D'aucuns ont du Japon l'image d'un pays où les humains cohabitent avec les robots: la réalité est bien différente. Si les Japonais sont effectivement bien disposés à l'égard des engins mécatroniques, s'il y a quantité de machines automatiques un peu partout dans l'archipel et si les robots-ouvriers sont en effet extrêmement nombreux dans les usines, les fameux androïdes ou semi-androïdes ne peuplent encore que quelques centres de recherche. Pourtant, un homme, Masayoshi Son, affirme que cela va changer d'ici peu, qu'à l'instar de l'ordinateur le robot sera demain dans tous les foyers, et que ce demain commencera dans quelques mois.
M. Son, PDG du groupe de télécommunications SoftBank, homme le plus fortuné du Japon, est sincèrement persuadé qu'il va réussir à faire entrer son robot "Pepper" dans les maisons des Japonais, grâce à un prix de moins de 1.000 euros. Rappelons que Pepper n'est autre qu'un semi-androïde à roulettes initialement conçu par la société française Aldebaran dont SoftBank a pris le contrôle avant de créer récemment SoftBank Robotics, qui a pris en charge "les activités de robots et services afférents de SoftBank Mobile pour accélérer les développements en vue de lancer Pepper pour le grand public en février 2015", dixit SoftBank.
SoftBank Robotics, dont l'établissement est daté du 24 juillet, va collaborer avec diverses entreprises, a encore précisé la firme.
Certains disent que Pepper n'est ni plus ni moins qu'un iPad sur roulettes (le fait est que son ventre est un iPad), mais M. Son, lui, affirme sans sourciller qu'il s'agit du premier robot au monde à être capable de comprendre les sentiments et états d'âme de son interlocuteur humain. En fait, pour le moment, Pepper donne surtout l'impression d'être très très malin, capable d'orienter totalement une conversation dans le sens voulu, sans réellement tenir compte des mots de celui qui lui fait face.
Il n'empêche, M. Son prétend encore que plus Pepper se frotte aux humains, plus il apprend. Mieux, tous les les Pepper sont connectés en réseau et capables de partager leurs connaissances, ce qui est indéniablement un avantage réel si l'on compare par exemple au mode d'apprentissage solitaire qui était celui du robot-chien Aibo de Sony.
La troisième particularité de Pepper est d'être une plateforme ouverte qui permet a priori à tous les développeurs motivés de concevoir des programmes pour le faire évoluer, un mode qui a déjà fait ses preuves dans les sytèmes d'exploitation et applis pour smartphones, entre autres.
Pour mieux en convaincre le grand public, SoftBank a installé des Pepper dans plusieurs de ses boutiques au Japon et commencé une campagne de prêt à quelques particuliers. Certains de ceux qui ont été sélectionnés par tirage au sort se sont amusés à faire faire à Pepper des trucs aussi inattendus que monter dans un taxi, prendre le métro ou marcher dans la rue.
Mais peut-être la popularité du robot va-t-elle aussi provenir des partenariats qui vont permettre de les disperser un peu partout.
La filiale japonaise du groupe suisse Nestlé a ainsi annoncé il y a quelques jours qu'elle allait embaucher 1.000 robots Pepper comme vendeurs de machines à café. "C'est la première fois qu'autant de robots seront utilisés dans des commerces", a assuré Nestlé.
Les "Pepper" en question seront dépêchés à partir de décembre dans les grandes surfaces spécialisées et autres boutiques où sont proposées les machines à café et dosettes Nestlé.
"C'est nous qui avons approcher SoftBank pour ce projet car nous pensons que c'est un moyen de rendre nos produits plus attractifs", nous a expliqué une porte-parole de Nestlé au Japon, un marché on ne peut plus important pour le groupe suisse. Pepper est capable de donner des explications sur les différents articles de façon interactive en dialoguant quasi naturellement avec les clients. Il est ainsi censé les conseiller sur les différents articles proposés en fonction de leurs besoins et goûts. De plus, plusieurs Pepper peuvent mutuellement se transmettre ce que chacun a appris, et réagir plus adroitement vis-à-mis de chaque interlocuteur.
Nestlé Japan table aussi sur le côté ludique de Pepper, qui ne manque pas d'humour et devrait s'ingénier à interpeller le chaland pour l'attirer jusqu'au coin machines à café des magasins d'électroménager.
Autant dire que SoftBank se réjouit de cette première opération d'ampleur avec Pepper, pariant sur un grand succès tandis que les Cassandre lui garantissent un flop.
"Le but de SoftBank est de rendre les gens heureux grâce à la révolution de l'information", répète souvent Masayoshi Son, gourou des télécoms qui ne cessent de rappeler tous les échecs qu'ont lui promettait et qui se sont avérés être des succès.