Au début des années 90, pour bon nombre de joueurs, la référence en matière de jeu de football ne s’appelle pas PES ou FIFA… mais Nintendo World Cup.
Développé par Technos Japan, Nintendo World Cup est lancé (au Japon) en 1990, alors que le monde entier vibre pour la Coupe du Monde qui se déroule alors en Italie. Toutefois, pas de licence officielle ici, pas même de simulation, ni même de véritables règles de football… Nintendo World Cup, c’est un jeu de foot atypique, très typé arcade, et même un peu orienté baston à vrai dire, le titre étant d'ailleurs un membre honorifique de la saga Nekketsu Kōkō Kunio-Kun, soit un descendant de « Renegade » pour ceux et celles qui s’en souviennent.
Aux antipodes de la bataille des téraflops, de la 4K et des 60 fps, NEO•Classics vous propose un retour vers les origines du jeu vidéo. Du titre 2D en gros pixels au moins lointain jeu à la 3D hésitante, cette chronique vous invite à (re)découvrir les pépites vidéoludiques qui ont ouvert le monde au 10e art...
Nintendo World Cup, Double Dragon… même combat ?
Nintendo World Cup n’est donc pas à proprement parler un jeu « Nintendo », puisque le titre a été mis au point par Technos Japan. Un studio obscur pour de nombreux joueurs, mais qui a malgré tout rencontré un certain succès avec la série Nekketsu Kōkō Kunio-Kun, et notamment un certain Super Dodge Ball. Pourtant Technos Japan, c’est aussi Renegade ou encore Street Gangs (River City Ransom aux Etats-Unis), sans oublier en fin d’année 1990, l’extraordinaire Double Dragon II. Le studio revendique ainsi un côté « baston », que l’on retrouve dans ce Nintendo World Cup.
En effet, impossible d’oublier ces personnages façon « super deformed » au look si particulier, visiblement davantage décidés à se briser les tibias qu’à faire vibrer les filets adverses. Dans Nintendo World Cup, hormis le respect des zones de jeu, il n’existe aucune règle.
C’est d'ailleurs pourquoi il ne faut pas hésiter à jouer des coudes et des tacles pour récupérer le ballon, sur un adversaire qui exprimera physiquement sa douleur, avec des mimiques très réussies. Au fil du match, certains joueurs resteront même cloués au sol, épuisés par les différents coups reçus.
Pire (ou mieux) encore, les rencontres ne se déroulent pas exclusivement sur un beau terrain gazonné. Il peut arriver de jouer sur un terrain recouvert de glace, ou encore sur un sol rocailleux, dont les rochers feront trébucher les joueurs.
En amont de chaque match, on peut revoir le positionnement de ses joueurs, et même paramétrer l’attitude générale de son équipe, en faisant sortir le gardien par exemple, en privilégiant le pressing ou les tacles, en optant pour un jeu collectif ou au contraire par de nombreuses frappes au but.
À l'époque, à l’instar d’un bon vieux Olive et Tom, Nintendo World Cup faisait sensation dans les cours de récré, notamment grâce à ses inoubliables tirs surpuissants. Une surprise d’autant plus grande que, contrairement à la jaquette de la version Famicom, la cover PAL ne laissait en aucun cas présager d’un jeu de football à ce point décalé de la réalité. Celle-ci promettait même « le réalisme du football au niveau international » c'est dire !
Entre football, tacles assassins et humour
Nintendo World Cup, c'est aussi des tirs spéciaux qui se déclenchaient aléatoirement via un tir normal, ou bien que l’on pouvait « forcer » en pressant A et B pour effectuer un retourné acrobatique (souvent du milieu du terrain) ou encore une tête plongeante rageuse. Il est d'ailleurs possible d’éliminer le dernier défenseur en lui assénant une frappe surpuissante dans l’abdomen, avant de remettre le pied sur le ballon et de frapper au but.
Oui c’est minable d’un strict point de vue fair play, mais quel plaisir de pouvoir faire voler le gardien avec une frappe totalement surréaliste de puissance, variant selon les équipes dotées de plusieurs types de tirs spéciaux. Pour ce faire, cependant, il fallait quand même avoir le sens du timing et du placement du joueur.
Et oui, car en plus de son côté « baston », World Cup était particulièrement déroutant par son gameplay, puisque ce dernier permettait au joueur de ne diriger… qu’un seul footballeur, à savoir le capitaine de l’équipe !
Les autres membres, eux, sont ainsi contrôlés par une IA, à laquelle on peut toujours donner quelques indications (en bon capitaine que l’on est), comme demander une passe ou un tir aux buts, mais gère plus. Il faut donc sans cesse penser à se replacer, y compris (et surtout !) lors des phases défensives.
Seul, à deux, à trois et même à quatre !
Même s’il constitue un classique de l’époque, Nintendo World Cup est loin d’être exempt de défauts. Difficile par exemple de passer sous silence un affichage qui clignote à outrance, et un gameplay certes très fun mais somme toute très limité. Cela n'empêchait pas le jeu de Technos Japan d'être de ceux que l’on lançait régulièrement, seul ou entre amis, pour se payer une bonne tranche de sport et de rire.
Côté « plaisir », à son esthétique à part entière s’ajoute une musique assez extraordinaire, ce qui est assez rare dans un jeu de foot, pour être souligné.
À noter également que Nintendo World Cup permettait de jouer seul ou à deux, mais qu'il était également possible de s’adonner à ces parties footballistiques si particulières à trois, voire même à quatre !
Et si le jeu a été vendu en version standard, il existe aussi une cartouche de World Cup qui incluait le jeu Super Spike V’Ball, et qui était proposée en bundle avec le NES Sport Set, lequel contenait également la console, quatre manettes et l’adaptateur NES Four Score dédié.
Pour la petite histoire, la version japonaise dispose d’une petite introduction très réussie (et drôle), ainsi que de petits interludes, totalement absents de notre version occidentale. Si vous le pouvez, jetez aussi un œil du côté de Kunio Kun Nekketsu Soccer League, la suite directe de World Cup, avec un concept plus abouti et complet.
Enfin, soulignons que si Nintendo World Cup a été lancé sur NES, le jeu fut également un incontournable du petit GameBoy. Au Japon, le jeu, sous son appellation Nekketsu Kōkō Dodgeball-bu: Soccer-hen, a également été décliné sur PC Engine et sur SEGA Mega Drive.
Par la suite, la licence a finalement cédé à d'autres disciplines sportives comme le ballon prisonnier, le basket et le hockey sur NES, ou encore le base-ball sur Super Nintendo.
Un jeu de bagarre où l’on peut marquer des buts
Aussi loufoque qu’un River City Ransom (dont il était originellement un spin-off), Nintendo World Cup a su séduire les joueurs de l’époque par son humour omniprésent, son ambiance singulière et un côté décalé (et bagarreur) complètement inattendu. Alors oui, c’est un peu répétitif et pas très passionnant en solo, mais à deux (voire trois ou quatre) joueurs, l’expérience est transfigurée et on part alors pour de longues sessions de jeu, entre fous rires, tacles assassins et tirs spéciaux qui font décoller les gardiens.
Dommage toutefois que notre version occidentale ait été amputée de certains contenus par rapport à la version japonaise. Néanmoins, pour beaucoup de (vieux) joueurs, Nintendo World Cup a constitué à l’époque l’un de leurs premiers jeux de foot. Il se murmure même, dans les milieux autorisés, qu’il reste aujourd’hui encore secrètement considéré par nombre d’entre eux comme l’un de leurs jeux de football préférés.