Apple TV+ voulait, elle aussi, sa grande série de science fiction. Mais pour lutter face à The Expanse, Star Wars et autres Star Trek, il fallait frapper fort, quitte à prendre des risques. C'est donc sur la saga aussi culte que complexe Fondation, d'Isaac Asimov, que la firme a jeté son dévolu.
Pour quel résultat ? C'est ce que nous allons voir tout de suite.
- Vous aimez la grande science-fiction
- Vous voulez en prendre plein les yeux
- Les adaptations qui prennent des libertés ne vous dérangent pas
- Vous êtes allergique à la science-fiction
- Vous n'aimez pas les séries aux directions ambigues
- Vous voulez une adaptation à la lettre
Accompagnez la lecture de cet article avec la musique de la série :
Fiche technique Foundation
Genre | Science-Fiction, Drame |
Réalisation | Josh Friedman, David S. Goyer |
Editeur | Skydance Television, Phantom Four production |
Plateforme | Apple TV+ |
Nombre de saisons | 1 |
Nombre d'épisodes (Total) | 10 |
Classification | Déconseillé / interdit aux moins de 12 ans |
Foundation : yes, no, maybe, I don't know, can you repeat the Seldon ?
Alors que l'Empire galactique humain domine les étoiles grâce, notamment, à une lignée de clones au pouvoir depuis des siècles, un homme, le Docteur Hari Seldon, prédit la chute imminente du système. Grâce à la psychohistoire, une science mathématique capable de calculer les événements futurs, Seldon parvient à convaincre l'Empereur de bâtir une Fondation où sera conservé tout le savoir de l'humanité, pour pouvoir la reconstruire après cette catastrophe inévitable.
Après la diffusion de ses deux premiers épisodes, ma confiance en cette adaptation de Fondation était assez élevée, et plus encore après l'annonce d'une future saison 2. Mais à l'issue des 10 épisodes de cette première saison, le doute est de mise.
L'œuvre culte d'Isaac Asimov fait partie de ces sagas de SF réputées impossibles à adapter. Et dans les faits, la série invoque peu de réminiscences des livres… Mais c'était assez inévitable.
Si vous connaissez le matériau original, vous savez que Fondation est une œuvre assez lente, qui se déroule sur une gigantesque période temporelle, qui est peu portée sur l'action et… plutôt abstraite, ce qui n'est jamais aisé à porter à l'écran. Un concept aussi flou et peu visuel que les « mathématiques capables de prédire l'avenir » est un véritable casse-tête à introduire, et les équipes de David S. Goyer et Josh Friedman (qui comptent d'ailleurs dans leurs rangs Robyn Asimov, la fille de l'auteur américano-russe) ont bien fait ce qu'elles ont pu, du moins on l'imagine.
Découvrez notre critique du roman d'Isaac Asimov :
Les chiffres, c'est pas une science exacte
Cet élément absolument central de Fondation est finalement plutôt bien amené et expliqué dans les débuts de la série. Il devient malheureusement secondaire par la suite, laissant la place à d'autres intrigues et personnages, pour montrer un peu plus de conflits armés et de politique que de science. Admettons, le choix s'entend pour intéresser les spectateurs et les garder éveillés en rendant l'ensemble plus dynamique.
On regrette alors que ces intrigues, tournant autour de personnages, de villes entières voire de planètes, ne soient pas toujours captivantes ou surprenantes. Peut-être avons-nous avalés trop de séries ces dernières années, mais les trois quarts des plot twists de Fondation se repèrent à 100 années-lumière, et ce, malgré les changements opérés par rapports aux livres… Nous y reviendrons.
Le show se montre parfois un peu trop générique, perdant alors de vue ce qui faisait l'identité des romans, ce qui les rendait uniques et précurseurs. Néanmoins, quelques idées fonctionnent vraiment bien, à commencer par les histoires concernant l'Empereur… que nous vous laisserons découvrir.
Les personnages et les jeux d'acteur sont également à saluer, tout particulièrement les performances de Lee Pace (Halt and Catch Fire) et Jared Harris (Chernobyl).
Mais en dehors de quelques sursauts de génie, la plupart des histoires racontées ennuient, qu'il s'agisse d'un récit à l'échelle galactique ou d'un drame plus intime et personnel. Si avec les livres on se sentait investis par la mission des héros pour appliquer le « Plan » de Seldon, ici on se retrouve passifs, contemplant des événements dans lesquels on ne s'immerge pas ou peu.
« On aurait adoré que Fondation devienne un pilier du catalogue Apple TV+ »
La série, ambitieuse, multiplie en outre les bonds temporels et géographiques, nécessitant une véritable attention pour ne pas perdre le fil conducteur, dont la direction générale est d'ailleurs rarement très claire. Les faiblesses et les temps morts sont heureusement compensés par l'introduction d'éléments mystérieux, tandis que quelques épisodes (notamment vers la fin de la saison) parviennent à donner aux spectateurs l'envie de poursuivre pour comprendre les ressorts de l'intrigue.
Pour nourrir cette dernière, et pour échapper aux pièges d'une transposition scabreuse, la production a en fait choisi ici de raconter sa propre histoire en développant des éléments secondaires des romans. Et le choix se défend, en cela qu'elle permet notamment de construire les personnages (pas toujours de manière très adroite, certes) que l'on pourrait bien retrouver dans de prochaines saisons.
Et de fait une saison 2 est déjà en chemin, alors que David S. Goyer a évoqué son souhait d'en réaliser idéalement huit. Avec sept tomes constituant le Cycle de Fondation, on comprend qu'il en garde sous le pied…
De l'Art ou de l'adaptation
Un autre choix qui se tient, qui fera peut-être grincer des dents certains et tant pis pour eux, c'est celui du changement de sexe (et partiellement de destin, mais chut) de deux protagonistes. Une décision bienvenue pour moderniser un récit de son époque (1951), initialement très masculin.
Ce que l'on a du mal à comprendre en revanche, c'est le fait de balancer l'un des plus gros retournements scénaristiques des livres au détour d'un misérable dialogue, sans rien en faire par la suite… L'effet de surprise est totalement gâché et désamorcé : dommage.
À cette étape de la critique, vous pourriez vous demander : pourquoi continue-t-on de regarder Fondation ? Eh bien sans doute pour voir toujours plus de plans époustouflants et découvrir ce que cet univers visuel a à nous offrir. En effet, en termes de production, Apple TV+ ne se moque vraiment pas du monde, et le résultat pourrait être encore plus bluffant que ce que propose le pourtant déjà solide film Dune (en tout cas sur une belle télévision).
La mise en scène et les décors intérieurs comme extérieurs sont tous plus travaillés les uns que les autres, et pour la partie sonore, la plateforme s'est payée les services de Bear McCreary (Battlestar Galactica) qui ravit nos oreilles dès le générique.
Reste qu'un bel enrobage ne fait malheureusement pas tout. On aurait adoré que Fondation devienne un pilier du catalogue Apple TV+, peut-être que cela arrivera avec la (les ?) prochaine(s) saison(s), mais pour l'heure, For All Mankind conserve à nos yeux sa place de leader, captivant dès son lancement et sans discontinuer.
Foundation n'est pas une mauvaise série. Mais la première saison de cette adaptation de l'œuvre hautement complexe d'Asimov n'est, sans grande surprise, pas parfaitement satisfaisante. Malgré une débauche de moyens impressionnante, force est de constater, que l'on soit connaisseur ou non des romans originaux, qu'il n'est pas évident de rentrer dans la série et de se sentir investi dans son récit. L'espoir reste heureusement permis pour la suite.
- Vous aimez la grande science-fiction
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