La question du salariat déguisé des travailleurs indépendants des applications de livraison ou de VTC se pose encore. Alors qu’Uber s’est fait recadrer à plusieurs reprises, notamment aux Pays-Bas et en Angleterre, c’est maintenant Deliveroo qui est dans le viseur de la justice en France.
Trois ex-dirigeants de la filiale française ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris pour « travail dissimulé ».
Uber sommé de salarier ses chauffeurs aux Pays-Bas
Deliveroo renvoyé en correctionnelle
Deliveroo et trois de ses ex-dirigeants, dont son ex-directeur général, sont convoqués devant le tribunal correctionnel de Paris selon des sources proches du dossier. Accusée d’avoir « dissimulé un grand nombre d’emplois » entre 2015 et 2017, la plateforme de livraison de repas et les trois anciens dirigeants sont cités à comparaître devant le tribunal du 8 au 16 mars 2022 pour « travail dissimulé ».
Une enquête préliminaire confiée à l'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) avait été ouverte en mai 2018 suite à un procès verbal de l’inspection du travail une année plus tôt. Cette dernière avait constaté que Deliveroo a « recouru à des milliers de travailleurs sous un prétendu statut indépendant via des contrats commerciaux » alors qu’ils étaient placés dans un lien de subordination juridique constant.
En France, une première contre une plateforme numérique
« Ces poursuites sont dans l’intérêt de la nation tout entière et pas d’un livreur en particulier. Les livreurs sont des victimes. Mais le préjudice nuit au pays en termes de cotisations sociales. Trois millions d’euros ont ici été saisis à titre conservatoire sur le compte bancaire de Deliveroo. C’est le premier procès de ce type en France qui concerne une plateforme numérique » a confié Kevin Mention, avocat représentant actuellement une centaine de coursiers ou ex-coursiers Deliveroo dans les colonnes de Ouest-France.
De son côté, l’application de livraison se montre confiante. « Toutes les décisions de justice rendues définitivement en France ont été favorables à Deliveroo France » a-t-elle indiqué à l’AFP. La plateforme indique aborder cette audience avec confiance. Elle entend « démontrer le caractère infondé » des faits et « continuera de plaider pour ce modèle qui correspond aux aspirations d’une immense majorité des livreurs partenaires ». L’avocat conteste ces propos et assure que « la mobilisation est forte et les coursiers seront nombreux à répondre à cet appel du pénal qui pourra les considérer comme victimes. » Rendez-vous en mars 2022 pour la suite de cette affaire.
Source : LeMonde, Ouest-France