La Freebox Revolution est certainement la plus emblématique de toutes, non seulement pour sa longévité, mais aussi pour ses fonctionnalités © weweje / Wikimedia
La Freebox Revolution est certainement la plus emblématique de toutes, non seulement pour sa longévité, mais aussi pour ses fonctionnalités © weweje / Wikimedia

La société de Xavier Niel est plutôt singulière sur le marché français des télécoms, comme le prouve le dernier lancement de la Freebox Ultra. Une tendance à se démarquer que l'on retrouve tout particulièrement sous nos téléviseurs.

Au lendemain de la commercialisation de la Freebox Ultra, ouvrons une parenthèse nostalgique. Depuis le début du siècle, l'opérateur qui a « tout compris » met en scène un spectacle dont la vedette principale n'est autre que ses box Internet. De simple objet high-tech à cacher derrière l'ordinateur familial, le modem est devenu le centre du divertissement et de la connectivité chez Free, une caractéristique que l'on retrouve aujourd'hui chez la plupart de ses concurrents.

Mais, aujourd'hui encore, la Freebox a une longueur d'avance, et pour cause : l'innovation est dans son ADN depuis sa toute première version.

Une première mondiale made in France

Toujours plus nombreux sont ceux qui n'ont jamais connu le monde des modems 56k bruyants, des décodeurs TV de TPS ou Canal+, et des factures de France Télécom que l'on attend avec appréhension. Au cours des années 2000, une petite évolution s'est produite dans les télécoms, célébrée par Wanadoo lors du lancement de sa première Livebox. Un appareil qui s'occupe de tout : des communications téléphoniques, de la connexion à Internet et même… de la télévision.

Mais cette innovation trouve son origine en 2001, dans les bureaux d’un jeune fournisseur d’accès Internet nommé Free. Les dirigeants et ingénieurs de l’entreprise imaginent un appareil qui fournirait tous ces services, simultanément, via l’ADSL. Il s’agit là d’une première mondiale, que Xavier Niel et son équipe appelleront « box ». Et même plus précisément : Freebox.

La Freebox, première du nom, dans toute sa splendeur ! © Free
La Freebox, première du nom, dans toute sa splendeur ! © Free

C'est à la fin de l'année 2002, avec le lancement d'une nouvelle offre ADSL plus attractive que celles de la concurrence, que Free sort la première mouture de son appareil. Cependant, à l'image du service fourni par Free, la Freebox V1 n'était pas tout à fait au point, notamment à cause d'une alimentation ayant une fâcheuse tendance à griller. Ce problème a été résolu quelques mois plus tard avec la version suivante qui a, elle aussi, connu une carrière assez courte.

En effet, Free a constamment cherché à améliorer sa formule. Dès février 2004, la V3 propose une connectivité Wi-Fi, mais aussi un design radicalement nouveau. L'appareil se devait d'être un élément central dans le salon des nombreux abonnés de l'opérateur, on lui donne donc des formes plus incurvées et esthétiques. Les différentes itérations de la V4 suivront la même formule, mais apporteront l'ADSL 2+, tout en expérimentant l'accès à certaines chaînes de télévision en HD.

La Freebox V4 vue de face © Wikimedia

Une révolution à l'horizon

La troisième génération de Freebox marque un tournant important. Alors que les versions précédentes offraient une solution tout-en-un, on se retrouve désormais avec deux boîtiers : l'un gérant le réseau, l'autre le multimédia. Cette nouvelle configuration accompagne la généralisation de la HD côté TV avec la Freebox HD, ainsi que l'arrivée de la fibre en 2008 avec la Freebox Ô.

Free intègre même un disque dur de 40 Go pour enregistrer des programmes TV, même à distance, ainsi qu'une nouvelle télécommande qui permet à l'opérateur de proposer un service de jeux vidéo. Cette génération aura une longue carrière, puisqu'elle sera encore utilisée en 2013 avec la Freebox Crystal, destinée aux abonnés des zones non dégroupées et fer de lance des offres d'entrée de gamme de Free.

Toutefois, l'opérateur s’installe dans les années 2010 avec une Freebox Révolution désormais célébrissime. En effet, la liste des nouveautés est assez impressionnante : lecteur Blu-ray, disque dur de 250 Go accompagné de capacités NAS, télécommande à liaison radio bardée de capteurs, processeur Intel pour le multimédia, débit internet jusqu'à 1 Gbit/s (en théorique)…

Xavier Niel sort le grand jeu. Pour l'occasion, on fait appel à Philippe Starck pour dessiner les contours des deux appareils. On ne parle pas de n'importe qui, puisqu'il s'agit là de l'homme qui a, entre autres, dessiné le Venus, le yacht de Steve Jobs. La classe.

En 2015, Free transforme l'essai et annonce sa Freebox Mini 4K, qui perd le lecteur Blu-ray et le disque dur pour être plus petite, mais qui gagne tout de même en performance sur certains aspects, notamment en adoptant des ports HDMI 2.0. Surtout, elle est propulsée par Android TV, qui fait ses tout premiers pas en dehors des appareils fabriqués par Google.

Toujours plus, et peut-être même un peu trop ?

Il faudra attendre 2018 pour voir une nouvelle génération de Freebox. En décembre, l'opérateur annonce la One, un retour à la box tout-en-un qui gère à la fois le multimédia et la connectivité Internet. L'appareil est avant tout destiné aux offres d'entrée de gamme de Free, et ne sert que d'amuse-gueule à la véritable star du moment : la Delta.

Débits théoriques jusqu'à 8 Gbit/s, disque dur de 1 To, capacités NAS jusqu'à 21 To, fonctions domotiques et intégration d'une puce 4G LTE. Free nous propose un boîtier server impressionnant, accompagné d'un boîtier player qui l'est tout autant, si ce n'est plus. Dessiné par Jasper Morrison, il dispose de la 4K HDR, est accompagné de Netflix Essentiel et Prime Video sans surcoût, et est équipé d'un système audio signé Devialet. L'appareil peut être utilisé comme une enceinte connectée, et pour couronner le tout, il peut être contrôlé grâce à un petit « OK Freebox ».

Xavier Niel avait toutes les raisons d'être fier de la Freebox Delta : l'appareil était un véritable condensé d'innovation © Clubic.com

Cependant, au-delà du prix élevé de l'offre haut de gamme de Free, nous sommes en présence d'un appareil qui en fait peut-être un peu trop. Avait-on vraiment besoin d'une telle capacité audio 5.1 intégrée au player ? À l'époque, la rédaction de Clubic était un peu dubitative, s'interrogeant : « Où est donc passé le créneau "Il a Free, il a tout compris !" qui a fait s'envoler l'entreprise ? » On se demande alors si l'innovation n'a pas pris une tournure préjudiciable pour la marque, qui chercherait peut-être à voler un peu trop haut.

D'autant que tout n'est pas parfait. L'opérateur est resté accroché à Freebox OS plutôt que de renouveler l'expérience Android TV, ce qui limitera le nombre d'applications disponibles pour les abonnés. Enfin, si Free inclut bien Netflix dans son forfait, nous avons affaire à l'offre SD du service américain. Dommage, pour un appareil doté de telles capacités.

Heureusement, Free mettra en place son offre Delta S, qui permettra aux abonnés de profiter d'un server de qualité sans devoir acquérir l'onéreux player qui va normalement avec. Mieux encore, les très bons équipements de la Freebox Mini 4K et Révolution peuvent se substituer à ce dernier.

Nouvelle décennie, nouveaux enjeux ?

En 2020, la Freebox One cède sa place à la Freebox Pop. Redivisée en deux appareils, la bête a bien sa place dans les années 2020, affichant une certaine sobriété : pas de Wi-Fi 6 à sa sortie, pas de disque dur intégré et pas de 4G. On met même l'accent sur la maîtrise de l'empreinte carbone et sur un design plus minimaliste, moins tape-à-l'œil.

Les boîtiers server et player de la Freebox Pop, accompagnés d'un répéteur Wi-Fi inclus dans le lot (en haut à droite) © Stéphane Ruscher pour Clubic.com

Le lecteur de la Pop, quant à lui, abandonne le faste de ses prédécesseurs ; exit donc les haut-parleurs sophistiqués ou le lecteur Blu-ray. Les performances sont toutefois au rendez-vous et on obtient même les compatibilités 4K HDR, Dolby Vision et Dolby Atmos, tout en retrouvant enfin Android OS. L'appareil sera finalement proposé à la place du lecteur Devialet aux abonnés Freebox Delta, préfigurant sa retraite à l'été 2023.

La Freebox Pop fait toujours partie du catalogue de Free, aux côtés de l'indestructible Freebox Révolution. Le player de la Pop est même livré avec la nouvelle Freebox Ultra, annoncée ce mardi 30 janvier. Cette dernière possède la même esthétique que sa petite sœur, tout en étant plus allongée et plus puissante, avec des débits pouvant aller jusqu'à 8 Gbit/s symétriques. C'est une première mondiale pour un opérateur, au même titre que l'annonce du Wi-Fi 7, enfin disponible mais encore limité à de rares appareils compatibles.

Freebox Ultra, la réponse ultime de Free aux années 2020 ? © Nicolas Guyot pour Clubic.com

Ici encore, pas de possibilité d'installer un NAS avec plusieurs disques durs (on se contentera d'un SSD), pas d'alarmes intégrées, pas de box TV obligatoire. Free veut laisser le choix du matériel à ses abonnés, une souplesse plus en phase avec les enjeux environnementaux de la décennie. La disruption de l'opérateur ne se situe plus tellement au niveau de l'équipement, mais plutôt du côté des services fournis dans une offre unique et haut de gamme qui répond à un problème très actuel : la prolifération des offres de SVOD.

Reste à voir quel sera l'impact sur les futures Freebox, mais aussi sur la concurrence, qui a généralement bien profité du sillage du navire Free, brise-glace d'un secteur des télécoms en constante mutation.