La norme LTE (long term evolution) dite 3,9G (proche de la quatrième génération) permet en théorie des débits de données grosso modo cinq fois supérieurs à ceux de la troisième génération (3G). Cependant, il faut pour cela installer des équipements complémentaires qui coûtent extrêmement cher. Les investissements requis pour le réseau de NTT sont d'autant plus importants que la migration des clients nippons de la 3G à la norme LTE se fait très rapidement, via l'achat de smartphones compatibles, ce que sont tous les nouveaux modèles proposés.
Au Japon, les réseaux 2G (équivalents du GSM européen) sont inactivés depuis des années, tous les clients ayant vite migré vers la 3G qui a été ensuite élevée en modes HSDPA/HSUPA. Actuellement environ 70% des abonnés du pays (tous opérateurs confondus) utilisent cette 3G et 30% déjà la norme LTE qui a d'abord été déployée dans les grandes agglomérations (Tokyo, Nagoya, Osaka). NTT Docomo a déjà installé 55.000 stations de base (antennes-relais) à la norme LTE et prévoit d'en poser pas moins de 40.000 de plus dans l'année pour couvrir en LTE toute la zone qui est déjà desservie en 3G, précise le Nikkei. NTT Docomo contrôle environ 45% du marché des mobiles au Japon.
Ses principaux rivaux, KDDI et SoftBank Mobile, investissent aussi énormément dans leurs infrastructures LTE. Le premier vise un nombre de 94.000 stations de base LTE à partir de cet été, et SoftBank Mobile, qui en avait déjà 71.000 fin octobre dernier, envisage aussi une augmentation pour se rapprocher de 100.000, selon le Nikkei. Les analystes du secteur disent en général que les opérateurs nippons dépensent pour leurs réseaux au moins deux à trois fois plus d'argent que leurs homologues étrangers, non uniquement parce qu'ils veulent des infrastructures meilleures mais aussi parce que les contraintes démographiques (centration dans les villes) et géographiques (séismes, typhons, tornades, etc.) les y obligent.
L'usage croissant des infrastructures cellulaires force les opérateurs à sans cesse repenser leur conception pour en maintenir ou si possible améliorer les performances malgré la montée en charge. Le Japon, qui compte environ 127 millions d'habitants, totalise un nombre supérieur d'abonnements à des services mobiles, un nombre croissant de clients possédant plusieurs appareils (smartphones, tablettes) régis par autant de contrats.
Qui plus est, les clients vont et viennent entre plusieurs opérateurs qui ne savent qu'imaginer pour piquer les abonnés du voisin. A part pour ceux qui ont un intérêt professionnel à se tenir au courant, pour les autres, c'est tellement compliqué de suivre que la plupart y ont renoncé. La preuve ? Lisez la suite.
Il y a quelques jours, le portail internet nippon Yahoo! Japan, filiale du géant local des télécommunications SoftBank, a annoncé le rachat d'une firme de services mobiles du même groupe, eAccess, pour 324 milliards de yens (2,3 milliards d'euros). eAccess, qui doit propose les services eMobiel et doit fusionner prochainement avec une troisième société affiliée à SoftBank, Willcom, est censé devenir un levier pour permettre à Yahoo! Japan d'accélérer la croissance des services internet pour smartphones et mobiles. Vous suivez ? SoftBank contrôle 42,2% des droits de vote au sein de Yahoo Japan et est ainsi de facto "sa maison-mère".
eAccess, qui avait pour sa part été racheté début 2013 par SoftBank, propose des services cellulaires sous la marque eMobile et doit former en juin avec Willcom un ensemble comptant plus de 10 millions d'abonnés mobiles, en 4e place au Japon. Willcom avait quant à lui été tiré de la faillite en 2010 par SoftBank qui, après une période de redressement judiciaire, l'a transformé en filiale en juillet 2013.
En prenant 99,7% de l'ensemble eAccess/Willcom (33,3% des droits de vote), Yahoo Japan veut devenir un "opérateur d'internet", privilégier les offres d'échanges de données via le réseau devant les communications vocales.
"En promouvant un usage accru d'internet sur les smartphones et tablettes, nous allons contribuer à l'expansion du marché publicitaire et des ventes de contenus en ligne", explique Yahoo Japan. Cette nouvelle opération au sein du groupe SoftBank rend encore plus complexe le schéma de ses activités, mais le fondateur et grand patron de l'ensemble, Masayoshi Son, a lui une vision claire de son objectif: faire de son groupe le numéro un du secteur.
Son ambition ne s'arrête pas au Japon puisqu'il a acquis l'an passé le numéro trois des services mobiles aux Etats-Unis, Sprint, et se démène actuellement pour obtenir des autorités américaines le droit de racheter aussi le quatrième, T-Mobile US.
Dans cette jungle des télécoms, non seulement les clients ne s'y retrouvent plus mais les concurrents parfois s'allient pour défendre... la concurrence.
C'est ainsi que cette semaine aussi, SoftBank, KDDI, eAccess et une soixantaine d'autres acteurs japonais de l'univers des télécommunications et services en ligne sont allés se plaindre auprès du ministère japonais de la Communication (qui fait office d'autorité de régulation), craignant un retour de monopole de l'ex-géant public tentaculaire NTT si la règlementation le concernant était assouplie. Ces opérateurs et fournisseurs d'accès s'inquiètent des projets du gouvernement qui aurait l'intention maligne de revoir les modalités réglementaires encadrant NTT, société privatisée découpée en différentes entités mais qui détient d'importantes parts de marché dans ses différentes activités.
"Si, comme il semble y songer, l'Etat autorisait NTT à proposer des offres groupées pour plusieurs de ses services gérés par des entités différentes, il deviendrait extrêmement difficile pour le client de changer d'opérateur pour l'un des services car cela l'obligerait à rompre un contrat qui englobe tous les autres", a expliqué à la presse un responsable de SoftBank Mobile. Cette captation de clients serait selon lui de facto difficile à combattre par les concurrents ayant moins d'emprise, dit-il.
"Si avant même qu'un large débat soit ouvert, le ministère de la Communication a décidé l'orientation voulue, comme le laissent supposer des articles de presse, c'est un vrai problème", insistent les protagoistes
NTT est légalement devenu un groupe de droit privé en 1985, avec différentes filiales pour ses diverses activités qui sont censées agir indépendamment les unes des autres et sont tenues de faire jouer la concurrence.
Pour éviter que NTT ne soit trop puissant et dominant, il est soumis à plusieurs interdictions: ses filiales ne peuvent par partager des données de clients ni s'accorder entre elles des priorités ou privilèges lors de la mise en concurrence.
Toutefois, malgré ces mesures préventives, NTT est un mammouth de 827 sociétés qui emploient 227.000 salariés et qui conserve rien que 76% du marché japonais de la téléphonie fixe, 72% des accès à internet par fibre optique (FTTH), 62% du trafic de données entre entreprises et 45% du marché des services mobiles.
"Si en assouplissant les règles, on autorisait ce qui est aujourd'hui interdit à NTT, cela entraînerait un rétablissement du monopole" dont l'opérateur historique jouissait avant sa privatisation, avertissent les rivaux.