Une collaboration entre des chercheurs français et suisses pourrait permettre à de nombreuses personnes paralysées de retrouver l'usage d'un ou de plusieurs membres par la pensée.
Un certain Gert-Jan, devenu paraplégique après un accident de vélo il y a 10 ans, a pu aider les équipes du CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives) et de l'EPFL (École polytechnique fédérale de Lausanne) à éprouver un tout nouveau dispositif aux capacités impressionnantes.
Des capteurs, un implant et des algorithmes
Qualifié de « pont digital », l'appareil permet ni plus ni moins de rétablir une connexion entre le cerveau d'un patient paralysé et des régions rendues inaccessibles de la moelle épinière. Dans le cas de Gert-Jan, il s'agit de pouvoir retrouver les fonctions motrices de ses jambes, dont il a perdu le contrôle depuis plusieurs années.
Ce pont se compose de deux dispositifs distincts. Tout d'abord, on trouve un capteur positionné sur la tête du patient, dans la région des cortex moteurs droit et gauche. Il permet de capter et de numériser les signaux électriques générés par l'intention du mouvement, puis de les envoyer au second composant, un implant situé au niveau de la moelle épinière. Il s'agit d'un neurostimulateur qui, par l'intermédiaire d'une matrice d'électrodes directement connectées à la moelle épinière, va pouvoir stimuler celle-ci pour activer les muscles de la jambe.
Sans surprise, puisque la recherche se dirige à grands pas dans cette direction, on retrouve une part d'intelligence artificielle dans tout ce processus. Ici, des algorithmes décodent en temps réel les informations fournies par les capteurs pour prédire les mouvements des jambes avant de les convertir en séquences lisibles par le neurostimulateur.
Un véritable miracle du XXIᵉ siècle
En quelques semaines d'entraînement après l'implantation dans sa moelle épinière, Gert-Jan a pu reprendre le contrôle de ses jambes, se lever, marcher et même grimper des escaliers. Les éléments périphériques de l'appareil, y compris les batteries et l'ordinateur qui contrôle l'ensemble, ont été installés dans un déambulateur, ce qui lui permet d'être complètement autonome.
Cependant, la progression de Gert-Jan ne s'est pas arrêtée là. En effet, 6 mois après le début de sa rééducation, l'homme a commencé à progressivement récupérer des fonctions neurologiques liées à la marche et à l'équilibre. La coordination entre les activités cérébrales et les mouvements des membres aurait favorisé l'apparition de nouvelles connexions nerveuses, mesurables même lorsque le pont digital est éteint. Bien que les chercheurs ne s'étendent pas sur le sujet, cela conduirait peut-être, sait-on jamais, à une récupération totale ou partielle du contrôle des membres, sans assistance.
Pour les équipes en charge du projet, il s'agit maintenant de faire d'autres essais sur de nouveaux patients et d'explorer d'autres applications comme la restauration des mouvements des bras et des mains. Elles pourraient même appliquer la technologie à d'autres indications cliniques, comme la paralysie due à un accident vasculaire cérébral. Par ailleurs, le développement d'une nouvelle version de l'appareil, miniaturisée et moins énergivore, est déjà en cours avec un industriel.
On espère que Gert-Jan sera le premier d'une longue série de personnes paraplégiques à retrouver l'usage le plus complet possible de son corps. Et surtout, comme il le dit lui-même, de pouvoir « se tenir debout avec un ami pour prendre une bière ».
Source : CEA