Les livreurs sont des salariés, et non des travailleurs indépendants : la sécurité sociale espagnole a ainsi gagné le procès contre Deliveroo.
Désormais les personnes travaillant pour Deliveroo devront être enregistrées en tant que salariées de l'entreprise de livraison de repas. Celle-ci devra donc payer des cotisations sociales, et ce de manière rétroactive... la facture s'élève déjà à 1,2 million d'euros.
Un premier procès gagné pour la sécu, mais une bataille qui continue
Le tribunal social numéro 19 de Madrid a tranché. Il a donné raison à l'inspection du travail et, de fait, à la sécurité sociale du pays qui gagne donc ce grand procès. Au total ce ne sont pas moins de 532 livreurs Deliveroo qui sont concernés : entre 2015 et 2017, ils ont exercé une activité salariée mais n'ont pas été déclarés comme tels par l'entreprise. Aussi, la Sécurité sociale espagnole était en mesure de réclamer 1,2 millions d'euros, représentant les cotisations non payées par l'entreprise anglaise.Bien que ce procès soit, pour l'heure, le plus important asséné à Deliveroo, en Espagne les épisodes avec la justice ne sont pas encore terminés. D'autres procès doivent avoir lieu pour des cas similaires de cotisations impayées, concernant des coursiers employés et déclarés en indépendants.
L'entreprise a également été jugée et condamnée pour avoir licencié neuf personnes de manière abusive. Deliveroo s'est ainsi vu imposer le retour de ces employés dans l'entreprise et asséner une amende de 6 251 euros, pour chacun d'eux.
Les livreurs, des indépendants dépendants de Deliveroo
Ils sillonnent les rues, équipés de grands sacs à dos isothermes verts pour livrer les commandes : tous sont des indépendants à qui l'entreprise anglaise fait appel. En tant que tels, les livreurs Deliveroo ne bénéficient pas d'énormes avantages : le tribunal de Madrid a d'ailleurs mis en avant le fait que les livreurs n'étaient pas aussi autonomes et décisionnaires dans leur travail que ce que devrait leur permettre le statut d'indépendant.En effet, le tribunal souligne que l'organisation du travail des livreurs est régie par des règles strictes, coordonnées par l'entreprise plus que par les livreurs eux-mêmes. Bien qu'ils puissent a priori choisir leurs horaires et temps de travail, en refusant une livraison par exemple, les coursiers restent lourdement pénalisés par un tel refus, se voyant notamment contraints de travailler à des moments précis pour ne pas entacher la suite de leur collaboration avec Deliveroo. Et ce, alors même que leur travail n'est pas strictement encadré par un contrat salarial.
De plus, comme le souligne le juge chargé du dossier, la société ne fait pas uniquement appel aux indépendants pour la livraison : l'entreprise fournit également aux coursiers une marche à suivre, dès lors que la commande est validée. Elle n'hésite pas non plus à envoyer un coursier accompagner une jeune recrue lors de sa première tournée, en guise de formation.
Deliveroo persiste : les coursiers sont indépendants du fait de leur autonomie
Les livreurs travaillent seuls, avec leur vélo et leur smartphone personnels, quand et où ils le souhaitent. Voilà les arguments de Deliveroo pour défendre la non affiliation de ses livreurs au régime des salariés.Si on écoute le gérant de l'application de livraison de repas, son rôle se limite à jouer l'intermédiaire entre restaurants, coursiers et clients, soit à savoir qui commande et qui fournit.
Pour l'entreprise de livraison de repas, les histoires avec la justice ne sont pas rares : en juin, il a été condamné à Valence pour les mêmes faits à propos de 97 livreurs. Des procès similaires doivent encore avoir lieu à Barcelone et Saragosse.
À trop vouloir livrer plus, en payant moins, l'addition risque finalement d'être sacrément salée pour Deliveroo !
Source : El Pais