Jeune éditeur français, Focus a toujours su nous séduire avec des titres résolument décalés par rapport à la production vidéo-ludique actuelle. Des titres comme Virtual Skipper, Cycling Manager, Tony Tough ou Runaway n'ont aucun équivalent sur le marché. Le monde de la stratégie temps réel ne semble toutefois pas permettre autant de latitude et malgré leurs différences, Sudden Strike ou Blitzkrieg restaient relativement proches des canons du genre. Les choses pourraient toutefois changer avec la venue d'un nouveau jeu de stratégie dont même le nom est surprenant : Fire Department !
Développé par MonteCristo spécialiste du jeu de gestion, ce Fire Department doit cependant être vu comme un réel jeu de stratégie temps réel. Il n'est en effet pas le moins du monde question de gérer le budget des pompiers ou bien l'achat de nouveaux coupe-vents ! C'est sur le terrain que MonteCristo, Focus vous proposent d'agir : face aux brasiers et aux nuages de fumée, face aux ambiances surchauffées et aux retours de flammes. Maintenant reste à savoir s'il était vraiment possible de faire du scénario de Backdraft un véritable jeu vidéo ?
Au feu les pompiers...
Livré sur un seul CD, Fire Department s'installe rapidement mais occupe tout de même la bagatelle de 1.2 Go sur le disque dur. Au premier lancement du jeu, on se demande d'ailleurs pourquoi autant d'espace monopolisé alors que l'austérité semble de rigueur : pas la moindre séquence d'introduction en vue et, le logo de MonteCristo passé, nous nous retrouvons sur une page d'accueil des plus quelconque. Les options n'y sont pas très nombreuses et, chose remarquable pour un jeu de stratégie temps réel, pas la moindre trace d'un mode multijoueurs. C'est d'autant plus dommage que, comme nous ne tarderons pas à le voir, le concept de Fire Department se plie très bien aux exigences d'un mode "coopératif".Bienvenue à la caserne où chaque mission commence par une petite présentation et un "conseil pratique"
Sur cette page d'accueil, il est possible d'accéder aux options afin de configurer le jeu, à la caserne pour avoir un petit résumé des différentes unités accessibles tout au long de la partie et surtout l'option "jouer" qui permet bien de se lancer dans l'aventure. Cette option nous permet d'atteindre l'autre menu d'importance, celui du choix de la mission et c'est là que les inquiétudes commencent car il faut bien avouer qu'en apparence 10 missions ça fait peu. Trois niveaux de difficulté sont heureusement accessibles et, bonne initiative, il est possible de changer cette difficulté à chaque nouvelle mission afin d'ajuster le jeu à son expérience.
De l'importance des unités
Il faut savoir commencer modeste et même si la deuxième mission ("L'Incendie Criminel") est déjà accessible, je ne saurais trop vous conseiller de démarrer par l'entraînement. Si Fire Department est un jeu que l'on qualifie de "stratégie temps réel", il faut tout de même bien avoir à l'esprit que la tournure des événements ne ressemble à rien de ce que nous avons déjà pu expérimenter. Ceux qui auront déjà testé la démo disponible sur Clubic en sont d'ailleurs sûrement convaincus. Chaque mission commence à peu de chose près de la même manière : un incendie s'est déclaré quelque part et vous êtes bien sûr chargé de son extinction. Les différentes missions ne proposent toutefois pas le même cadre d'intervention et notre équipe est ainsi amenée à secourir les habitants d'une villa de star, arrêter l'incendie criminel d'une entreprise de transport ou bien encore agir après le déraillement d'un train ou sur le site d'une centrale nucléaire. Selon le cadre d'intervention, vous n'avez bien sûr pas les mêmes objectifs à accomplir, ni les mêmes unités à disposition.Cela va du pompier de base véritable homme à tout faire au super spécialiste dans sa magnifique combinaison certes ignifugée mais surtout redoutablement encombrante en passant par le spécialiste en désincarcération ou le médecin. Du côté des véhicules, la diversité est là aussi de mise et vous aurez à jouer avec l'ambulance pour apporter les premiers soins, la citerne mobile pour recharger vos réserves d'eau, l'échelle de sauvetage pour entrer et sortir des bâtiments élevés, l'échelle d'attaque pour appuyer l'intervention de vos pompiers et enfin, le pumper qui permet à lui seul d'ouvrir une voie au milieu des flammes. Au total c'est ainsi onze unités qu'il faut manipuler et si cela peut sembler relativement faible comparé à des titres comme WarCraft 3 ou Rise Of Nations c'est, compte tenu du contexte du jeu, largement suffisant. Les joueurs occasionnels apprécieront d'ailleurs cette relative simplicité qui permet de rapidement comprendre les forces et faiblesses de chacune des unités afin de se concentrer sur le plus important : leur positionnement par rapport au feu.
Le placement des unités est capital pour contrer au mieux la progression des flammes
Fire Department insiste en effet beaucoup sur les conséquences des incendies. Tantôt il faut éviter que le feu ne se propage à tout le village et tantôt c'est le risque de pollution qu'il faut limiter. De la même manière, il est important de comprendre des effets très particuliers comme le backdraft ou le flash-over et tout ceci ne peut se maîtriser qu'en plaçant au mieux les différentes unités. Dans certaines missions, l'un des objectifs sera le sauvetage de victimes prisonnières des flammes et là encore le placement des unités a son importance : l'échelle d'attaque permet d'accéder aux endroits difficiles alors que le pumper aura lui la charge d'ouvrir des voies dans le hall d'une banque saturé de flammes. La citerne mobile et l'ambulance doivent aussi être placées au mieux afin, bien sûr, de ne prendre aucun risque (une ambulance touchée par les flammes, ça fait désordre) mais aussi afin d'éviter à vos pompiers de parcourir de trop grandes distances soit pour amener les victimes en sécurité, soit pour simplement recharger leurs réserves d'eau.
Des missions scriptées pour une réalisation perfectible
Au cours d'une même mission, des renforts peuvent arriver afin de faire face à une situation nouvelle. Bien qu'ils ne soient que dix, les scénarios sont effectivement relativement longs et ne manquent généralement pas de rebondissements. Vous intervenez pour éteindre un simple feu mais bien vite les éléments se déchaînent et il faut affronter de nouveaux dangers. Lors de la mission en pleine tempête par exemple c'est une grue qui tombe carrément sur votre équipe d'intervention alors qu'au cours d'une autre mission c'est l'effondrement de l'étage supérieur d'une ambassade qui oblige à ouvrir un "deuxième front" de l'autre côté du bâtiment. Sur certains sites, il n'y a même que l'hélicoptère (on ne le contrôle pas) qui peut intervenir. Il dépose alors quelques spécialistes pour une intervention extrêmement ciblée afin de remplir un objectif précis (sauvetage de données informatiques, d'oeuvres d'art...). Les missions proposent en effet une série d'objectifs et pour remporter le scénario, il n'est pas nécessaire de tous les accomplir. Par contre en fonction de votre réussite une sorte de "médaille" vous est attribuée : en mode difficile remporter que des médailles d'or n'est pas une mince affaire !S'ils apportent de quoi renouveler les missions, ces rebondissements restent toutefois très scriptés au même titre que les événements que l'on retrouve lors des campagnes solo de WarCraft 3 par exemple. Cela permet de refaire la mission dans de meilleures conditions en cas d'échec mais cela diminue également sensiblement l'envie de rejouer une fois les dix missions parfaitement accomplies. La durée de vie est d'ailleurs le point sensible de ce titre auquel on joue avec beaucoup de plaisir. L'ambiance et l'intensité des interventions étant bien rendues, on a envie d'aller de l'avant et la tentation est grande d'enchaîner une à une les missions. Hélas, nous l'avons déjà dit, il n'y en a que dix : du coup, le joueur expérimenté terminera rapidement le jeu et même au niveau difficile, il ne devrait pas falloir plus de 15 heures aux meilleurs d'entre nous pour en venir à bout. Heureusement, les joueurs occasionnels pourront pratiquement en compter le double pour terminer Fire Department.
Plutôt réussi sur certains points, la réalisation technique reste globalement perfectible
Mise à part l'absence de mode multijoueurs, le second reproche que l'on peut formuler à l'encontre du jeu concerne sa réalisation technique. Reconnaissons-le d'emblée, elle est globalement largement suffisante pour bien sentir le combat mené par nos petits bonshommes, mais reconnaissons également qu'elle reste assez éloignée des standards actuels malgré une certaine gourmandise. La résolution est définissable (du 800x600 au 1600x1200) dans les options et quelques petites caractéristiques (détails des textures, ombres...) peuvent également être modifiées mais dans l'ensemble la réalisation graphique manque tout de même d'éclat : les textures restent relativement sommaires et les modélisations auraient pu être davantage travaillées. Pire, malgré cette "simplicité", le jeu est un peu lourd et il faudra faire avec des ralentissements peu nombreux mais réguliers même sur des machines puissantes.
Conclusion
Vous l'aurez compris sans peine et malgré quelques petits défauts, Fire Deparment m'a tout simplement emballé par le thème abordé. L'originalité est une denrée bien rare dans le monde du jeu vidéo et pourtant MonteCristo / Focus ont réussi à innover dans le genre qui paraissait le plus cadenassé, la stratégie temps réel, avec un concept de base qui va complètement à l'opposé de ce que l'on a l'habitude de voir : il faut ici sauver des vies, même celles de truands et, malgré la fumée omniprésente, chaque partie s'avère être un véritable bol d'air frais ! L'originalité ne fait cependant pas tout et comme au cinéma où il faut un réalisateur correct pour ne pas massacrer un bon scénario, un jeu vidéo a besoin d'artistes de talents.De ce point de vue là, on peut dire que Fire Department déçoit quelques peu. Si le graphisme est riche de nombreux détails, les textures apparaissent souvent un peu limitées et les animations des véhicules sont sommaires. Plus gênant, le jeu reste assez lourd et quelques rares plantages sont à signaler. Enfin, c'est tout de même la durée de vie qui représente le plus gros défaut de Fire Department. Malgré une difficulté réglable et globalement assez élevée, le jeu souffre de ne proposer que dix missions. Le joueur occasionnel devrait en avoir pour un moment surtout s'il veut décrocher des "médailles d'or" à chaque scénario, mais les habitués en auront assez rapidement fait le tour.
On regrettera qu'aucun mode multijoueurs n'ait été imaginé par les développeurs alors même que le "coopératif" aurait sûrement donné une dimension supplémentaire au jeu et on se prend à espérer de tout coeur la venue prochaine d'une extension destinée à donner quelques missions supplémentaires. En l'état, Fire Department reste un bon jeu, plutôt abordable (moins de 45€). Ses quelques défauts sont compensés par le plaisir évident que l'on prend à contrôler son escouade de soldats du feu et, bien sûr par son originalité qui change bien agréablement des sempiternels combats entre Egyptiens et Elfes de la Nuit pour la possession d'une mine de Tibérium abandonnée par les Harkonnens !