Dans ce contexte, Rethink peut être traduit par « réfléchissez-y à deux fois » : le projet de Trisha Prabhu, une adolescente de 14 ans qui participe à la Google Science Fair 2014, propose aux internautes de se confronter aux messages qu'ils écrivent avant de les publier. L'objectif visé : cibler les agresseurs virtuels et autres trolls du Web pour les faire réfléchir aux commentaires potentiellement blessants qu'ils s'apprêtent à publier.
L'adolescente, qui se présente comme « fascinée par les sciences du comportement et en particulier par la psychologie, la psychobiologie, et les sciences cognitives », n'en est pas à son coup d'essai. L'année dernière, elle s'était déjà distinguée lors d'une foire à la science de son collège en présentant un logiciel visant à limiter la distraction des automobilistes au volant. Par la suite, elle a décidé de prendre part au concours de Google en s'intéressant à la question du harcèlement en ligne. « En utilisant mes compétences scientifiques et technologiques, je suis déterminée à trouver une solution efficace à long terme qui permettrait de lutter contre le cyber-harcèlement » explique-t-elle.
« Des recherches montrent que les adolescents qui publient un message haineux ne réalisent pas toujours les conséquences de leurs actions, étant donné que le cortex préfrontal, la partie du cerveau qui contrôle le raisonnement et la prise de décision, n'est pas complètement développé avant l'âge de 25 ans » ajoute-t-elle. L'une des solutions, pour elle, est donc de les confronter à leur message, pour entraîner une prise de conscience. « Si les adolescents disposaient d'un mécanisme d'alerte leur suggérant d'y penser à deux fois avant d'envoyer volontairement un message d'insultes sur les réseaux sociaux, le nombre de messages haineux que les jeunes publieraient délibérément serait moins élevé que celui envoyé par des ados n'ayant pas de mécanisme d'alerte. »
L'adolescente a, dans cette optique, développé un prototype nommé Rethink, qui a été testé auprès de 300 adolescents de 12 à 18 ans. L'expérience a été divisée en deux parties : 750 essais de publication ont été réalisés avec un système traditionnel, et 750 autres avec Rethink. Dans le premier cas, les adolescents étaient prêts à publier des messages blessants dans 504 essais, soit 67,2% : comme il n'y avait aucun contrôle, les messages ont donc été postés sur les réseaux sociaux. Durant l'expérience avec Rethink, 533 messages sont ressortis comme blessants sur 750 (71,07%), mais, suite à la relecture de ces commentaires, 498 des 533 messages n'ont finalement pas été publiés par les adolescents, soit 93,43%. « Cela réduit la volonté générale à poster des messages blessants à hauteur de 4,67% avec Rethink, alors que sans, 71,07% auraient été postés. »
Trisha Prabhu estime avoir prouvé l'efficacité de sa proposition, et espère désormais qu'elle intéressera les réseaux sociaux. « Mon idée est de créer un système évolutif qui fonctionnerait avec les applications et services existant déjà, et s'adapterait aux nouvelles plateformes disponibles à l'avenir. Ma conception comprend un système de filtrage contextuel sophistiqué, capable de détecter les messages dits nuisibles » détaille l'adolescente, qui a de la suite dans les idées.
Le projet Rethink a piqué l'intérêt de Google, puisqu'il compte parmi les 15 finalistes de la Science Fair 2014. Le projet gagnant sera annoncé en septembre prochain : parmi les dotations, on trouve un chèque de 50 000 dollars et une visite du port spatial de Virgin Galactic.