Pour tenter de ralentir les mouvements de protestation populaire qui enflamment l’île depuis le début du mois, le gouvernement cubain a imposé une coupure massive des communications. Certains hauts fonctionnaires à Washington demandent à ce que les États-Unis rétablissent Internet à Cuba via un réseau de ballons à très haute altitude.
Un projet qui peut laisser rêveur, mais qui se heurte à de grandes difficultés tant techniques que politiques.
Une île au bord de l’explosion
Depuis le 11 juillet, Cuba est en proie à des manifestations telles qu’on n’en a pas vues depuis plus de soixante ans. Déjà largement affaiblie par la chute des revenus du tourisme depuis deux ans, la population cubaine fait aujourd’hui face à de graves pénuries de nourriture et de médicaments. D’ores et déjà, la répression des manifestations a fait au moins un mort, et des dizaines de blessés graves.
Comme on l’observe depuis une dizaine d’années, partout dans le monde, les réseaux sociaux ont joué un rôle majeur dans l’organisation des manifestations et des résistances. Logiquement, le gouvernement cubain a entrepris de couper le réseau Internet récemment installé sur l’île et déjà largement contrôlé et censuré par les autorités.
Au-delà de cette pratique de contre-insurrection désormais commune, les militaires cubains semblent également brouiller les communications radios (clandestines) entre l’île et la Floride. Cette ligne de communication informelle entre Cuba et la diaspora en Floride existe depuis plus d’un demi-siècle, et assure un certain accès aux informations non-gouvernementales.
Des ballons-sondes modifiés pour redéployer Internet ?
Pour rétablir au plus vite les communications avec le continent, mais aussi pour permettre aux manifestants de continuer à s’organiser, plusieurs membres du gouvernement américain et du Congrès, dont un Sénateur de Floride, ont appelé la Maison Blanche à déployer rapidement, au-dessus des eaux internationales, des ballons de haute altitude conçus par Raven Aerostar.
Depuis quelques années, cette société aéronautique travaille avec Alphabet, la maison-mère de Google, sur le Project Loon, destiné à fournir une connexion internet dans des zones isolées sans mobiliser les lourds moyens d’un réseau satellitaire. Si le Project Loon s’est arrêté en janvier, Raven Aerostar semble avoir poursuivi ses essais, avec des vols observés sur les deux côtes américaines ces derniers mois.
Il serait sans doute possible de déployer de tels ballons, des essais ayant notamment été menés au-dessus de Puerto Rico suite à un ouragan en 2017. Mais diffuser sur Cuba demanderait une puissance émettrice nettement supérieure et une capacité à esquiver les brouilleurs incompatible avec la fourniture d’un réseau civil. De plus, un ballon à haute altitude s’avère tout bonnement incontrôlable, et rien ne garantit qu’il ne franchira pas la frontière Cuba. Enfin, émettre sans autorisation sur le territoire cubain est une violation du droit international. Couplé à un éventuel survol du territoire, cela pourrait même être considéré par La Havane comme un acte hostile.
Alors que les autorités cubaines affirment déjà que les manifestants sont coordonnés par les Américains, on peut douter que Washington se prête à un jeu diplomatique aussi dangereux. Pour le moment, du moins.
Source : The Drive