L'application iAvocat, lancée par un entrepreneur lyonnais, ne laisse pas de marbre les passionnées du monde juridique, car l'intelligence artificielle lui offre de vraies capacités d'avocat, en se basant notamment sur un demi-siècle de décisions de justice.
Avec son application iAvocat, Isaam Reghi fait polémique. L'entrepreneur de 35 ans promet, grâce à elle, de démocratiser l'accès au droit. La machine, nourrie de dizaines d'années de décisions de justice, propose des stratégies juridiques élaborées, proches de celles d'un avocat bien humain. Et c'est tout le problème : les professionnels du secteur ne voient pas cette technologie d'un bon œil. En réponse aux critiques, le Lyonnais l'assure : pour les utilisateurs, l'IA ne servira que de pont vers des avocats compétents.
Une application qui a avalé des millions de données et décisions de justice
Issam Reghi veut « faciliter l'accès au droit pour tous ». L'IA derrière cette application aurait assimilé pas moins de 50 ans de décisions judiciaires, mais aussi les programmes des écoles de la magistrature et celle du barreau. L'application est plutôt vorace donc, puisque cela représente l'équivalent de 11 millions de données.
Selon Issam, iAvocat est capable de « proposer une stratégie digne d'un avocat aguerri ». L'application, disponible depuis le 1er janvier 2024, n'est en revanche pas gratuite. Pour le moment, elle fonctionne sur un modèle annuel unique à 69 euros. Mais une offre mensuelle à 9 euros devrait bientôt être proposée aux utilisateurs.
Les critiques n'ont en tout cas pas tardé à éclater sur les réseaux sociaux. Certains expriment leur scepticisme avec ironie, se demandant par exemple comment une IA pourrait plaider devant une cour d'assises. Ce à quoi Issam Reghi a réagi en annonçant à nos confrères du Progrès le lancement d'une plateforme de mise en relation. Elle devrait avoir pour but, grâce à l'IA, d'assurer une collaboration qui ne ferait que des heureux, en redirigeant les clients vers de vrais avocats. Mais la question fondamentale demeure : l'essor de l'IA dans le domaine juridique suscite-t-il des inquiétudes légitimes ou offre-t-il de nouvelles opportunités ?
Une IA qui ne se destine pas à remplacer l'avocat humain, mais qui pourra l'aider dans bien des domaines
Le débat sur l'impact de l'IA dans le secteur juridique s'intensifie, d'autant plus que GPT-4 a déjà prouvé qu'il pouvait être un très bon avocat. Certains juristes soulignent que l'IA, bien qu'impressionnante, reste néanmoins un outil analytique et non créatif. Un avocat fait de chair et de sang détient une capacité humaine à concevoir des stratégies disruptives.
Maître Jean-Bernard Prouvez, avocat au barreau de Lyon, partage la perspective selon laquelle l'IA, en tant qu'outil analytique, ne remplacera jamais le rôle essentiel de l'humain, notamment dans l'exercice de la plaidoirie. « L'idée est d'en faire une aide, notamment à la rédaction », indique-t-il.
Foudeil Benazout a, lui, participé à l'évaluation d'iAvocat avant son lancement. Cet autre avocat lyonnais souligne l'importance de mettre l'IA en conformité avec la loi et la déontologie. Ce qui nous amène au principe de la confidentialité, un concept encore un peu étranger pour les intelligences artificielles, qui empilent les données et les informations. « Mais il est pertinent de prendre le taureau par les cornes, travailler avec la machine et pas contre », ajoute le juriste. La coexistence harmonieuse entre les compétences humaines et l'intelligence artificielle semble aujourd'hui être la clé pour tirer pleinement parti des avantages de la technologie tout en respectant les valeurs fondamentales du droit, et en laissant le progrès faire son oeuvre.
Source : Le Progrès