Pour Olivier Roussat, directeur général de Bouygues Telecom, il est clair que l'arrivée de Free dans l'univers de la téléphonie mobile conduirait à une destruction de valeur préjudiciable pour tous, à commencer par les effectifs des trois opérateurs actuellement en place sur le marché français. Dans une interview accordée au Figaro, il indique que Bouygues Telecom a d'ores et déjà gelé les embauches depuis le lancement de l'appel à candidatures pour la 4e licence 3G française, à laquelle Iliad / Free est le seul candidat.
« Bouygues Telecom, qui compte 8 650 salariés, ne recrute plus. Nous étions habitués à recruter beaucoup de jeunes diplômés qui font leurs classes chez nous et trouvent ainsi une sorte de tremplin à leur carrière. C'est terminé. Bouygues Telecom est obligé de se préparer à l'arrivée de Free en réduisant ses coûts fixes », affirme Olivier Roussat. Alors que l'Arcep doit rendre son verdict sur le processus d'attribution de la 4e licence 3G dans le courant du mois de décembre, cette déclaration n'a rien de fortuit.
Fin 2008, Martin Bouygues était déjà monté au créneau. Virulent opposant à cette 4e licence, il avait alors indiqué que la guerre des prix causée par l'arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile était susceptible de provoquer « de 10 000 à 30 000 pertes d'emplois chez les opérateurs ». De façon plus ou moins déclarée, les trois grands acteurs du secteur redoutent notamment que sous l'impulsion de Xavier Niel, Free tente de reproduire sur le marché du mobile ce qui a fait le succès de sa formule ADSL : un forfait tout en un, sans surprises, à prix cassé.
Challenger d'Orange et de SFR, Bouygues ne devrait justement pas sa progression sur le marché français à son seul positionnement tarifaire, légèrement plus compétitif que celui de ses concurrents. « Nous ne nous sommes jamais positionnés par rapport à nos concurrents mais en fonction des seules attentes de nos clients : nous sommes arrivés sur le marché du fixe avec une proposition différente, ideo, qui a bousculé les équilibres d'un marché figé depuis cinq ans », défend-il. Dans la lignée d'Ideo, il annonce d'ailleurs le lancement, pour 2010, d'une offre de voix sur IP en 3G, un usage jusqu'ici proscrit par tous les opérateurs français.
Une stratégie de rupture avec l'existant sur laquelle Iliad pourrait bien aussi compter. Associée à une politique tarifaire agressive, elle ferait sans doute des ravages. En admettant qu'Iliad surmonte les nombreux obstacles qui le séparent encore du lancement d'une offre commerciale, à commencer par un éventuel rejet de la candidature déposée auprès de l'Arcep.