La coalition I2Coalition (Internet Infrastructure Coalition), qui regroupe des géants de la tech comme Amazon et Google, dénonce les initiatives françaises de blocage des sites de piratage. Selon eux, ces mesures menacent la nature libre et ouverte d'Internet, et perturbent le commerce numérique.
Lorsque les gouvernements décident de s'attaquer au piratage en ligne, les entreprises concernées sont rarement les premières à applaudir. C'est le cas d'Amazon et de Google, qui n'apprécient que très relativement les mesures prises par la France notamment pour lutter contre le piratage en ligne.
Les deux géants des GAFAM font partie de l'Internet Infrastructure Coalition, I2Coalition pour les intimes, qui rassemble petits et grands acteurs du secteur allant de services VPN à l'hébergement web, par exemple. Entre États et entreprises, décidément, le courant ne passe pas.
Des mesures de blocage jugées disproportionnées et contreproductives
Mais qu'est-ce qui agace autant les GAFAM ? Si personne ne nie l'importance de lutter contre le piratage, la coalition I2Coalition, qui compte dans ses rangs des poids lourds comme Amazon, Google ou Cloudflare, estime que les initiatives françaises vont trop loin. Dans une lettre adressée aux autorités américaines, le groupe dénonce des « restrictions » qui « menacent fondamentalement la nature libre et ouverte d'Internet ».
En cause notamment, les récentes décisions de justice obligeant non seulement les fournisseurs d'accès à bloquer les sites pirates, mais aussi les fournisseurs de DNS et les services de CDN. Une extension du champ d'application qui, selon I2Coalition, entraîne de nombreux « blocages collatéraux » touchant des sites légitimes.
L'exemple italien, avec le blocage malencontreux de nombreuses adresses Cloudflare, est régulièrement brandi pour illustrer les dérives possibles de ces mesures. La coalition pointe également du doigt l'absence de « contrôles adéquats » et de « surveillance indépendante », qui permettraient des erreurs aux conséquences désastreuses.
En France, on se souvient de Canal+ qui avait fait plier les géants du Web et les DNS, qui avait obligé non seulement les fournisseurs d'accès à restreindre l'accès aux sites pirates, mais aussi des entreprises comme Google, Cloudflare et Cisco à « empoisonner » leur DNS. Une mesure que I2Coalition juge disproportionnée, soulignant que l'impact réel sur le piratage serait « minime » et imposerait aux entreprises de « créer de nouvelles technologies sur les systèmes DNS mondiaux ».
Une menace pour l'innovation et le modèle économique des entreprises tech
Mais peut-être plus agaçant encore pour la coalition que ces considérations techniques et légales, ces mesures anti-piratage représentent une sérieuse menace pour le modèle économique de ces entreprises. Celles-ci dénoncent les « coûts techniques considérables » engendrés par la mise en place de ces systèmes de blocage, qui constituent selon elles de véritables « obstacles au commerce ».
Les sociétés tech, qui tirent une part importante de leurs revenus du commerce en ligne, se rongent également les sangs quant aux répercussions sur l'innovation qu'entraîne ce bridage. Elles estiment que ces initiatives, loin de résoudre le problème du piratage, ne feront qu'entraver la libre circulation des informations et des biens numériques. On est bien loin des ambitions d'une économie fluide et mondialisée d'Internet.
Sur un plan plus éthique, I2Coalition estime que ces initiatives nuisent gravement au commerce numérique transfrontalier et favorisent une « balkanisation d'Internet ». Si le procédé n'a rien à voir avec le couple politique français, il n'en reste pas moins que ces entreprises semblent perdre patience vis-à-vis des dérives techniques liées à ce serrage de vis.
Sources : Torrent Freak, I2Coalition