JB -Olivier Heckmann, bonjour. Virtual Baguette, Multimania, Lycos, PulseVision, Kewego,... pouvez vous revenir sur votre parcours de pionnier de l'internet ?
OH -Bonjour. J'ai eu la chance de débuter ma carrière dans le marketing interactif en 1994, chez RayDream, un spécialiste de l'image de synthèse, ce qui m'a permis de rencontrer michel-meyer , un autre français qui travaillait également dans la Silicon Valley. Dès 1995, nous nous sommes associés pour créer Virtual Baguette, l'un des premiers sites communautaires français, à une époque où l'internet ne comptait encore que quelques milliers de sites web. Les années qui ont suivi ont été marquées par notre retour en France, la rachat de la société Mygale, sa fusion avec Virtual Baguette pour créer Multimania.com, son introduction en bourse en 2000 puis son rachat en 2001 par le groupe Lycos, où je me suis occupé du développement des services d'hébergement payant pour toute l'Europe. Fin 2002, Michel et moi avons estimé que nous avions rempli notre contrat. Après quelques mois de pause, nous avons alors créé en 2003 la société PulseVision avec l'idée d'appliquer notre expertise à l'audiovisuel, un secteur qui n'avait pas encore été impacté par la révolution internet.
JB -Est-ce que la société Kewego de 2007 ressemble au projet initial de 2003 ?
OH -Dès 2003, nous avions identifié les trois principaux champs de force : la multiplication des connexions haut débit, la démocratisation de la production et de la distribution de vidéos et enfin la multiplication des écrans : PC, baladeur, mobile ou encore téléviseur. Cette analyse permet à la société, désormais rebaptisée en Kewego, de s'appuyer sur les briques technologiques développées initialement pour Pulsevision.
JB -Quel est le métier de Kewego exactement ?
OH -Kewego permet à des médias ou des entreprises de diffuser de la vidéo sur internet, sur les mobiles ou sur un réseau d'entreprise. Outre notre plate-forme, nous essayons de donner le pouvoir aux utilisateurs et nous multiplions les outils d'interaction ou d'échange avec eux. Nos clients sont aussi bien des médias comme M6 (Wideo.fr), France Television ou l'Equipe, qui recherchent une plate-forme de vidéo à la demande, que des entreprises comme Axa ou le Groupe Laser qui proposent notre plate-forme en plus de leur intranet. Nous sommes directement rémunérés par ces clients ce qui nous distingue d'autres plates-formes dont les revenus sont essentiellement publicitaires.
JB -Multimania était pourtant un média. Pourquoi avoir renoncé à concurrencer DailyMotion ou YouTube ?
OH -Après l'éclatement de la bulle internet et l'effondrement des recettes publicitaires, un marché très volatile, nous avons estimé que le modèle BtoB était plus raisonnable. Nous ne sommes donc effectivement ni un média, ni une régie, mais nous permettons tout de même à nos clients, à commencer par M6 avec Wideo.fr, d'opérer sur ce segment très dynamique. Nous sommes d'ailleurs plutôt satisfaits par ce positionnement car nous comptons désormais plus d'une centaine de clients en Europe : fournisseurs d'accès, médias, entreprises, etc...
JB -Après avoir travaillé avec DailyMotion, a préféré internaliser Wat.tv. Ce risque existe-t-il également avec vos propres clients ?
OH -La question se pose effectivement mais il suffit de regarder les audiences de Wideo.fr et de Wat.tv pour avoir la réponse. Il est de plus en plus difficile d'imposer une plate-forme de partage de fichiers vidéo sur le web. Cela prend du temps, de l'argent, nécessite des compétences et sans doute une masse critique, que nous sommes désormais les seuls à pouvoir offrir avec nos 100 partenaires vidéos et nos 1000 références clients.
JB -En terme de fonctionnalités, votre plate-forme pourrait elle aller vers le cinéma à la demande voire opérer un retour aux sources en permettant la publication de textes ou de photos, comme le permettait Multimania ?
OH -Il existe déjà des spécialistes du blog ou de la photo et Kewego a décidé de se concentrer sur le développement d'une plate-forme vidéo pour les médias et les entreprises. Nous offrons à nos clients le choix entre le contenu amateur (exemple de Wideo.fr) ou le contenu professionnel (exemple de l'Equipe TV). Technologiquement, nous pouvons aussi proposer de la VOD premium, comme le fait par exemple CanalPlay. Nous pensons néanmoins que le modèle de la vidéo à la demande gratuite est celui qui présente le plus fort potentiel de croissance.
JB -Vous avez récemment annoncé une levée de fonds de 5 millions d'euros. La dernière avant l'entrée en bourse ?
OH -Cette levée de fonds devrait nous permettre d'atteindre la rentabilité opérationnelle sur le marché français dès la fin de l'année 2007 en attendant de l'atteindre pour l'ensemble du groupe dès la fin de l'année 2008. Nos priorités sont la croissance internationale et la rentabilité. Si la bourse nous permet de les atteindre, nous pouvons effectivement l'envisager.
JB -Olivier Heckmann, je vous remercie.