En bon pionnier (2002), Sonos s'est imposé naturellement comme le leader du marché des enceintes connectées multiroom. Avoir la primauté ça aide, mais conserver son train d'avance ne se fait pas sans talent. Et en la matière, Sonos ne se laisse guère prendre à défaut, sauf peut-être si on cause argent... De même, il faut dire qu'au départ, la concurrence ne s'est pas ruée à l'assaut du californien, qui est resté longtemps le seul, ou presque, à croire à l'audio multiroom, du moins adressé au grand public.
Maintenant, les choses sont différentes. En deux ans à peine, des grands constructeurs comme Samsung, LG, Panasonic, Denon, Cabasse ou encore Bose, ont réussi à développer des gammes complètes multiroom, calquées sur l'offre de Sonos. Et le matériel connecté en général (et pas spécifiquement multiroom), comme des amplificateurs ou des enceintes amplifiées, ne manque pas. Sonos doit donc avec sa nouvelle Play:5 remplacer dignement la précédente et se montrer à la hauteur du défi auquel il est confronté.
Présentation de la Play:5
Une fois n'est pas coutume, nous tenons à vous présenter rapidement le packaging, que Sonos a bichonné comme jamais. Instructions d'ouverture sur le dessus, système de loquets en plastique sécurisé par des cales, glissières intérieures : un vrai petit meuble en carton ! L'enceinte est quant à elle recouverte d'un film plastique ET d'un blister qu'on ôte en arrachant une languette servant de validation des conditions générales d'utilisation. On a de l'imagination chez Sonos ! Par contre tout cela n'est pas très éco-responsable...En matière de design, Sonos ne révolutionne pas le genre mais les équipes chargées de la création ont bien retaillé leurs crayons pour cette deuxième génération. L'espèce de parallélépipède trapézoïdal - hop ! on révise sa géométrie - monté sur socle, avec évent arrière servant de poignée (c'était pratique, dommage), est complètement remodelé pour devenir un gros bloc plus épuré, beaucoup plus proche de la Play:3. La finition est toujours aussi soignée, l'enceinte plus dense que jamais. En effet, malgré des dimensions assez similaires (36,4 x 20,3 x 15,4 cm contre 36,5 x 21,7 x 12,3 cm pour la première génération), la nouvelle Play:5 pèse deux bons kilogrammes de plus (6,4 versus 4,15 kg). Un parpaing ! La nouvelle Play:5 résiste par ailleurs à l'humidité, comme la Play:1 (attention, ça ne veut pas dire étanche...).
La symétrie de l'objet permet à l'utilisateur de disposer l'enceinte à l'horizontale comme à la verticale, sur une tranche ou l'autre. On réalise au passage que SONOS écrit en capitale est un palindrome parfait. Il y a bien sûr des tampons de caoutchouc partout, sauf sur le dessus. Et pourquoi donc ? Parce que c'est là que se trouvent les commandes de contrôle de la musique, désormais tactiles. Une touche lecture/pause au centre (surmontée d'une LED) et, de part et d'autre, les deux touches de volume, qui sont bizarrement représentées par le même pictogramme totalement abscons (quatre points en carré). On peut dorénavant faire glisser son doigt sur ces touches, vers la gauche ou la droite, pour changer de chanson. La couche tactile se montre parfaitement réactive. En revanche, le plastique choisi par Sonos est très sensible aux traces de doigt dans ce coloris noir.
Au dos de l'enceinte se trouvent la prise d'alimentation, la fiche Ethernet (il y en avait deux sur la première Play:5), l'entrée audio mini jack et le bouton de détection de l'installation (pour l'installation), qui était, avant, situé sur le dessus. La prise casque a donc disparu. Pour ce qui est de la technique (Wi-Fi, formats gérés ou encore échantillonnages supportés), la nouvelle Play:5 est identique à l'ancienne. Les puristes déploreront donc le plafond à 48 kHz et 16 bits des équipements Sonos, quand la concurrence accepte bien souvent le 192 kHz sur 24 bits.
Toutefois, la grande force du système, c'est que la plupart des services de musique en ligne (pour ne pas dire la totalité) sont pris en charge. Et bien sûr, l'installation demeure un modèle de simplicité, à plus forte raison depuis que Sonos se greffe directement au Wi-Fi domestique, sans avoir à passer par un bridge ni à raccorder de câble.
Audio : elle ne manque pas de coffre !
Avant d'en venir au ressenti, parlons rapidement de l'architecture acoustique. La première génération de Play:5 embarquait cinq voix - un woofer, deux médiums et deux tweeters -, celle-ci passe sur six voix, avec trois mid-woofers de même taille (basses et médiums) et trois tweeters. Dans les deux cas, chaque voix est amplifiée indépendamment par un amplificateur de classe D. Sonos ne livre pas d'information sur le niveau d'amplification, mais on peut voir dans les vues éclatées respectives que les deux tweeters situés sur les bords de la nouvelle enceinte sont généreusement orientés vers l'extérieur. Sur la première Play:5, il y a beaucoup moins d'angle dans la disposition des voix.A gauche la 1ère génération, à droite la 2ème. On voit bien l'orientation donnée aux deux tweeters situés sur les côtés
Cet agencement a un impact direct sur la spatialisation sonore : la nouvelle Play:5 restitue une scène nettement plus large et ample que l'ancienne génération. Une aptitude qui permet de remplir plus facilement la pièce quand on crée une paire d'enceintes disposées à l'horizontale. Le rendu profite également à l'image stéréo quand les Play:5 sont à la verticale, avec un sweet spot étendu, plus facile à trouver et confortable. Dans ce domaine, l'amélioration est incontestable.
En matière d'équilibre sonore et de performances, on perçoit aussi des évolutions, en mieux, même s'il ne faut pas oublier que les Play:5 se sont toujours très bien défendues. Les basses apparaissent plus profondes et naturelles, moins « forcées » que sur la première génération. Ça saute aux oreilles, à tel point qu'on pourra trouver cette présence étonnante, voire parfois encombrante, sur des styles musicaux aimant la neutralité comme le jazz ou la musique classique.
Notre sonomètre placé à 1 mètre a relevé un pic à 106,6 dB sur la lecture d'un fichier de test contenant toutes les fréquences reproductibles. Ce n'est pas énorme, il n'y a en tout cas quasiment pas de gain par rapport à la première Play:5 qui sort 105,8 dB dans les mêmes conditions. Néanmoins, toute la plage de volume est exploitable et sur la fin, ça commence à bien swinguer. La tenue à haut volume sans distorsion reste un bon signe de qualité, et un gage d'efficacité pour remplir une grande pièce. Avec cette nouvelle Play:5, Sonos démontre encore plus de maîtrise qu'avant.
On n'observe pas de grande différence dans le registre des médiums, les anciennes Play:5 étaient tout de même un peu plus chaleureuses sur cette partie du spectre. Puis un nouvel écart se creuse sur les aigus, plus riches et détaillés sur la nouvelle enceinte. Cela contribue à procurer un ressenti de plus de précision, mais attention, sur certains arrangements (on a notamment buté sur Oceania de l'album Medulla de Bjork) les aigus en viennent presque à siffler. Est-ce qu'il fallait vraiment mettre trois tweeters ?
Trueplay et vrais défauts
Le dernier dispositif inauguré avec cette enceinte Sonos, c'est le Trueplay. Quèsaco ? Il s'agit d'un processus de calibrage des enceintes en fonction des caractéristiques acoustiques de la pièce d'écoute. Dans la pratique, on va dans les réglages sonores au sein de l'application Sonos, et on lance Trueplay. L'enceinte va ensuite émettre un son étrange durant quelques secondes pendant que l'utilisateur balade son iPhone (ça ne marche que sur iPhone pour l'instant), micro vers le haut, dans la pièce d'écoute. L'application va pouvoir interpréter l'acoustique et ajuster la reproduction en conséquence. Pour faire le test, nous avons placé les Sonos dans une pièce à l'acoustique plutôt mauvaise (plafond très haut, assez encombrée, etc.) et effectué le calibrage : « Trueplay a détecté que la position de votre enceinte n'a que peu d'influence sur la qualité du son. Seuls quelques réglages fins étaient nécessaires pour que vous puissiez profiter pleinement de votre musique. »Verdict à l'oreille ? Trueplay a effectivement atténué le niveau de basse et rehaussé le haut médium afin de limiter les fréquences qui rebondissent le plus. La signature ainsi modifiée, à peine moins enjouée, est alors plus appropriée à cette pièce qui a une tendance naturelle à produire de la réverbération. Maintenant, il faudrait pouvoir tester Trueplay dans une multitude de différents types d'environnements pour se faire une idée plus précise.
La Play:5 n'est pas exempte de défauts, et ce sont d'ailleurs les mêmes que sur la première génération : pas de bouton marche/arrêt (les enceintes consomment tout le temps), impossibilité de lui faire lire les sons d'un ordinateur (mis à part la bibliothèque musicale indexée), et... facture plus salée que jamais ! De 399 euros pour l'ancienne génération, on passe à 579 euros, soit 45 % d'augmentation. L'enceinte est meilleure, mais de là à justifier pareil surcoût, on reste dubitatif... A la liste des faiblesses, il nous faut aussi mentionner l'application Sonos propriétaire, qui se montre plus ou moins convaincante selon les services utilisés. Par exemple, la bibliothèque d'artistes créée au sein de Napster est bien accessible depuis l'interface de Sonos, mais pas celle de Spotify. Certes, l'application suédoise a fonctionné pendant longtemps par le biais de playlists, malgré tout, son adoption d'une bibliothèque remonte à avril 2014. Les utilisateurs de Spotify doivent donc continuer à faire des playlists... ou des recherches depuis Sonos...
Conclusion
Il était temps de mettre en retraite la première génération de Play:5, née ZonePlayer S5, et de passer à quelque chose de nouveau, plus moderne... Et si possible, qui sonne mieux, même s'il n'y avait pas trop à redire de ce côté-là. La nouvelle Play:5 est dans l'ensemble une réussite : elle est plus cossue, propose une modularité - à l'horizontale ou la verticale - bienvenue pour une enceinte sans fil et elle sonne mieux. Ce n'est pas tant sur le plan des performances que les progrès sont manifestes que sur celui de l'image sonore ou de l'équilibre. La nouvelle Play:5 remplit plus uniformément la pièce ; couplée à une congénère, la stéréo devient vraiment enveloppante et précise. Un beau travail de Sonos sur ce point.En matière de rendu, on retrouve la signature bien équilibrée de la marque, avec des graves qui ont gagné en densité comme en naturel, et des aigus plus riches qu'avant. Le médium reste bien étagé et sans coloration marquée. La résultante relativement neutre sied à la plupart des styles musicaux, même si sur du jazz, l'ancienne enceinte plus chaleureuse et moins marquée dans les basses semble plus adaptée. La Play:5 résiste toujours bien - et même mieux encore - aux incursions dans les hauts volumes, et c'est tant mieux parce que dans la première moitié de la jauge, les membranes ne bougent que timidement. Trueplay, le dispositif de calibrage, semble être une bonne idée, mais il est pour l'instant réservé aux iPhone et iPad.
Maintenant, il est dommage de constater que Sonos a réussi à améliorer les qualités de sa Play:5 mais n'a rien fait contre ses défauts. Toujours pas de bouton marche/arrêt, ni de lecture des sons d'un ordinateur en direct, une application propriétaire qui n'offre pas la même expérience en fonction des services utilisés et... un prix élevé de base qui subit une hausse de 45 % ! Il n'y a que la Denon Heos 7 qui soit plus chère encore. Et puis bien sûr, toutes les enceintes haut de gamme AirPlay (Harman Kardon, JBL, B&W, Klipsch, Geneva Sound, etc.). Reste à voir maintenant si ce regain d'appétit de Sonos ne va pas pousser les clients potentiels dans les bras de la concurrence plus abordable.