Alors que Vivlio lançait il y a quelques semaines la première liseuse à écran couleur de France, Bookeen tente de son côté une approche radicalement différente avec la Notéa. En effet, cette liseuse électronique est la première au format 10’’ à faire son arrivée sur le sol français. Mais fait-elle le poids face aux modèles asiatiques maintenant très matures ? C’est ce que nous allons voir en confrontant la Bookeen Notéa et la Boyue Likebook P10.
- Excellentes finitions
- Polyvalence d’Android
- Belles performances
- Plus qu’une simple liseuse !
- Connectique anémique
- Définition d’écran un peu faible (mais pas si gênant sur ce type de format)
- Pas de stylet inclus
- Pas de gyroscope
Face aux géants Amazon et Kobo, deux marques françaises luttent depuis des années pour imposer leur savoir-faire dans le domaine de la lecture numérique : Vivlio et Bookeen. Leur approche différente, plus ouverte et souvent plus originale leur a permis de perdurer et d’attirer dans leur giron de nombreux fans. On se souviendra par exemple de la Diva HD, une liseuse renforcée pleine de potentiel malgré ses défauts de jeunesse.
Quitte à faire dans l’originalité, Bookeen vient de lancer une machine unique en son genre dans le commerce hexagonal : la Notéa. Ici, point d’écran couleur comme cela semble être à la mode. On part à la place sur une liseuse de très grand format – plus de 10’’ - dont la principale vocation est la prise de notes. Un concept qui n’a rien de nouveau, puisqu’il est porté depuis plusieurs années par des célébrités comme Remarkable et de nombreuses marques asiatiques comme Onyx ou encore Boyue. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y aura plus besoin de passer par l’import pour profiter d’un grand écran E-Ink dans nos contrées !
La sortie de la Bookeen Notéa est d’ailleurs l’occasion idéale pour lancer un petit comparatif avec la Likebook P10 testée dernièrement dans nos colonnes. De l’écran à la lecture en passant par la prise de notes, nous avons passé au crible ces deux e-readers durant plusieurs jours. Il est temps de vous livrer nos impressions.
Fiche technique de la Bookeen Notéa
Bookeen est une société française qui possède une certaine expérience dans la lecture électronique. Les amateurs de la marque se rappelleront certainement avec un brin de nostalgie des modèles Cybook et Saga. Plus récemment, la société parisienne lançait dans la nature ses Diva et Diva HD, les liseuses les plus originales de leur époque.
Il semble d’ailleurs que la marque française souhaite continuer à faire souffler ce vent d’originalité avec la Notéa. Première liseuse très grand format de Bookeen, la belle se destine à la prise de notes et au dessin numérique. Une première sur le marché français, mais finalement rien de bien impressionnant face aux modèles asiatiques qui sont maintenant très matures.
Comparons donc les fiches techniques des Notéa et Likebook P10 :
- Écran : 10.3’’ vs. 10’’
- Définition : 1404 x 1872 px (227 ppi) vs. 1200 x 1600 px (200 ppi)
- Stockage interne : 32 Go vs. 64 Go
- SoC : quad-core 1.8 GHz vs. Quad-core 1.5 GHz
- RAM : 2 Go vs. 2 Go
- Connectique : USB-C, Wi-Fi b/g/n, Bluetooth 4.2 vs USB-C, Wi-Fi a/b/g/n/ac, Bluetooth 5.0
- Système d’exploitation : Android 8.1 vs. Android 8.1
- Gyroscope : oui vs. non
- Dimensions : 191.1 x 232.5 x 8 mm vs. 178 x 239 x 8.5 mm
- Poids : 460 grammes vs. 458 grammes
- Stylet inclus : oui vs. Non
- Prix : 399€ vs. 225€
Techniquement, la Notéa est très proche de sa cousine asiatique : gabarit similaire, même OS, puissance quasi-identique… La liseuse française a toutefois l’avantage d’être fournie avec un stylet tactile Wacom alors que la P10 impose un investissement supplémentaire pour s’équiper d’un tel accessoire. En même temps, la liseuse de Boyue est presque deux fois moins chère que sa comparse. Elle est aussi commercialisée avec une housse de protection.
Maintenant que les présentations sont faites, il est temps de passer aux choses sérieuses. Qui de Bookeen ou Boyue nous propose la meilleure liseuse grand format ? C’est ce que nous allons tenter de départager dans ce versus.
Design et finitions : avantage Likebook P10
Vous avez l’impression d’avoir déjà vu la Notéa quelque part ? Vous ne vous trompez pas : la liseuse française ressemble comme deux gouttes d’eau à la Remarkable 2. Elle en reprend donc le look asymétrique avec un côté gauche qui fait office de poignée, un peu comme sur la Kobo Forma. La prise en main se révèle très agréable, surtout que malgré sa taille supérieure à la P10 la Notéa fait quasiment le même poids.
De son côté, la liseuse chinoise se montre plus basique. Elle ressemble à une tablette tactile moyen de gamme. Contrairement à la Bookeen, elle intègre un bouton qui permet de revenir au menu précédent. Le dos est orné de rainures anti-dérapantes, ce qui permet une prise en main plus sécurisée qu’avec la Notéa qui est relativement glissante.
C’est finalement sur les finitions que se creuse l’écart. Et la Notéa commence ainsi à montrer ses premiers défauts, à savoir des finitions de piètre qualité. Les plastiques sont très fins. La coque s’enfonce quand on appuie un peu dessus. Mais le plus regrettable, c’est carrément de voir la coque qui bouge sur le bord de l’écran. En cas de chute, il y a peu de chances que la Notéa en sorte intacte…
A contrario, la Likebook P10 se révèle quasiment parfaite. La coque est moulée d’un seul bloc. On ne sent aucune zone sensible, les plastiques étant très rigides. Un véritable travail d’orfèvre qui permet à cette liseuse chinoise de se démarquer de sa comparse hexagonale bien plus fragile.
Écran et éclairage frontal : match nul
L’écran est clairement la partie la plus importante d’une liseuse. Il se doit d’être de bonne qualité, de même que l’éclairage frontal. Ça tombe bien, nos deux concurrentes s’en tirent très bien de ce côté-là !
La Notéa est celle qui offre la plus grande surface d’affichage avec une dalle bord-à-bord de 10.3’’. Sa définition est aussi plus élevée que sur la P10, grimpant à un honnête 227 ppi. C’est moins élevé que le standard haut de gamme des liseuses plus petites, fixé à 300 ppi, mais largement suffisant pour contenter tous les utilisateurs. Il est impossible de distinguer les pixels à moins de visionner de très petits caractères.
La Likebook P10 fait un peu moins bien avec sa dalle de 10’’ qui se contente d’une définition de 200 ppi. À l’usage, elle reste quand même très confortable pour les yeux. L’écran bord-à-bord est d’ailleurs protégé par un film, ce qui n’est pas le cas de la machine française. Celui-ci confère un toucher granuleux à la liseuse, mais on s’y habitue vite. Le film de protection n’entrave pas non plus l’utilisation du stylet.
Jetons maintenant un œil à l’éclairage frontal, élément indispensable de toute liseuse qui se respecte en 2021. Nos deux concurrentes font ici jeu égal en offrant un éclairage réglable en intensité et en couleur. La nuit venue, il est donc possible de passer sur une luminosité plus orangée, moins fatigante pour les yeux. Les deux machines offrent une belle uniformité dans l’affichage, chose peu aisée sur une dalle de 10’’ et plus. Quel que soit votre choix, vos yeux seront à l’aise !
Interface et logiciel de lecture : avantage Likebook P10
Android est un système d’exploitation très polyvalent. Pas étonnant qu’on le retrouve sur les liseuses grand format, souvent très proches des tablettes tactiles dont elles s’inspirent. Mais bien que la Notéa et la P10 utilisent une même base, à savoir Android 8.1, c’est la machine asiatique qui se démarque.
La liseuse électronique de Boyue se révèle ainsi bien plus complète et personnalisable que sa concurrente, malgré des traductions plus approximatives. À l’usage, on remarque vite que la P10 va plus loin que la Notéa, en particulier sur son logiciel de lecture. Ce dernier est très similaire sur les deux liseuses, mais celui de la machine asiatique est plus complet. Il permet ainsi d’utiliser des polices tierces et des dictionnaires, ce qui n’est pas le cas de la Notéa. De plus, la P10 ne souffre pas des irritants défauts de césure de la machine française qui rendent la lecture peu agréable. C’est sans conteste la P10 qui remporte le match pour ce qui est du confort de lecture. Notons quand même que la Notéa est équipée d’un gyroscope, ce qui permet de basculer facilement l’affichage en cas de besoin. Un petit plus pour le confort, mais qui ne rattrape malheureusement pas la pauvreté de la partie lecture.
Android oblige, les deux machines sont équipées du Play Store. Si la P10 offre un accès immédiat au magasin de Google, il faut passer par une phase de vérification assez lourde sur la Notéa. Nous avons dû patienter plus de 24h avant de pouvoir profiter du Play Store sur la liseuse de Bookeen…
Une fois cet écueil passé, on peut profiter pleinement de la Notéa. Celle-ci intègre nativement l’application mobile Bookeen, contrairement à la P10 qui n’est liée à aucun magasin. Le souci, c’est que l’interface de l’appli Bookeen est adaptée aux écrans de petite taille, ce qui rend son usage peu agréable sur la Notéa. On remarque aussi quelques petits points géants comme les couvertures des livres qui ne s’affichent pas dans la bibliothèque ou l’absence de barre de notification. Gageons que de futures mises à jour amélioreront les choses. En l’état, la Notéa est malheureusement assez pauvre en tant que liseuse Android pure et fait un peu trop « prototype »…
Prise de notes : avantage Likebook P10
Si la lecture reste le principal objectif de toute liseuse électronique, les plus grands modèles du marché ont aussi une autre utilité : la prise de note. Le large écran se révèle en effet très pratique pour compulser des PDF et les annoter. La technologie E-Ink apporte un confort indéniable dans ce domaine, évitant les reflets inhérents aux écrans IPS et AMOLED qui équipent les tablettes tactiles.
Bokeen Notéa et Likebook P10 sont donc équipées de logiciels taillés pour la prise de note. La machine française est même fournie avec un stylet Wacom, contrairement à sa concurrente qui nécessite un achat séparé. De plus, la liseuse chinoise n’est pas compatible avec le matériel de chez Wacom, d’où son prix bien plus abordable.
Quelle que soit la liseuse utilisée, on profite plus ou moins des mêmes possibilités en termes de prise de note. Le logiciel de chacune permet de choisir parmi une large sélection d’arrière-plans et d’en ajouter d’autres manuellement si besoin. On a le choix entre plusieurs mines et épaisseur de trait. On peut ajouter des formes, des photos et du texte numérique. Et une fois le travail terminé, chacune des liseuses permet de partager les notes via Bluetooth, Google Drive, Evernote ou autre logiciel compatible.
Les différences sont au final très minces. La P10 permet de choisir plusieurs couleurs de trait là où la Notéa propose trois types de mines au lieu de deux. La P10 est plus réactive mais la Notéa propose une interface plus agréable à l’œil. Difficile de départager les deux machines qui assurent très bien le job !
L’e-reader chinois va toutefois un peu plus loin que la Notéa grâce à la possibilité d’annoncer les fichiers EPUB. Vous pouvez en effet griffonner directement sur une page de roman ou alors utiliser le mode double-page afin d’avoir d’un côté de l’écran le texte numérique et de l’autre un espace vierge pour dessiner ou prendre des notes. Ce dernier système n’est toutefois pas des plus agréables à utiliser, la faute à l’absence de gyroscope sur la P10. Cela n’empêche toutefois pas la machine chinoise de prendre encore un peu d’avance sur sa concurrente française.
Stylet tactile : avantage Bookeen Notéa
Il faut bien l’avouer, la Notéa est en difficulté par rapport à son homologue asiatique depuis le début de ce versus. Elle se rattrape néanmoins grâce à la qualité de son stylet tactile, conçu par Wacom. Ce n’est pas bien difficile en même temps, vu qu’aucun stylet n’est fourni avec la P10…
L’accessoire proposé par Bookeen se révèle très agréable à l’usage. Il dispose de deux modes de fonctionnement : actif via Bluetooth ou passif si le stylet est déchargé/déconnecté. Le Bluetooth apporte un confort supplémentaire car il permet d’interagir directement avec la liseuse grâce aux boutons sur la tranche de l’accessoire. Vous pouvez même mettre en veille la Notéa d’un simple appui sur un bouton du stylet.
L’écriture est très fluide, quasiment similaire à celle qu’on peut avoir avec une tablette tactile. Les pressions sont très bien détectées, c’est un vrai plaisir que d’écrire ou dessiner avec cet accessoire. Dommage que son autonomie soit limitée à quelques jours et qu’il ne soit pas magnétisé afin de s’accrocher au bord de la liseuse française…
Du côté de la P10, aucun stylet n’est fourni. Vous devrez donc vous en procurer un séparément. Votre confort d’écriture dépendra grandement de sa qualité. Le modèle fourni lors du test de la P10 nous avait peu convaincu à cause de sa forte latence et de l’absence de fonction gomme. Inutile d’investir dans un stylet Wacom, la machine chinoise n’est compatible qu’avec les modèles capacitifs basiques. Au moins, ça vous laisse le choix des armes !
Performances : match nul
Contrairement aux tablettes les plus modernes, les liseuses grand format ne sont pas des foudres de guerre équipées de processeurs haut de gamme. Ces appareils se contentent de SoC souvent datés de plusieurs années et de faibles quantités de RAM. Il n’est pas nécessaire d’en avoir plus étant donné que le très faible taux de rafraichissement des écrans E-Ink empêche de vraiment profiter des grosses configurations.
Pour le coup, nos deux concurrentes sont très proches. Elles embarquent 2 Go de RAM et des processeurs quad-core d’ancienne génération. Elles sont donc au coude-à-coude pour ce qui est des performances pures.
On constate quand même une meilleure réactivité de la P10 dans l’utilisation du logiciel de prise de notes. De son côté, la Notéa nous offre une interface globale un peu plus véloce. Dans les deux cas, ce sera suffisant pour profiter de vos applications de lecture préférées, naviguer un peu sur le web et écouter de la musique. Vu les usages très spécifiques de ces liseuses, c’est plus que suffisant. On a plus de réactivité que sur les liseuses de type Kindle Paperwhite, Kobo Forma ou Vivlio InkPad 3.
Autonomie : match nul
Il est temps de clore ce versus. Mais avant ça, jetons un dernier coup d’œil à l’autonomie de nos deux rivales. Si vous avez déjà utilisé des liseuses, vous savez que ces appareils sont taillés pour tenir la charge durant trois ou quatre semaines. Pour les modèles Android, c’est un peu différent.
Le système d’exploitation de Google est assez gourmand en ressources en comparaison des systèmes propriétaires développés par Kindle, Kobo et consorts . De plus, les liseuses grand format doivent non seulement composer avec un plus grand écran – donc gros besoin en énergie – et une connectique plus vaste : Wi-Fi, Bluetooth, haut-parleurs…
L’autonomie chute donc environ à une semaine d’usage, aussi bien pour la Notéa que pour la P10. C’est toujours mieux qu’une ardoise Android ou un iPad, mais largement moins bon qu’une petite liseuse propriétaire. La durée d’utilisation dépendra bien entendu de vos usages. Si vous faites appel à Tidal et à un casque Bluetooth pendant que vous dessinez, les deux liseuses perdront bien plus d’énergie que si vous lisiez sans activer Bluetooth et Wi-Fi.
C’est dans tous les cas un match nul pour nos deux rivales. Il est donc temps de passer à la conclusion de ce versus grand format !
Bookeen Notéa vs. Boyue Likebook P10 : le verdict de Clubic
On aurait pu croire que la dernière production de Bookeen remporterait haut la main ce versus, foulant du pied sa concurrente chinoise. Hélas, il n’en est rien, bien au contraire. Après plusieurs jours de test, la liseuse française nous aura laissé un petit arrière-goût d’inachevé…
Entre une conception très cheap, un logiciel de lecture minimaliste et une interface pas toujours bien pensée, la Notéa a vraiment du mal à convaincre en tant que liseuse. Elle ne se rattrape in extremis que grâce à la partie prise de notes et l’excellent stylet Wacom qui l’accompagne. On pourra arguer que c’est son objectif principal, mais même à ce petit jeu la P10 se montre à la hauteur pour peu qu’on investisse dans un stylet de qualité.
Il nous est donc difficile de recommander la Notéa pour le moment. Bookeen va devoir mettre les bouchées doubles pour améliorer sa liseuse. Tout comme la Diva HD à son époque, la Notéa semble sortie trop tôt. À 399€ la liseuse, la pilule est dure à avaler sachant que la machine de Boyue est commercialisée à moins de 230€ de son côté et présente bien plus d’avantages : meilleures finitions, logiciel de lecture plus abouti, personnalisation poussée des divers éléments du système… Si vous arrivez à passer outre les traductions bancales de la liseuse chinoise, elle saura vous amener bien plus loin que la Notéa, que ce soit pour la simple lecture ou la prise de notes manuscrites. La balle est maintenant dans le camp de Bookeen pour faire aussi bien, voire mieux que sa concurrente dans les mois à venir. Le potentiel est là, il ne reste qu’à le mûrir !
La liseuse Likebook P10 est une machine qui ne conviendra clairement pas à tous les publics. Si vous voulez un e-reader clé en main et simple d’usage, passez votre chemin pour aller du côté de Kobo et Amazon.
Par contre, si vous être prêt à mettre les mains dans le cambouis, alors la dernière-née des Likebook devrait vous séduire. Il faudra certes passer l’éponge sur une interface traduite avec les pieds, mais le jeu en vaut la chandelle. Cette liseuse Android améliore ce qui pêchait sur les précédents modèles de la marque asiatique en devenant plus efficace pour la partie lecture. Android permet une polyvalence sans précédent grâce à un accès aux meilleures applications de lecture du moment.
La prise de notes est un peu plus en retrait, la faute à l’absence de stylet digne de ce nom. On sent bien que Boyue a centré sa P10 sur la lecture avant tout. Magazines, mangas, BD et comics ne résisteront pas à cette machine finalement très abordable dans un marché où les modèles équivalents s’affichent à plus de 400€. Il sera difficile de trouver mieux en format 10’’ pour de la lecture électronique !
- Excellentes finitions
- Polyvalence d’Android
- Belles performances
- Plus qu’une simple liseuse !
- Connectique anémique
- Définition d’écran un peu faible (mais pas si gênant sur ce type de format)
- Pas de stylet inclus
- Pas de gyroscope