Encore une histoire d'agneaux à saigner ?
Eh voui ma bonne dame, on dirait bien qu'Electronic Arts a décidé de nous refaire le coup du grand fou qui fait l'andouille avec sa bague. Bon, depuis l'adaptation ciné du Seigneur des Anneaux, tout le monde doit connaître l'histoire de Frodon et de ses petits amis les Nazgûls, mais au cas où et comme je suis magnanime, je vais commencer le test du Seigneur Des Anneaux : Bataille Pour La Terre Du Milieu 2 (que nous nommerons SdABplTdM 2 pour faire simple) par quelques rappels « scénaristiques »... Il était une fois... Ah oui, rappels ou pas, une bonne histoire doit débuter par « il était une fois », c'est un principe de base. Je disais donc : il était une fois, un vilain méchant qui avait décidé de contrôler la Terre du Milieu. La menace qu'il faisait peser poussa Elfes et Humains à former une alliance. À la suite d'une énorme bataille, l'anneau unique, source de la puissance du vilain méchant que pour des raisons pratiques nous allons maintenant appeler Sauron, a été perdu et durant des siècles, la Terre du Milieu vécut paisiblement.Les Nazgûls sont de retour et Sauron n'est pas loin derrière : il y a quelque chose de pourri en Terre du Milieu !
Ces temps de quiétude sont hélas révolus, car l'anneau unique a été retrouvé et Sauron qui l'a appris est à sa recherche. Le sinistre personnage s'apprête à revenir en Terre du Milieu et mobilise déjà ses troupes. Dans sa quête de pouvoir, il a réussi à pervertir de nombreuses races du continent et même certains des personnages les plus puissants comme Saroumane le Magicien ou Theoden, Roi des Rohirrims. De sombres heures sont à venir pour les habitants de la Terre du Milieu, mais pour être tout à fait honnête, ça tombe plutôt bien pour Electronic Arts. L'éditeur a effectivement utilisé ce canevas guerrier pour réaliser un jeu de stratégie temps réel (RTS). Les forces du bien (Elfes, Humains...) étaient alors opposées aux troupes du Mal (Orques, Gobelins...) et si le premier SdABplTdM (pas beaucoup plus simple cet acronyme finalement) reprenait à la lettre les événements des films, cette suite est obligée de s'en éloigner davantage histoire d'introduire un peu de variété.
Du côté du Mal, cela commence avec les Nazgûls, mais, plus variée au niveau des personnages principaux, cette campagne nous donnera également le contrôle des Gobelins, des pirates, de l'Isengard ou du Mordor. Dans un cas comme dans l'autre, l'ensemble reste toutefois très scénarisé. Chaque mission débute et se termine par une petite cinématique et s'il n'est pas ici question d'extraits des films, les voix de personnages comme Galadriel ou Elrond correspondent à celles que nous connaissons déjà. Le déroulement d'une mission est grosso modo toujours le même : le joueur débarque avec des troupes sur un coin de carte, il doit établir une base ou fortifier des structures existantes et attaquer / repousser l'ennemi. À la manière de ce que proposait le premier volet, tout est cependant très simplifié : la gestion des ressources ou plutôt de la ressource en est un bon exemple. Il suffit de construire selon la race des fermes ou des mines pour que les fonds augmentent. Seule petite astuce, les centres de production ont un rayon d'action qui détermine leur productivité.
Terres enneigées du Nord, plages de l'Ouest ou prairies de la Comtée : les paysages sont variés
L'Oeil était sur la tour et regardait Pippin
Les fonds ainsi récupérés permettent au joueur d'enrôler de nouvelles forces bien sûr, mais aussi et surtout de bâtir davantage de bâtiments et c'est là que le SdABplTdM 2 se démarque de son prédécesseur. En effet, les constructions ne pouvaient dans le premier jeu être réalisées que sur des points spécifiques de la carte. Les développeurs se sont maintenant affranchis de cette contrainte et pourvu que le terrain s'y prête, il sera possible de construire n'importe où. La construction de la base est beaucoup plus libre et c'est nettement plus agréable d'autant que cela ne nuit pas du tout à l'aspect grand public : Electronic Arts a intégré trois missions d'initiation très bien conçues pour passer en revue les principales fonctions du jeu. Au rayon des nouveautés de mission, on notera également l'apparition d'un système de formations pour, par exemple, placer ses cavaliers en ligne ou réaliser avec les lanciers de véritables blocs hérissés de pointes.Nous touchons d'ailleurs ici au gros problème du jeu : son manque évident de stratégie ce qui est tout de même un comble pour un RTS. C'est particulièrement criant durant les phases navales du fait de la petitesse des étendues maritimes, mais cela se retrouve en réalité dans tous les domaines et quel que soit le niveau de difficulté choisi (trois sont disponibles). C'est ainsi qu'il suffit le plus souvent de marier cavalerie lourde et archers pour mettre en déroute n'importe quelle force ennemie. En outre, l'intelligence artificielle n'est pas des plus évoluées et le fait de pouvoir construire librement sa base n'arrange pas les choses. Sans doute pas au point, l'IA se concentre effectivement presque toujours sur les bâtiments de production ou la forteresse. Il suffit alors d'étaler un minimum ses structures pour contraindre l'IA à faire des kilomètres sous le feu de nos tours / archers. De la même manière, on se rend vite compte que l'IA emprunte systématiquement la même route lors de ses attaques.
Malgré la présence d'unités maritimes et de quelques nouveautés, la stratégie est une fois encore bien limitée
C'est un peu dommage, car cela gâche le soin tout particulier apporté à la reconstitution du monde de J.R.R. Tolkien. Cela gâche également le côté spectaculaire assez réussi des combats. Il faut à ce titre voir les effets des pouvoirs (ces sorts débloqués en accumulant les points de réussite) comme inondation ou tremblement de terre. Cela gâche enfin la relative variété du mode solo. En effet et en plus des deux campagnes précédemment citées, les développeurs ont intégré deux autres modes de jeu. Classique, l'escarmouche permet de choisir une carte, un maximum de huit factions et de lancer une bataille qui ne permet hélas que le chacun-pour-soi ou le jeu par équipe. Le troisième mode de jeu est cependant bien plus décevant. Il reprend en quelque sorte le fonctionnement d'un jeu comme Rome Total War, le talent en moins. Il s'agit d'une nouveauté par rapport au premier volet, mais franchement plutôt que de proposer un tel ratage, Electronic Arts aurait pu s'abstenir.
Si c'Elrond, c'est pas l'carré ?
Si les phases d'attaque sont tout à fait convenables avec simplement les mêmes limitations stratégiques que les missions de campagne, le problème de ce mode baptisé Guerre de l'Anneau vient de la phase gestion. Tout y est trop limité, il n'y a pas le moindre aspect diplomatie avec les autres factions, l'économie y est réduite à sa plus simple expression et les possibilités de construction sont tout simplement dérisoires... À vouloir faire trop simple, trop « accessible », Electronic Arts a retiré tout ce qui pouvait rendre un tel mode de jeu intéressant et ce n'est pas la possibilité de capturer un Gollum qui traîne parfois à l'écran qui changera quoi que ce soit : cela permet de capturer l'anneau unique et ainsi d'invoquer un super-héros qui réduit encore l'aspect stratégique des choses. Ce pitoyable mode de jeu semble en plus limité à des affrontements de deux équipes maximum et même s'il est jouable à plusieurs humains, on oubliera rapidement ce ratage absolu.
Entre la taille de certaines unités et les effets des pouvoirs spéciaux, les combats sont rapidement spectaculaires
Le multijoueur ne s'arrête heureusement pas à cette seule Guerre de l'Anneau et les classiques cartes escarmouches sont là aussi disponibles. Notons au passage la possibilité certes accessoire, mais bien sympathique, de créer son propre héros. Celui-ci sera alors utilisé durant des affrontements auxquels on reprochera encore le relatif manque de stratégie, mais qui prennent malgré tout une dimension plus intéressante qu'en solo. Disons qu'en simple joueur, c'est l'aspect « histoire » qui permet de compenser le manque de stratégie alors qu'en réseau, les limitations de l'intelligence artificielle posent évidemment moins problème et on se prend alors davantage au jeu. Les cartes apparaissent finalement plus sympas avec d'intéressantes possibilités d'embuscade et souvent plusieurs chemins pour parvenir aux camps adverses. On regrettera malgré tout le faible nombre de cartes disponibles et leur taille souvent trop réduite. Nous l'avons déjà dit, mais on regrettera aussi que seuls les modes chacun-pour-soi et par équipe soient disponibles.
Enfin, il faut également signaler quelques problèmes « techniques » qui viennent à leur tour saper un peu l'aspect stratégie. C'est ainsi qu'en 1 024 x 768, il faut faire avec une interface énorme. Compte tenu des libertés nouvelles accordées aux joueurs par rapport au premier volet, on pouvait s'attendre à ce que les développeurs améliorent ce point, mais il n'en est rien. Dans le même ordre idée, on critiquera les combats souvent trop confus, en particulier sur les cartes les plus chargées. Ces quelques soucis techniques ne doivent cependant pas nous faire oublier que le SdABplTdM 2 est un très joli jeu de stratégie. Les unités sont parfois très grosses, toujours bien dessinées et les plus grosses d'entre elles (balrogs...) sont impressionnantes. La bande-son ne souffre aucune critique et le jeu tourne plutôt bien (à condition de rester modeste en résolution). Une dernière remarque avant de conclure sera pour critiquer EA qui ne semble pas faire beaucoup de cas des écrans 16:10 pourtant à la mode :-(
Conclusion
Le total de seize missions qu'elles proposent se termine en à peine dix heures au niveau le plus élevé et le défi stratégique devrait pouvoir être relevé par un enfant de dix ans. L'intelligence artificielle n'a pas fait le moindre progrès depuis le premier volet et, du coup, elle est vite complètement débordée par des assauts un tant soit peu variés. De la même manière, la nouvelle liberté de construction rend les attaques de l'IA complètement caduques et en dispersant un tout petit peu ses constructions on arrive le plus souvent à la mettre en déroute. C'est un petit peu dommage, car les cartes sont intéressantes, la scénarisation plutôt réussie (même si de nombreuses libertés ont été prises) et les combats vraiment sympas.
Plus que jamais, le Seigneur Des Anneaux : Bataille Pour La Terre Du Milieu doit être perçu comme un jeu de stratégie très simple d'accès. Sur la boîte du jeu, Electronic Arts insiste sur l'aspect spectaculaire de batailles vraiment très agréables à mener, mais à peu près aussi stratégiques que les guerres de petits soldats de mon enfance. Un jeu qui repose énormément sur l'univers reproduit, mais qui a au moins le mérite de bien le faire... si seulement Electronic Arts avait tenté de renouveler un peu les choses depuis le premier volet.
N'oubliez pas de jeter un oeil à nos trois vidéos exclusives pour voir une des missions d'initiation, quelques minutes de combat maritime et l'assaut d'une place fortifiée.
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