À l'origine du projet Cities Skylines, nous retrouvons la toute petite société finlandaise Colossal Order et son envie de réaliser des city builders. Consciente de ses limites, la fine équipe de cinq personnes décide d'abord de se faire la main en limitant sa simulation aux seuls transports en commun. C'est ainsi que nait Cities In Motion en 2011, rapidement suivi par une suite un peu plus ambitieuse et complète, Cities in Motion 2 en 2013.
Du naufrage SimCity 5...
Épaulé par l'éditeur Paradox Interactive, le studio finlandais sent bien qu'il y a matière à aller plus loin d'autant que dans le même temps, Electronic Arts galère avec sa franchise SimCity. SimCity Sociétés (2007) a été un véritable fiasco et pour redorer le blason de sa marque, l'éditeur a décidé de travailler sur un nouvel opus simplement baptisé SimCity, mais auquel tout le monde ajoute un '5' afin de montrer qu'il s'agit de la véritable suite de SimCity 4, référence absolue dans le genre.Problème, SimCity 5 est bien trop axé multijoueur. Electronic Arts et Maxis ont voulu pousser les joueurs à travailler ensemble sur des régions regroupant des villes de petite taille. Chaque cité n'a dès lors pas les moyens de tout produire et doit compter sur les autres villes pour subvenir à certains besoins. Un système d'échange à grande échelle est mis en place, avec un marché sur lequel les joueurs peuvent acheter / vendre des ressources.
Sur le papier, l'idée n'était pas mauvaise, mais le lancement a été chaotique avec des serveurs incapables de tenir la distance. Des machines supplémentaires ont rapidement été déployées et des fonctionnalités dites mineures (classements, succès, filtres de région) désactivées pour réduire la charge. Las, le mal était fait et le problème était de toute façon plus profond. De nombreux joueurs se sont ainsi plaints de la taille ridicule des villes ou de failles critiques du moteur de jeu arguant d'une « simulation cassée ».
... au triomphe de Cities Skylines
Colossal Order a eu le nez creux. Alors que Cities in Motion 2 était sur le point d'être commercialisé, une partie de la petite équipe a commencé à travailler sur Cities Skylines. Mais plutôt que de partir dans une nouvelle direction ou d'essayer de pousser les amateurs vers le multijoueur, l'équipe finlandaise a surtout cherché à capitaliser sur le succès de SimCity 4.Son projet reprend d'ailleurs sans vergogne l'essentiel des éléments constitutifs du jeu de Maxis : système de zonage des villes, trio résidences / commerces / industries... De fait, on prend le jeu très rapidement en main et on ne tourne pas en rond durant des heures pour comprendre comment fonctionne tel ou tel mécanisme. En n'essayant pas de réinventer la roue, Colossal Order réduit aussi le risque de tomber sur des bugs majeurs comme ceux rencontrés sur SimCity 5.
Plutôt que de changer les mécanismes de base, Colossal Order s'est ingénié à améliorer l'existant, à apporter de nouvelles options sur un canevas éprouvé. Le studio a par exemple considérablement étendu la taille des cartes afin d'offrir plus de liberté aux joueurs. Il a également enrichi les outils de construction de routes avec des tracés courbes aussi pratiques que viables. Il a aussi imaginé un système de quartier qui permet de légiférer sur des portions de la ville et de gérer les choses avec plus de précision.
Respect communautaire
Enfin, il a conçu un jeu très ouvert auquel la communauté est invité à participer. Avant même la sortie officielle du jeu, quelques amateurs avaient pu créer des mods et dès que Cities Skylines a été commercialisé, on a vu fleurir quantité de nouveautés toutes plus intéressantes les unes que les autres. Certains de ces mods viennent enrichir le nombre de bâtiments disponibles avec des monuments tels que le Space Needle de Seattle, la Tour de télévision de Berlin ou la Tour Jin Mao de Pudong.Les mods actuellement disponibles ne se limitent toutefois pas à cela et on trouve des outils pour améliorer l'interface de gestion des transports en commun ou pour mieux appréhender le trafic dans la ville. On trouve des bâtiments plus modestes, mais aussi des cartes qui redessinent complètement l'univers du jeu afin, par exemple, de reproduire le Los Santos de Grand Theft Auto. Enfin, certains outils sont simplement là pour améliorer le confort d'utilisation du jeu comme cet accessoire qui rend la construction de routes encore plus précise.
En revenant aux fondamentaux et en ne cherchant pas à imposer le multijoueur de gré ou de force, Colossal Order est parvenu à écouler plus d'un million de Cities Skylines en seulement un mois. Bien sûr, SimCity 5 a dépassé ce seuil en seulement quinze jours, mais il avait pour lui un nom mondialement connu : durant les quatre mois qui ont suivi, le titre de Maxis ne s'est d'ailleurs écoulé qu'à 900 000 exemplaires supplémentaires. Gageons que Colossal Order réussisse sur le long terme : c'est plus que bien parti.