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Un projet de loi britannique sur la sécurité en ligne pourrait interdire le chiffrement de bout en bout, utilisé par WhatsApp. La messagerie du groupe Meta menace, en retour, de quitter le pays.

Nos voisins du Royaume-Uni pourraient-ils être privés de WhatsApp ? C'est en tout cas ce que l'application de messagerie instantanée menace de faire. Il s'agit là d'une conséquence directe du projet de loi « Online Safety Bill » sur la sécurité en ligne, dont l'une des mesures consisterait à détecter les contenus illégaux, pédopornographiques plus particulièrement, échangés avec l'application. Mettre en place un tel système reviendrait à casser le chiffrement de bout en bout, qui ne pourrait plus respecter sa promesse de départ de messages vus par les seuls expéditeurs et destinataires.

Toucher au chiffrement, la ligne rouge que WhatsApp ne veut pas franchir

Le projet de loi n'explique pas comment l'analyse et la détection des messages et contenus illégaux seraient opérées, mais les spécialistes en cybersécurité sont unanimes pour affirmer que cela rendrait impossible le chiffrement de bout en bout des échanges. Aujourd'hui, le chiffrement est appliqué par défaut à toutes les conversations, sauf si un message est signalé comme inapproprié, ce qui fait tomber cette protection.

Cela n'embêterait d'ailleurs pas que WhatsApp puisque des services comme Signal ou Telegram (et toutes les autres messageries adeptes du end-to-end encryption) utilisent ce système pour garantir la confidentialité des messages.

Sauf que WhatsApp, fort de sa toute-puissance et de sa place de leader mondial des messageries instantanées (avec 2 milliards d'utilisateurs mensuels actifs), ne l'entend pas de cette oreille. La filiale du groupe Meta considère le chiffrement de bout en bout comme une ligne rouge à ne pas franchir.

WhatsApp n'est pas prêt à tailler dans la sécurité

Le patron de WhatsApp, Will Cathcart, a d'ores et déjà promis qu'il ne comptait pas modifier ni dégrader le service actuel. « La réalité est que nos utilisateurs du monde entier veulent la sécurité », a-t-il réagi. « Ils ne veulent pas que nous réduisions la sécurité du produit, et ce serait un choix étrange pour nous de la réduire d'une manière qui affecterait 98 % de nos utilisateurs ».

Officiellement, le gouvernement britannique dispose déjà du pouvoir de demander la suppression du chiffrement, avec une loi adoptée en 2016. Sauf que de l'aveu même de WhatsApp, aucune demande légale n'est jamais arrivée sur leur bureau. Le projet de loi émanant à l'origine de l'ancien premier ministre Boris Johnson actuellement discuté outre-Manche pourrait renforcer ce pouvoir et pousser la messagerie à abdiquer.

Si le pouvoir britannique allait au bout de son idée, WhatsApp ne pourrait qu'appliquer les politiques de modération de contenu. S'y refuser, pour ne pas menacer son modèle autour du chiffrement de bout en bout, l'exposerait alors à une amende pouvant aller jusqu'à 4 % de son chiffre d'affaires annuel. WhatsApp, qui a rappelé avoir été bloquée en Iran, soulève l'hypothèse de cesser toute activité au Royaume-Uni si le gouvernement était décidé à lui forcer la main. La bataille des idées est lancée.

Source : The Guardian