moins dans sa version thermique. Alors à quoi faut-il s’attendre ? Nous avons rencontré les équipes à l’occasion de la présentation de ce modèle. Celles-ci partagent avec nous les principales pistes de travail qui se concrétiseront sur le modèle de série à l'horizon 2024, mais pas seulement.
H2 Tech : une motorisation hybride « électrique et hydrogène »
Vous n’êtes pas sans savoir qu’à une époque, les concept-cars avaient un côté magique. Les constructeurs exploitaient ces show cars pour y mettre un peu ce qu’ils voulaient. Quitte à faire dans le « futuriste », autant présenter des véhicules avec de la conduite autonome, des sièges qui pivotent sur eux-mêmes, des écrans géants partout et des assistants personnels en tout genre. Désormais, les grands constructeurs se sont un peu calmés et proposent des choses bien plus réalisables à plus ou moins long terme.
Nous allons aborder juste après la partie design, mais avant cela parlons de motorisation. Le Scénic Vision est bel et bien un véhicule 100 % électrique, mais avec ce modèle la marque au losange s’essaie à une forme différente d’électrification. Dans le cas présent, on peut parler de plateforme hybride puisque celle-ci combine à la fois un moteur électrique de 160 kW couplé à une batterie de 40 kWh (déjà intégrés dans la Mégane E-Tech) et une pile à combustible de 16 kW.
En d’autres termes, on peut parler d’une hybridation électrique et hydrogène, que l’on peut aussi interpréter de la même manière que la technologie du range extender, grâce à laquelle ce concept prétend à une autonomie de 800 km.
Renault évoque l’exemple d’un trajet Paris-Marseille avec un seul arrêt, non pas pour recharger la batterie, mais uniquement la cuve à hydrogène et cela en quelques minutes seulement. Mais c'est à l'heure actuelle très théorique. En effet, les stations de recharge à hydrogène sont rarissimes sur le territoire. Nous avons toutefois bien le temps d’y venir, la technologie mise en scène dans le concept-car ne devrait pas débarquer sur les véhicules de série avant 2030.
© Renault
Une hybridation pas irréalisable donc, mais bien trop prématurée à l'heure actuelle et même sans grand intérêt, si ce n'est celui de faire la démonstration d'un principe nouveau qui se veut plus vert. En effet, le concept Renault Scénic Vision « est un véhicule qui présente une empreinte carbone inférieure de 75 % à celle d'un véhicule électrique comme la Mégane E-Tech électrique. Sa batterie est jusqu'à 60 % moins carbonée qu'une batterie équivalente, grâce à l'utilisation de boucles courtes et d'un approvisionnement en minerais bas carbone, et à l'utilisation d'une énergie bas carbone pour assembler et produire la batterie ». Lorsqu'une telle technologie sera sur le point de voir le jour, les experts ne manqueront pas de s'exprimer sur le bilan énergétique/carbone global de celle-ci.
Scénic est mort sous l’ère du monospace pour mieux renaître
« Le nom Scénic ce n'est pas le nom d’une forme ou d’une silhouette automobile, parce que pour moi Scénic, c’est un concept d’habitacle, de voyage et de vie à bord et c’est ça qui est important. Et alors si les silhouettes monospaces ne sont plus d’actualité parce qu’elles plaisent moins, alors il faut renouveler l’extérieur pour provoquer le coup de cœur alors qu’il remplit toujours sa mission de Scénic à l'intérieur ». Ce postulat, c'est celui de Gilles Vidal, le directeur du design de la marque Renault lors de notre interview.
Après quatre générations occupant les rangs des monospaces, le Scénic prévu pour 2024 ne souhaite plus se positionner sur ce segment, mais pas non plus clairement sur celui des SUV. Avec des dimensions de 4,49 m de long, 1,9 m de large, 1,59 m de haut et un empattement de 2,83m, il est décrit comme un véhicule à part.
Et a fortiori, cela s’applique surtout à ce concept-car qui fait la part belle à l’aérodynamisme, comme nous le rappelle Gilles Vidal. Certaines lignes caractéristiques qui améliorent le CO2 ont été exploitées au maximum, ou presque, pour ne pas tomber dans le design trop clivant d’un véhicule hyper aérodynamique. Le Scénic Vision est dans l’ensemble très bas (1,59 m comme nous le disions) ce qui l’exclut de la catégorie des SUV et ce n’est pas la seule raison d’ailleurs.
Comme nous le précise le directeur du design, « la garde au sol est faible, les passages de roues sont très près des pneus, l’accent est mis sur l’efficience. Donc ce ne sont pas des codes de monospace ni de SUV. C’est un engin nouveau dans le paysage qui est né de ce qu’on voulait lui faire faire et comment le rendre attractif ».
Reste que de notre point de vue, on ne peut s'empêcher de lui trouver des airs de ressemblance avec une certaine Volkswagen ID.4, tout du moins pour l'arrière. Non ?
Un cockpit futuriste qui s’adapte aux occupants
Échanger avec les designers sur l’histoire qu’il y a autour de la création de leur « bébé » fait toujours partie de ces expériences humaines très agréables.
Nous pourrions vous décrire ce Scénic Vision dans les moindres détails, jusqu'à la signature lumineuse qui reprend la forme du losange. Losange qui tapisse par ailleurs toute la partie haute du pare-chocs. Parmi les explications et les efforts réalisés, nous apprécions particulièrement l’histoire qu'il y a autour de la peinture.
On pourrait penser que le Scénic Vision est tout simplement noir, mais en réalité, le pigment a été extrait du carbone présent dans l’atmosphère, ce qui a permis à Renault d'obtenir une poudre noire réutilisée ensuite dans la peinture.
© D. Nogueira pour Clubic
Idem pour le sol, qui est conçu à partir de bouteilles de lait recyclées, ainsi que de la tuyauterie PVC industrielle. Car oui, ce concept-car met aussi grandement l’accent sur l’écoconception et la création en cycles courts. Ainsi, pour faire simple, 70 % des matériaux utilisés dans le véhicule sont recyclés et plus de 95 % du véhicule est recyclable, y compris la batterie.
Mais ce qui nous intéresse chez Clubic se passe du côté de la technologie. Renault considère qu'un véhicule « agréable à vivre » doit s’adapter à ses occupants et c’est pourquoi il a recours ici à un système de déverrouillage par reconnaissance faciale.
Une fois installé à bord, le conducteur retrouve ses propres réglages de sièges, ses préférences multimédias, mais il est aussi surveillé par un volant doté de capteurs capables d’analyser son état physique, notamment les risques de somnolence. Une caméra située en partie haute, au centre du pare-brise, assure elle que tout se passe bien dans l’habitacle.
Et si dans votre profil conducteur vous avez renseigné le fait que vous avez des problèmes de vue, alors les petits écrans disposés sur la planche de bord sont capables de grossir légèrement leur typographie. Idem si vous avez des problèmes d’audition avec les enceintes intégrées dans chaque appui-tête. Non seulement celles-ci permettent à chaque passager de se créer une bulle audio dans l’habitacle, mais cela permet de communiquer entre l’avant et l’arrière.
À l'extérieur, impossible de ne pas être interpellé par ces imposantes roues de 21 pouces. Celles-ci disposent elles aussi d’une particularité : elles sont pleines, ou presque.
En effet, sur la jante en métal, Renault a plaqué des sortes d’enjoliveurs dotés de volets (montés sur ressorts) qui se referment lorsque le véhicule roule à vive allure. Résultat, l’aérodynamisme est amélioré sur voie rapide et, en ville par exemple, les volets restent ouverts pour refroidir les freins.
Enfin, dernier élément et non des moindres, le traditionnel compteur numérique et l'écran central sont remplacés par un écran panoramique qui surplombe la planche de bord de part en part. Sur place, la lisibilité est difficile au vu des conditions très lumineuses, mais on peut en effet distinguer les indications de vitesse du véhicule ou encore une cartographie.
Toutefois, chez Renault, on met surtout en avant la capacité du véhicule à afficher un retour vidéo de ce qu’il se passe juste devant la voiture. Une autre manière d’afficher le retour des caméras pendant vos manœuvres de stationnement, par exemple.
Difficile de ne pas être étonnés par le rendu de ces panneaux qui habillent la planche de bord et les contre-portes. Ceux-ci présentent la particularité de créer des ambiances lumineuses à l'intérieur de cet habitacle massivement bi-ton (blanc et noir) en exploitant la diffraction de la lumière.
Si l'appréciation du résultat reste une affaire de goût, nous avons trouvé l'efficacité remarquable. La densité de la couleur est telle qu'on a vraiment l'impression qu'il s'agit d'une peinture appliquée.
Il reste encore tant de choses à dire sur le Scénic Vision. D’une certaine manière, les équipes de la marque au losange nous ont convaincus sur le fait qu’il est possible de revoir la conception de nos véhicules pour que ceux-ci soient à la fois innovants, spacieux, confortables et, surtout, que leur conception peut être bien plus écoresponsable. Cela, bien sûr, même si ces idées sont difficilement transposables aux véhicules de série pour des raisons de faisabilité, de sécurité ou de coût (surtout de coût, d’ailleurs).