Live Japon : des nouvelles des robots !

Vincent RAMARQUES
Publié le 03 novembre 2007 à 11h12
Cela fait bientôt six mois qu'une exilée au Japon vous expose ici les innovations techniques locales, et, qui l'eut cru, elle a presque réussi l'exploit de ne presque pas parler de robots. Diantre, ce n'est pourtant pas qu'elle déteste farouchement ces êtres mécatroniques (encore que), ou qu'il ne se soit rien passé dans ce domaine. Il est donc grand temps de rendre justice aux armées de roboticiens nippons qui s'escriment à attirer l'attention du monde sur leurs créatures, en les rendant plus intelligentes, et ce dans l'espoir d'en faire des vrais copains de l'homme.

Des robots capables de résister aux conditions difficiles

Les dernières majeures trouvailles nippones en la matières vont ainsi dans le sens d'une cohabitation harmonieuse entre les gents humaine et robotique. Depuis un an par exemple, la société de travailleurs intérimaires Ubiquitous Exchange propose aux entreprises la location d'Ubiko, un robot fabriqué par la firme nippone spécialisée dans la conception de machines Tmsuk. Ubiko, robot tripode à roulettes, peut être dépêché dans des sociétés, écoles ou hôpitaux comme hôtesse d'accueil, guide ou surveillant. Il est capable de répondre à des questions simples et de donner des renseignements. Ces compétences lui permettent de prétendre à un poste de guide dans les lieux publics ou de « pion » dans les écoles pour « prévenir les disputes entre élèves » (dixit le prestataire). Salaire du travailleur : 105.000 yens (700 euros), pour deux heures de service. Le tarif est justifié, affirme la société de location, mettant en avant les avantages liés à l'emploi d'un robot toujours d'alerte, corvéable à merci et non-syndiqué. L'intérimaire high-tech polyvalent est si demandé qu'une trentaine d'entreprises étaient sur une liste d'attente au moment où cette prestation fut annoncée.

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Les robots prennent ainsi une place de plus en plus importante au Japon, premier pays producteur et utilisateur d'automates industriels. Dans un pays où la main d'oeuvre vieillit et tend à baisser, ils sont censés progressivement remplacer l'homme pour effectuer des travaux répétitifs, dangereux et/ou ingrats. Pour réaliser ces travaux aussi bien qu'un homme, les chercheurs sont poussés à donner à leurs créations des apparences et fonctions les plus proches possibles de celles de l'homo-sapiens.

Récemment, une équipe a présenté son dernier spécimen de robot humanoïde, capable de travailler sous une pluie battante et sur des surfaces adverses pour libérer les hommes des tâches les plus harassantes. Semblant tout droit sorti d'un film de science fiction japonais, "HRP-3 Promet MK-II" (c'est son nom) mesure 1,60 mètre pour une masse de 68 kilogrammes. Il peut se déplacer sur des terrains pentus et sablonneux et endurer sans broncher un déluge d'eau s'abattant sur ses épaules de tâcheron robuste et imperturbable. HRP-3, descendant d'une lignée de divers prototypes, peut marcher pendant deux heures d'affilée et sait manipuler adroitement un tournevis en adoptant une posture qui lui permet de coupler ses forces, à la façon d'un humain.

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Ce robot, doté de quelque 42 "degrés de liberté" (articulations) a été développé conjointement par les entreprises Kawada Industries, Kawasaki Heavy Industries (KHI) et l'Institut national des sciences et technologies industrielles avancées, avec l'aide de l'Etat. Ses créateurs espèrent le vendre vers 2010 à des clients tels que des entreprises de construction, pour un prix qui devrait avoisiner les 15 millions de yens (95.000 euros). « La population de notre pays vieillit rapidement et il est urgent de concevoir des robots qui puissent remplir des fonctions que seuls les humains sont aujourd'hui à même de réaliser », ont souligné les chercheurs dans un communiqué.

Des robots pour présenter, guider, surveiller et assister

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Le premier constructeur automobile mondial, le japonais Toyota, a pour sa part récemment confié les clefs de son musée, situé dans son fief au centre du Japon, à son nouveau robot humanoïde, lequel servira de guide loquace infatigable. Ce robot à l'allure féminine, 1,20 mètre et 60 kilos, se déplace de façon autonome sur des roulettes, en évitant les obstacles. Baptisé « Robina », il guide les visiteurs du musée automobile du groupe à Toyota-City, près de Nagoya (centre). Selon son concepteur, « Robina » est capable de donner des explications en regardant une personne dont il reconnaît le nom sur un badge. Il sait aussi tenir un stylo et signera volontiers des autographes, a promis Toyota. A l'instar de son compatriote Honda et fort de ses avancées techniques, Toyota s'est activement engagé dans le développement de technologies robotiques, convaincu lui aussi que les robots pourront à l'avenir jouer un important rôle dans la vieillissante société japonaise, et qu'il y a un marché à la clef. « Nous poursuivons les recherches sur les robots partenaires dans quatre directions: l'aide aux corvées ménagères, le soutien médical, l'assistance à la production industrielle et la mobilité individuelle », précise Toyota.

Des anciens chercheurs du géant de l'électronique Sony, spécialistes de l'intelligence artificielle et créateurs du robot chien Aibo, ont rejoint les équipes du constructeur automobile, Sony ayant abandonné cet axe de développement. Du coup, Toyota serait même devenu l'an dernier le premier groupe japonais à déposer des demandes d'usage de brevets dans ce domaine.

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D1


Ubiko et Robina ne sont pas, loin s'en faut, les seuls robots conçus pour remplacer des humains ailleurs que sur des chaînes de production. Asimo, le plus connu des robots humanoïdes japonais, développé par Honda, est également souvent employé comme agent d'accueil au siège du groupe à Tokyo. Les sociétés nippones de services de sécurité Secom ou Alsok ont elles-mêmes aussi conçu des robots de surveillance employés sur les sites sensibles dont elles assurent la surveillance. Fin 2006, D1 d'Alsok, est entré en service comme vigile dans les immeubles. Il est lui aussi proposé en location à 380.000 yens (2.533 euros) par mois.

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Asimo


Robot à l'aspect très humain ?

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Dans un registre un peu différent, un grand magasin de Tokyo a recruté pour les fêtes de fin d'année dernière une intérimaire robot dont la ressemblance avec une jeune femme est frappante, au point qu'elle fichait la trouille aux enfants. Le visage et les mains de ce robot, imaginé par un laboratoire universitaire spécialisé, sont couverts d'une peau très réaliste. Ses mouvements (mains, lèvres, têtes, yeux) sont fluides et très "naturels", presque trop. Sourire permanent aux lèvres, cette démonstratrice répétait en boucle un même message publicitaire pré-enregistré du matin au soir. Une première version de ce robot humanoïde, un peu moins réaliste mais un peu plus intelligent, avait déjà joué le rôle d'hôtesse d'accueil lors de l'Exposition universelle d'Aïchi (centre du Japon) en 2005.

Les nouveaux robots humanoïdes japonais savent désormais répondre à des questions, donner des indications, être polis, servir le thé aux invités et laver les tasses. Une unité de recherches de l'université de Tokyo a fait un pas en ce sens avec une nouvelle version de son robot d'assistance à domicile, baptisée HRP-2W. Ce dernier est capable de s'adapter aux gestes et à l'humeur de son maître pour lui plaire. Au cours d'une expérience devant les journalistes, le professeur Tomomasa Sato s'est fait servir de façon improvisée une tasse de thé dans son sofa par un HRP-2W lui obéissant au doigt et à l'oeil. Il entendait ainsi démontrer que les robots sont désormais capables de comprendre d'eux-mêmes les gestes et les paroles des humains et d'adapter leur comportement en conséquence. « Il n'y a pas de scénario de mouvements prédéfini dans cette démonstration », a-t-il assuré en dégustant son breuvage. Toutefois, le robot n'est pas encore à même de gérer les imprévus qu'il peut rencontrer en effectuant sa tâche, comme le fait de casser une tasse.

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Pour ce faire, il faudrait en effet qu'il mémorise et trie les informations issues des différentes situations rencontrées, pour anticiper et apprendre à discerner en établissant les liens entre les effets et les causes. Bref, le plus difficile reste, selon des chercheurs nippons, de donner aux robots la capacité d'apprendre à tirer les leçons de leurs bêtises pour ne pas faire deux fois la même ânerie. Dans la même veine, un organisme public japonais a développé une technologie permettant à un robot d'assistance de comprendre réellement le sens de propos ambigus, en fonction des circonstances.

Communication, analyse et évaluation robotique

Les chercheurs de l'Institut national japonais des technologies de l'information et de la communication (NICT) affirment que leur dispositif, qui combine divers facteurs pour évaluer le contexte, sait faire la différence entre deux interprétations possibles d'une même phrase. Il s'agit, selon eux, d'une première mondiale. Par exemple, si un robot demande en fin d'après-midi à un salarié: « voulez-vous un café ? » et que le salarié répond: « si je bois un café, cela va me tenir éveillé », cette phrase peut être interprétée comme un refus ou une acceptation, en fonction du contexte et du ton. En effet si le salarié s'apprête à se farcir des heures supplémentaires, sa réponse signifie « oui », car il juge bon d'être en éveil pour être efficace. Si au contraire il est sur le départ, pressé de regagner son bercail après une journée de dur labeur, le robot doit comprendre « non », la réponse voulant dire qu'il craint que le café l'empêche de dormir.

La capacité d'un être de mécanique et composants électroniques à bien faire la différence entre ces deux interprétations opposées est d'autant plus importante que les conversations en langue japonaise prêtent très souvent à confusion. Dans bien des cas, seuls des éléments autres que les mots (gestes, regard, ton) permettent de bien saisir le sens des propos. Les roboticiens nippons espèrent donc que cette technologie permettra de donner naissance à des robots qui sauront communiquer de façon adéquate et naturelle avec les humains en prenant en compte le cadre de vie et les habitudes d'un interlocuteur.

Le même institut public a d'ailleurs également conçu plus récemment encore un prototype de robot humanoïde censé être le premier à communiquer par la parole et par les gestes, en accompagnant ses dires de mouvements corporels expressifs idoines, lesquels sont indispensables pour bien faire passer un message à un interlocuteur.
La plupart des autres robots bavards bougent en papotant, mais le lien entre les mots et les attitudes est préconçu et pas toujours signifiant. Encouragé par l'Etat, l'Institut japonais des technologies de l'information voit dans les robots un moyen de s'occuper des vieux et des tout-petits. « La société japonaise avançant en âge, il est nécessaire de réaliser des robots qui contribuent à la vie sociale », plaident les chercheurs. « Cependant, pour y parvenir, il est indispensable que la communication homme-robot se rapproche le plus possible de celle d'un dialogue humain ».

Il ne faudrait pas en effet que les enfants en bas âge éduqués par des robots prennent des mauvaises habitudes en imitant un être mécatronique qui se comporte et s'exprime de façon totalement désordonnée ou bien parle en restant bêtement au garde-à-vous.

Les robots offrent de la compagnie utile

Le développement de technologies pour réellement transformer les robots en assistants de vie constitue une des priorité de recherche et développement subventionnées par l'Etat. Au Japon, peu s'en émeuvent. Pour diverses raisons socio-culturelles qu'il serait trop long d'expliquer ici, les Nippons ne considèrent pas comme une ineptie, ni une terreur l'hypothèse de vivre avec des robots. Des personnes âgées de plusieurs dizaines de maison de repos trouvent du réconfort en compagnie du robot thérapeutique bébé-phoque Paro, qui d'après une série de tests, permet effectivement d'atténuer les effets du syndrôme d'Alzheimer.

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Papero de NEC, une sorte de robot à tête de singe, est quant à lui en partie conçu pour tenir compagnie aux enfants.
Pas robophobes pour deux sous, les Japonais sont même prêts à accepter qu'un robot les guide pour choisir les vins et mets pour les accompagner. Le groupe d'électronique, informatique et télécommunications NEC et l'université de Mie ont ainsi conçu à partir de Papero un "robot sommelier". Avec ses deux mains mécaniques comportant un complexe réseau de capteurs à infrarouge, il peut analyser la composition chimique des aliments et du vin pour accommoder au mieux plats et grands crûs. Après avoir analysé la nature du vin, le robot cherche dans sa base de données quelle nourriture lui correspond, et prodigue alors le conseil, en tenant en plus compte des goûts de son propriétaire. Kanpaï !

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Vincent RAMARQUES
Par Vincent RAMARQUES

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