iPad : les technophiles déçus, les analystes ravis

Alexandre Habian
Publié le 28 janvier 2010 à 17h40
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Après des années de rumeurs à son sujet, Apple a officialisé hier soir l'existence de sa nouvelle tablette tactile, l'iPad, sept ans après la sortie du Newton, un assistant personnel numérique qui était déjà doté d'un écran tactile.

Commentée en direct par de nombreux webzines (Engadget, Gizmodo) et médias français (LCI, Le Figaro, Le Point), la conférence de presse annonçant le produit a provoqué un véritable pic de connexion sur leurs sites Internet respectifs. Gizmodo a cessé de fonctionner pendant de longues minutes, Engadget affichait quant à lui une version mobile de son site tandis que le réseau de microblogging Twitter a été fortement ralenti les premières minutes du « keynote » de Steve Jobs, le patron d'Apple.

iPad : les stars du web adorent, les technophiles ont un avis plus mitigé
En terme d'audience, l'actualité annonçant sur Mobinaute la sortie de l'iPad est sans conteste la plus lue de la semaine, Le Figaro revendiquant pour sa part près de 30 000 visualisations en moins de 18 heures de sa vidéo présentant le produit. Et malgré l'engouement suscité par l'iPad auprès quelques stars du web dont Pierre Chappaz, fondateur de Kelkoo, qui ne tarit pas d'éloge sur le produit sur son compte Twitter, ou Jean-Louis Gassée, un ancien dirigeant d'Apple et fondateur du système beOS, qui qualifie le produit d' « aussi révolutionnaire que l'iPhone », bon nombre de technophiles sont plutôt déçus de cette tablette.

En témoigne le nombre important de remarques sarcastiques à son sujet sur Facebook ou Twitter, les uns lui reprochant un nom trop sommaire (« pad » signifie « serviette hygiénique » en Anglais), les autres trouvant qu'il n'est pas assez « geek » pour les séduire. En d'autres termes, si Apple a réussi à réunir une grande partie des technophiles autour de son iPhone, la firme à la Pomme a plus de difficultés à en faire de même trois ans après l'annonce de son premier téléphone mobile.

Car il faut avouer que l'iPad, pour ceux qui ont déjà manipulé un iPhone, manque de nombreuses fonctionnalités. A commencer par une véritable page d'accueil, Apple s'étant contenté ici de garder l'interface de l'iPhone, avec son système d'icônes qui s'affichent en géant sur l'appareil. Côté technique, l'iPad ne possède ni appareil photo numérique (Stéphane Richard, le numéro de France Telecom s'est effectivement trompé en parlant de visio. Lire Orange devrait commercialiser la tablette d'Apple), ni prise USB, ni batterie amovible, ni clavier intégré, ni autres boutons (malgré des fonctions de jeux !) que le bouton « Home » (le même que sur l'iPhone).

Et la puce GPS est réservée au seul modèle d'iPad équipé de 3G, et donc facturé plus cher. S'ajoute à cela un écran LED, certes confortable, de 9,7 pouces, qui rebutera sans doute les mobinautes intéressés par le produit pour son confort de lecture de livres ou de magazines. Les liseuses d'Amazon (Kindle) ou de Sony (Reader) ne devraient donc pas être directement concurrencées par l'iPad, ce dernier n'étant pas destiné aux lecteurs intensifs. Enfin, l' « iPad 3G » n'intègre non pas un emplacement SIM traditionnel mais un emplacement « Micro SIM ».


« Une vidéo (parodie) mettant en avant les fonctions manquantes de l'iPad »

Au niveau logiciel, l'iPad est rétro compatible avec les applications déjà développées sur l'iPhone ce qui est un très bon point, permettant d'utiliser les 140 000 applications déjà sur l'App Store, mais ne gère ni le multitâche ni les animations Flash (dans son navigateur web) et ne permet pas non plus d'interagir avec un iPhone ou un iPod Touch. Il aurait pourtant paru logique que les 70 millions de terminaux tactiles d'Apple puissent interagir avec l'iPad, notamment pour partager emails ou connexion mobile. Et les plus suspicieux des mobinautes auront également remarqué que son logiciel intégré baptisé « iBooks » n'a rien de révolutionnaire, n'étant qu'une copie de ce que proposent déjà Stanza (propriété d'Amazon) et Classics (Delicious Library). Même la tablette tactile d'Orange, le Tabbee, possédait déjà une interface de consultation de livres identique à iBooks.

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« Interface de iBooks sur l'iPad / Interface de consultation de BD sur le Tabbee

Bien évidemment, l'iPad satisfait également ces mêmes technophiles notamment grâce à son autonomie impressionnante de 10 heures en surfant sur le web ou en visionnant des vidéos. Et aussi et surtout grâce à sa puce véloce « Apple A4 » cadencée à 1 Ghz, concurrençant directement la solution Tegra de Nvidia ou Snapdragon de Qualcomm. En attendant son intégration sur la prochaine génération d'iPhone.

Mais cela suffira-t-il pour leur faire oublier le prix du produit qui reste assez élevé, surtout en choisissant une solution 3G, qui nécessite en plus abonnement data mobile illimité de 30 dollars par mois (sans engagement, iPad non simlocké) ? Car l'iPad coûte en effet 500 dollars en version 16 Go, 600 dollars en version 32 Go et 700 dollars en version 64 Go. Il faut ajouter 130 dollars de plus par modèle pour bénéficier de la 3G. Résultat : le modèle d'iPad le plus onéreux est facturé (avec la 3G et 64 Go d'espace de stockage) 830 dollars. Et pour peu que les mobinautes souhaitent acquérir en option des accessoires supplémentaires, la facture peut rapidement grimper : 70 dollars pour le dock clavier, 40 dollars pour la housse béquille, 30 dollars l'adaptateur VGA ou 30 dollars pour le kit caméra.

Les analystes qualifient l'iPad de prometteur
Les analystes semblent plus optimistes sur le succès commercial de l'iPad que les technophiles. Pour Piper Jaffray, ce sont entre 3 et 4 millions de tablettes d'Apple qui devraient être écoulées cette année, contre 8 millions d'unités en 2011. Cela permettrait de générer pas moins de 4,6 milliards de dollars de chiffres d'affaires en 2011.

Goldman Sachs est même encore plus optimiste, tablant sur 6 millions d'unités vendues dès cette année, et des revenus supplémentaires qui devraient avoisiner les 3,9 milliards de dollars. « iPad n'est pas pour tout le monde, et la première génération de produits devrait être assurément critiquée au vu du buzz qui a suivi son annonce. Selon nous, l'iPad est intelligent et dédié aux utilisateurs qui manipulent beaucoup de contenus numériques, le cœur de cible des clients d'Apple. Mais iPad reste un produit hybride, mariant certains avantages des smartphones et des ordinateurs portables. Nous nous attendons à ce que le marché de l'iPad soit petit pour commencer, avec un développement dans le domaine du jeu et de l'éducation qui pourrait lui permettre d'accélérer sa démocratisation auprès du grand public », précise quant à eux des analystes de J.P. Morgan.

A noter que si le cours de l'action Apple cotée au Nasdaq a gagné 1% suite à l'annonce de l'iPad hier, elle dégringole aujourd'hui de près de 4%.
Alexandre Habian
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