Retour à l'hiver 2019 ? Les ingénieurs de Boeing et ULA espèrent bien que non. © United Launch Alliance
Retour à l'hiver 2019 ? Les ingénieurs de Boeing et ULA espèrent bien que non. © United Launch Alliance

Plombé par de gros retards, le programme de Boeing revient enfin sur le devant de la scène avec ce test crucial à destination de l’ISS. Si le vol est un succès, les astronautes américains pourraient y prendre place pour la première fois d’ici l’hiver prochain pour des rotations régulières.

C’est le deuxième volet (un peu oublié) du « Commercial Crew ». 

Starliner de jeu 

En ce début de semaine, les amateurs et amatrices de spatial auront droit à une vue particulièrement rare depuis Cape Canaveral : la capsule CST-100 Starliner de Boeing, au sommet de son lanceur orbital Atlas V. Plus de 18 mois après un premier test largement considéré comme un échec, Starliner devrait cette fois décoller pour rejoindre l’ISS pour sa mission OFT-2 (pour Orbital Flight Test).

Les astronautes ont eu leur mot à dire pour valider le vol OFT-2 à venir, même si aucun d'entre  eux ne prendra place dans la capsule. © NASA/Kim Shiflett
Les astronautes ont eu leur mot à dire pour valider le vol OFT-2 à venir, même si aucun d'entre eux ne prendra place dans la capsule. © NASA/Kim Shiflett

Le lanceur Atlas V devrait décoller le 30 juillet à 20 h 53, dans une configuration particulière (N22) qui n’est utilisée que pour ce véhicule. Il dispose en effet de deux boosters auxiliaires, n’a pas de coiffe et utilise deux moteurs sur son étage supérieur Centaur, qui a la tâche difficile d’emmener Starliner précisément juste sous la limite de l’orbite basse (cette dernière doit se propulser rapidement pour hausser sa trajectoire). L’amarrage entièrement automatisé à la station spatiale internationale est prévu 24 h après le tir… Et la capsule ne vole pas tout à fait à vide : il y a le mannequin Rosie, et pratiquement 200 kg de fret à débarquer rapidement, car Starliner ne devrait rester que quelques jours. Elle devrait en effet repartir le 5 août, avant d’éjecter son module de service orbital et de venir se poser sous parachute dans le désert du Nouveau Mexique (États-Unis).

Tests et retests

Les responsables du programme continuent d’indiquer qu’il s’agit avant tout d’un vol d’essai, et qu’il prend place justement pour pouvoir valider les systèmes et identifier les dernières difficultés à corriger avant que des équipages puissent s’installer dans les sièges de Starliner. Quelques petits rouages grippés sont donc encore attendus, mais ils ne doivent pas mettre en péril la mission ni l’objectif de s’amarrer à l’ISS… Il s’agit d’un rappel bienvenu, car la mission « OFT-2 » est vue le plus souvent comme la réédition en plus appliqué du premier essai de Starliner, OFT-1, le 20 décembre 2019. Ce vol, catastrophique, n’avait finalement duré que 48 heures et la capsule n’avait pas rejoint la station : dès l’atterrissage, la NASA et Boeing lançaient une double investigation.

Le mannequin "Rosie" de Boeing attend patiemment le jour de son décollage. © Boeing/John Proferes

Cette investigation avait révélé plusieurs problèmes. Il y avait déjà les plus évidents, à savoir une erreur logicielle avec une horloge interne dans l’ordinateur de bord, menant à une mauvaise orientation de la capsule et une grave surconsommation des ergols. Ensuite, juste avant la séparation du module de service et le retour dans l’atmosphère, les équipes avaient dû corriger le programme, sans quoi la capsule aurait pu entrer en collision avec ce dernier… L’enquête avait ensuite révélé des manquements dans les vérifications du côté de Boeing mais aussi dans les procédures de test d’exigences de la NASA. Début 2020, l’audit de sécurité de l’agence allait recommander un second vol d’essai et les responsables de Boeing avaient préféré prendre les devants : c’est le géant américain de l’aérospatiale qui a pris entièrement le coût de cet essai (estimé à 410 millions de dollars) à son compte en acceptant la responsabilité des erreurs.

Plus d’un an après Bob et Doug…

Le vol OFT-2 a été retardé à plusieurs reprises, notamment à cause d’un calendrier très chargé de la Station Spatiale Internationale, et d’une disponibilité limitée de ses ports d’amarrage. En effet, la capsule Crew Dragon, déjà en service, occupe en permanence l’une des deux écoutilles adaptées à ces nouveaux véhicules, et les cargos Dragon viennent également s’y accrocher. La semaine dernière, l’équipage Crew-2 (dont fait partie Thomas Pesquet) a de nouveau enfilé les combinaisons de SpaceX pour « changer de place de parking » et s’amarrer sur le dessus de l’ISS : tous les voyants sont au vert pour l’arrivée de Starliner. Reste que même si le programme d’essai se termine par un éclatant succès, le véhicule de Boeing est terriblement en retard. Pour la NASA, ce n’est pas si grave puisqu’elle devrait disposer d’ici début 2022 de deux capsules habitées indépendantes à sa disposition… Mais pour le public, la bataille de l’accès à l’espace est terminée depuis mai 2020 et le premier vol habité de Crew Dragon. Reste à voir si Starliner suscitera autant d’intérêt !

Source : space.com