Après la publication de plusieurs articles sensationnalistes cette semaine, le gouvernement américain a dû monter au créneau. La nouvelle menace russe, si elle est prise très au sérieux, concerne une capacité future et ne pose pas de danger immédiat. La spéculation va bon train, en dépit du traité de l'espace...
La polémique est née d'une fuite du Pentagone, dont plusieurs sources indépendantes ont affirmé à NBC News que la Russie développait une arme nucléaire contre les satellites américains en début de semaine. Dès mercredi, des politiciens demandaient des explications publiques à la Maison-Blanche. Il faut dire que lorsque l'actualité s'est propagée dans les médias, certains n'ont pas fait preuve d'une grande retenue et les débats ont déjà éclaté sur l'utilisation russe d'une potentielle charge nucléaire dans l'espace, écho moderne du très controversé essai « Starfish Prime » de 1962. Les États-Unis avaient alors testé une bombe en orbite basse, laquelle avait eu des conséquences sur l'ensemble des (très rares) satellites de l'époque. À présent qu'il y a plus de 7 500 satellites actifs en orbite basse, dont une ample majorité est américaine, les craintes paraissent justifiées. Et ce, d'autant plus que la Russie a envoyé dans l'espace un satellite de la défense, non spécifié, le 9 février ! Les représentants du Pentagone ont heureusement calmé cet emballement lors d'une conférence de presse le 15 février.
Pas de panique pour le Pentagone
L'administration Biden a effectivement confirmé suivre de près une nouvelle menace russe dans le domaine anti-satellite, qu'elle suit depuis plusieurs semaines et qu'elle juge sérieuse. Néanmoins, il ne s'agit pas selon les Américains d'une capacité actuelle ni d'une menace active aujourd'hui pesant sur les intérêts du pays. « Il n'y a de danger immédiat pour personne », a bien confirmé John Kirby, le responsable de la communication sur la sécurité nationale américaine. Résultat, le Pentagone a également refusé de rendre publique la nature exacte de cette future menace ni d'évoquer les discussions exactes avec la partie russe... ce qui agace plusieurs politiciens, sur fond de débats budgétaires et d'accusations d'être pro ou anti-russe à cause d'une nouvelle levée de fonds pour l'Ukraine.
Une bombe, un réacteur ou rien ?
Si plusieurs médias ont ainsi évoqué une arme nucléaire (ce qui violerait le fameux traité de l'espace de 1967 et paraît peu crédible à de nombreux analystes au regard des intérêts spatiaux russes), d'autres évoquent plutôt la possibilité d'un satellite doté d'une technologie nucléaire, comme un petit réacteur afin de lui donner la puissance nécessaire pour opérer une arme à haute énergie. En 2019 un projet appelé Ekipazh, puis TEM évoquait un satellite lourd dédié au transport en orbite russe, équipé lui aussi d'un petit réacteur nucléaire. Peut-être la Russie a-t-elle progressé sur une version anti-satellite de ce futur véhicule...
Cette piste n'est pas à négliger, étant donné que d'autres pays (la France en tête) comptent équiper leurs satellites avec des lasers de « défense de zone », capables d'endommager optiques, antennes ou électronique embarquée. Les spéculations vont en tout cas bon train outre-Atlantique, même si ces déclarations ont permis de désamorcer l'emballement médiatique. La Russie avait effectué un test d'arme anti-satellite à l'automne 2021, qui avait levé plusieurs alarmes pour la Station Spatiale Internationale.
Source : Space News