Le premier opérateur de télécommunications mobiles japonais et pionnier mondial du secteur, NTT Docomo, en était une fois de plus la vedette. Son vaste stand rouge et blanc (ses nouvelles couleurs, plus chaleureuses) était comme d'habitude divisé en trois parties : les terminaux, les services et un aperçu de ses activités de recherche & développement. Assurément, le plus intéressant se trouvait dans cet espace R&D où les fidèles visiteurs mesurent chaque année les progrès accomplis sur la « Super 3G ».
Cette année, pour montrer le potentiel de cette future technologie à très haut débit pour réseaux cellulaires, NTT Docomo ne se contentait pas d'aligner des planches explicatives et des oscilloscopes déroulant de sibyllins graphes que seuls les professionnels savent interpréter. L'opérateur s'est au contraire attaché à présenter une application concrète probante, en l'occurrence la possibilité de jouer en ligne sur console et grand écran grâce à une transmission via une infrastructure cellulaire « Super 3G ».
NTT Docomo invitait les visiteurs à participer à des combats virtuels à distance grâce à un dispositif « Super 3G » expérimental. D'un côté donc, le joueur lambda manipulant la manette d'une console reliée à un terminal Super 3G (prototype encore non miniaturisé d'un futur terminal mobile), au milieu des baies représentant le coeur du réseau et à l'autre bout, un terminal de même nature que le premier, adossé à une console pilotée par une imbattable hôtesse qui mit au tapis tous ceux qui osaient l'affronter. Résultat: les graphismes sont aussi fluides que lorsque les données sont transmises par une liaison filaire, et les commandes répercutées en temps réel. Captées par une caméra, les images vidéo de chacun des joueurs étaient diffusées sous les yeux de son adversaire, véhiculées de la même façon. L'opérateur a ainsi prouvé qu'à l'avenir, les loisirs multimédia virtuels en tout lieu, par téléphone portable interposé, n'auront plus rien à envier au divertissement cybernétique à domicile.
NTT Docomo, pionnier du secteur des télécommunications mobiles dès l'origine, prépare déjà depuis plusieurs années le passage à la « Super 3G », une norme qui doit succéder à la troisième génération (3G), à l'horizon 2010 au Japon. Pour mesurer les performances de ladite « Super 3G », la filiale du géant NTT réalise des tests de plus en plus poussés, en laboratoire et sur le terrain. Le but est d'atteindre sur réseau cellulaire des débits dignes d'une liaison fixe par fibre optique (100 mégabits par seconde en réception).
Docomo, associé à des équipementiers dont ses compatriotes NEC et Fujitsu, s'active dans ce domaine pour fiabiliser ses avancées, espérant ainsi imposer ses technologies à l'échelle planétaire en les soumettant, éprouvées, aux instances internationales de définitions des spécifications « Super 3G LTE ». Le numéro un nippon avait été le premier opérateur au monde à lancer une offre mobile de troisième génération (norme W-CDMA) en octobre 2001, puis à activer les modes HSDPA/HSUPA qui offrent des débits supérieurs. A ce jour, quelque 85% de ses 53,6 millions de clients japonais ont déjà opté pour ses offres 3G (FOMA), une proportion sans commune mesure avec celle, étriquée, revendiquée par les opérateurs occidentaux, ces derniers peinant davantage à convaincre le grand public de l'intérêt de la 3G et de l'internet mobile.
Du côté des services, NTT Docomo mettait entre autres l'accent sur l'utilisation du mobile comme terminal pour les programmes de télésanté, un champ qui va grossir au Japon du fait du vieillissement rapide de la population, de l'opportunisme des entreprises plus ou moins liées au secteur sanitaire et des incitations de l'Etat pour faire en sorte que les citoyens restent en pleine forme le plus longtemps possible (réduction des dépenses de couverture sociale oblige).
Docomo s'est associé à Omron et Tanita, deux des principaux fabricants nippons de pèse-personne, tensiomètres, cardiomètres, thermomètres et autres appareils. Ensemble, ils proposent un service de suivi personnalisé de condition physique.
Concrètement, au moment ou une personne se pèse ou prend sa tension, le téléphone portable, qui sert de télécommande pour chaque appareil, reçoit les données mesurées et les transmet vers un service i-mode dédié. L'utilisateur conserve ainsi un historique de sa masse corporelle (avec détails sur la proportion de graisse notamment), graphiques à l'appui. Les téléphones mobiles compatibles (un Fujitsu pour les seniors et un Sharp pour les jeunes) intègrent pour leur part un podomètre, un des ustensiles de poche les plus prisés actuellement au Japon.
Le nouveau service de NTT Docomo est l'équivalent sur mobile de celui lancé il y a peu sur réseau fixe par sa compagnie soeur NTT Higashi Nihon sur infrastructure fixe, les appareils transmettant alors leurs données au PC domestique par liaison sans fil de type Wi-Fi. A l'avenir, les appareils de mesure intégreront un module de lecture RFID capable de reconnaître chacun via son téléphone portable intégrant une puce sans contact et, de ce fait, à même de se configurer comme il se doit. Les résultats seront aussi transmis par radiofréquences au téléphone, ce qui est plus fiable et plus rapide que l'infrarouge. Des salles de sport ont d'ailleurs déjà adopté un tel système pour permettre à leurs fidèles clients de paramétrer rapidement les machines et de conserver un historique de leurs exercices et performances.
L'un des principaux rivaux de NTT Docomo, KDDI, mettait de son côté en avant sa nouvelle offre de films, séries TV, animations et autres vidéos à télécharger pour les regarder sur son mobile. Il faisait aussi la promotion de sa toute nouvelle banque mobile, « Jibun Ginko », un véritable organisme financier créé avec la méga-banque Tokyo Mitsubishi UFJ et qui offre sur portable presque tout l'éventail des services bancaires habituels. Avantages: il est par exemple possible de recharger un porte-monnaie électronique stocké sur la puce sans contact de son mobile directement par prélèvement sur le compte en ligne, ou bien encore de régler des achats dans les commerces virtuels pour téléphone portable sans communiquer de numéro de carte de crédit.
KDDI présentait par ailleurs une gamme de terminaux spécialement habillés aux couleurs d'entreprises (compagnie de chemin de fer, groupe de BTP) et chargés de logiciels spécifiques. Ces appareils sont destinés à des flottes professionnelles, une clientèle non négligeable aux besoins très particuliers que se disputent les opérateurs après avoir quasiment épuisé le potentiel des nouveaux souscripteurs particuliers.
Autre nouveauté bien dans l'air « anzen, anshin » (sécurité, tranquillité) du moment, des bornes publiques sans fil d'appel au secours, alimentées par énergie solaire et batterie, destinées à être installées dans les jardins municipaux, les quartiers résidentiels, à proximité des écoles, et autres lieux fréquentés par des enfants. On appuie sur le bouton rouge et immédiatement, les téléphones portables de personnes préalablement enregistrées sont appelés. L'enfant (ou l'adulte) en détresse entre ainsi en contact avec un « ange-gardien », généralement un bénévole, membre d'une association de quartier qui entend que la paix règne alentour. Il faut dire qu'au Japon, il n'est pas rare de voir dans les rues et transports publics des bambins de six ou sept ans, seuls, en uniforme, allant ou revenant de l'école, sac sur le dos, carte de train et gourde de thé vert pendues au cou. Les risques d'agression ne sont pas importants, mais sait-on jamais. « Kodomo wo mamoro » (protégeons les enfants), dit la publicité pour ce type d'appareil.
Publicité justement, il en était aussi question au Wireless Japan 2008, puisque le téléphone mobile est devenu au Japon un véritable aspirateur à bons de réduction et autres promotions. La firme Sofia propose désormais aux annonceurs de dynamiser leur PLV (publicité sur le lieu de vente) en installant dans les rayons des écrans à cristaux liquides (LCD) de 7 pouces de diagonale alimentés en vidéos par un serveur distant via une liaison sans fil. Les chalands intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires en approchant leur téléphone portable à puce sans contact dudit écran, lequel est équipé d'un module de lecture/écriture RFID. Avantage pour les annonceurs et commerçants: « il est possible de connaître le nombre de personnes que la publicité a réellement intéressées », dixit un représentant de Sofia.
Dans un registre différent, le groupe d'électronique japonais NEC a mis au point un casque de protection pour secouriste, travailleur de chantier ou ouvrier d'usine, qui n'est pas seulement conçu pour absorber les chocs mais sert aussi de vigie, d'assistant et de moyen de communication. Blanc, de forme conventionnelle, ce casque laisse apparaître sous sa visière une série de boutons de commande pour contrôler les différentes fonctions. Selon NEC, il concentre à lui seul, et sans dangereux câbles apparents, l'artillerie dont sont souvent chargés les Nippons oeuvrant dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, dans les services de secours ou dans les usines de l'industrie lourde, à savoir: le téléphone portable, le récepteur de localisation par satellite (GPS), les batteries, l'appareil photo, la lampe-torche, les signaux lumineux, etc.
Dans le détail, ce casque comporte un module de télécommunications par réseau cellulaire de troisième génération et Wi-Fi, un micro-oreillette associé, un module GPS, un capteur frontal photo/vidéo, une alarme, un détecteur d'anomalie (perte du casque consécutive à une chute par exemple), des diodes lumineuses de signalisation et une puce d'identification par radiofréquences (RFID). « Ce casque n'est pas seulement conçu pour protéger les travailleurs, il est aussi pensé pour améliorer leur cadre de travail en leur facilitant la tâche et en leur permettant d'agir plus sûrement », explique un ingénieur de NEC, démonstration à l'appui.
Un ouvrier sur un chantier peut par exemple interroger un ingénieur-expert à distance en dialoguant avec lui par téléphone tout en lui montrant en vidéo la situation telle qu'elle est sur le terrain, le tout via son casque caméra/module de télécommunication/GPS. Même chose lors des opérations de secours dans le cas des pompiers. La puce d'identification transforme aussi le casque en carte d'identité professionnelle, de sorte que les travailleurs peuvent franchir des accès contrôlés les bras chargés de matériel sans devoir se contorsionner dangereusement pour présenter leur badge. Ce casque, baptisé Umet, a été conçu avec Tanizawa, une firme nippone spécialisée dans les équipements de protection. Il est actuellement testé in-situ par des entreprises japonaises de divers secteurs.
Autre casque troublant: un modèle expérimental bluffant également signé NTT DoCoMo. Pas franchement discret, loin d'être commercialisable, il n'en augure pas moins de futures interfaces de dialogue entre l'homme et son attirail électronique portable. Cet engin exploite en effet le mouvement des yeux pour piloter un baladeur audio (ou un téléphone ayant cette fonction) et ce, en décelant au niveau des tempes les variations provoquées par l'activité musculaire nécessaire pour diriger ses yeux rapidement à gauche ou à droite avant de les ramener au centre. Ce mouvement furtif peut, par exemple, permettre de commander le passage d'une plage sonore à l'autre. Un coup d'oeil vers le haut pour augmenter le volume, vers le bas pour le réduire, plusieurs autres instructions sont possibles. Cela rappelle le « Komekami Switch » conçu par un chercheur de l'université d'Osaka et qui permet de contrôler les fonctions de base d'un iPod en clignant des yeux ou bien encore en remuant les mâchoires.
Dans un domaine voisin, une petite firme japonaise profite de la torpeur estivale pour vanter son produit-phare, un nouveau casque audio qui emploie les os comme mode de transmission des sons mélodieux et qui peut s'utiliser au bord de la piscine ou dans un bain rafraîchissant. Les deux extrémités de ce casque étanche baptisé « Audio Bone Aqua » viennent se plaquer devant les oreilles. Elles transmettent directement au crâne les vibrations générées par la musique. Ces signaux se propagent ainsi jusqu'à l'oreille interne, sans que le tympan n'entre en action. La perception est un peu différente de celle ressentie via des écouteurs traditionnels, mais la restitution fidèle aux tonalités originales, surtout si ledit casque est utilisé avec le petit boîtier amplificateur de vibrations qui élargit aussi le spectre de fréquences restituées, des technologies brevetées par la société Morito, créatrice de ce produit. « Avec cette technique, on ne risque pas de s'éclater les tympans », assure un directeur de Morito, ajoutant que le conduit auditif n'étant pas bouché par les écouteurs, « les sons extérieurs restent perceptibles ». Cet argument est certes rédhibitoire pour les vrais mélomanes audiophiles, mais il est indéniable qu'entendre les bruits environnants dans les lieux publics, tout en profitant d'une ambiance musicale, limite notablement les dangers.
La transmission osseuse n'est toutefois pas une nouveauté pour les Japonais puisqu'il existe depuis longtemps des téléphones portables pour les seniors qui exploitent ce mode de transduction sonore, lequel permet à des personnes un peu dures d'oreille (à cause de déficiences touchant le canal auditif ou le tympan) de néanmoins pouvoir utiliser un téléphone portable. Morito espère vendre 30.000 Audio Bone Aqua par an au Japon, un pays où les modèles de casque audio de toutes les formes, pour tous les usages (extérieur, domicile, studio), toutes les tessitures sonores, à tous les prix et émanant de dizaines de firmes, se comptent par centaines.