Et si on avait simplement pu envoyer la structure et un gros réservoir ? Crédits NASA
Et si on avait simplement pu envoyer la structure et un gros réservoir ? Crédits NASA

Le problème des télescopes spatiaux, c'est qu'en plus du coût de leurs grandes optiques, ces dernières dimensionnent l'ensemble de la mission. Il existe plusieurs pistes pour dépasser cette limite, et l'une des plus originales consiste en un miroir constitué de lentilles liquides, exploitant les propriétés de l'impesanteur.

Bien sûr, ce n'est pas pour demain.

Miroir de grande envergure

Il aura fallu déployer des trésors d'ingénierie pour plier et utiliser les 18 segments du miroir principal de 6,5 mètres de diamètre du télescope James Webb, et des investissements colossaux pour les miroirs de 2,4 mètres de Hubble et du futur Nancy Grace Roman de la NASA. Le défi des miroirs pour les télescopes spatiaux est plus qu'important : c'est souvent l'élément central, celui autour duquel toute la mission s'articule.

Evidemment, il faut éviter de mettre le doigt dessus, Néo. Crédits Warner Bros.
Evidemment, il faut éviter de mettre le doigt dessus, Néo. Crédits Warner Bros.

De fait, plus le diamètre du miroir principal d'un télescope spatial est important, plus ce dernier peut collecter de lumière. Mais le processus de conception sur Terre prend du temps, et le résultat est lourd, cher et sujet à de (parfois fameuses) aberrations optiques. Pour pallier les soucis liés au développement d'optiques gigantesques, un piste consiste à utiliser les propriétés des liquides. C'est l'objectif de FLUTE, ou Fluidics Telescope Experiment, une expérience qui prend place cette semaine sur l'ISS.

Salade de lentilles

« En impesanteur, les liquides prennent des formes utiles pour fabriquer des lentilles et des miroirs », explique E. Balaban, chercheur au centre de recherche spatiale Ames (NASA). En orbite, un liquide comme de l'eau prendra en effet naturellement une forme sphérique.

L'équipe qui a conçu FLUTE utilise cependant un ensemble de polymères présentant les capacités réfléchissantes voulues, pour les injecter dans des cadres aux formes particulières. Tout réside ensuite dans la tension de surface et la pureté du procédé, qui a déjà été testé à plusieurs reprises.

Les premiers essais ont eu lieu en piscine (lesdits polymères ne se mélangeant pas à l'eau), puis lors de vols paraboliques en 0 G avec de bons résultats. Selon les scientifiques, l'idéal serait un matériau sous forme liquide d'abord, qui se solidifierait avec le temps une fois en place sur son cadre en orbite.

Eytan Stibbe se prépare pour l'expérience FLUTE sur l'ISS. Crédits Times of Israel.

Pas question de trembler

Les résultats en impesanteur ne tarderont pas : le touriste israélien Eytan Stibbe réalisera l'expérience (il a reçu une solide formation, en partenariat avec l'institut israélien Technion) avec des lentilles optiques créées à partir de polymères liquides de la taille de pièces de monnaie. Une première expérience qui, si elle réussit, pourrait mener à des essais à plus grande échelle dans les années à venir.

Il faut tout de même rester prudents : même si la technique permet sur le papier d'éviter le lent procédé de formation et de polissage sur Terre, la pureté du liquide et de sa forme seront au centre des enjeux.