Les pays membres du G20 ont enfin trouvé un accord, ce week-end, autour d'une taxation des grandes entreprises mondiales du secteur du numérique.
On ne compte plus les rebondissements dans le processus de taxation des géants du numérique de notre planète. Mais l'accord émanant des chefs d'État et des chefs de gouvernement du G20 samedi à Rome est tout bonnement historique. Il vient entériner un précédent accord trouvé début octobre entre 136 pays de l'OCDE, pesant pour 90 % du PIB mondial. Tous ont enfin donné leur feu vert pour taxer ces entreprises d'un secteur qui réalise des profits colossaux tout en échappant en grande partie à l'impôt.
Ceux dont on ne sait plus comment prononcer le nom, bientôt taxés à 15 %
On ne peut plus vraiment les appeler les GAFAM depuis que le groupe Facebook est devenu Meta, et ce serait de toute manière trop réducteur puisque l'idée d'une taxe ne touche pas que les seuls Google (Alphabet), Apple, Meta (Facebook), Amazon ou Microsoft. Plutôt qu'un acronyme, contentons-nous ainsi de les qualifier de « géants du numérique », ce sera plus simple.
Il faut d'abord rappeler qui est concerné par cette taxe et sur quel(s) critère(s) elle doit s'appliquer. Il va de soi qu'elle touchera les grandes entreprises du secteur du numérique. Mais il faut que ces entreprises génèrent un chiffre d'affaires annuel d'au moins 750 millions d'euros dans le monde. Cela réduit automatiquement le champ d'application à un peu moins d'une centaine d'entreprises du globe.
Parmi les grandes sociétés frappées par la taxe, on retrouve celles précédemment citées mais aussi sans doute Alibaba, TikTok, Uber, Verizon, Tripadvisor, Amadeus, Booking, Zalando, Criteo, Airbnb et d'autres, les noms définitifs n'ayant pas encore été arrêtés. Certaines des entreprises aujourd'hui visées par la taxe pèsent aussi lourd que des États, et disposent d'un pouvoir et d'une aura équivalents à la souveraineté-même de certaines puissances, qui semblaient avoir perdu le contrôle.
Le cap, probablement définitif cette fois-ci, est mis sur 2023
Les dizaines d'entreprises redevables devront payer un minimum de 15 % d'impôt sur les bénéfices réalisés, et ce quel que soit l'emplacement de leur siège. Les États concernés et économistes évoquent aujourd'hui une recette fiscale qui pourrait atteindre au moins 150 milliards de dollars. Cette manne sera ainsi redistribuée entre les États où les entreprises exercent.
Pour la France et d'autres acteurs européens, c'est un changement fondamental qui s'annonce, puisque bon nombre de firmes parviennent à échapper à l'impôt au travers de divers mécanismes d'optimisation, comme des employés ou un siège basés à l'étranger, dans un pays à la fiscalité très favorable. Cette fois, les pays ou paradis fiscaux bien connus des géants du numérique, comme les Bermudes, les Îles Caïmans, l'Irlande et d'autres, vont bien appliquer cette taxe de 15 %.
Cette taxe qui, rappelons-le, unit enfin toutes les grandes puissances mondiales – États-Unis compris – pour la première fois, entrera en application en 2023. La France, qui prendra la présidence de l'Union européenne l'an prochain, a salué cette décision prise dans le cadre du G20. « Depuis quatre ans, je me bats pour mettre en œuvre une taxation internationale d’au moins 15 % pour les entreprises multinationales. Ce soir, nous y sommes ! L’ensemble des pays du G20 empruntent la voie d’une mondialisation plus juste », a écrit le président Emmanuel Macron sur les réseaux sociaux samedi soir – lui qui avait essuyé plusieurs revers dans son idée de taxe. Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances qui tenait particulièrement à cette taxation, sourit aussi face à ce qu'il appelle « une véritable révolution fiscale au service de nos concitoyen ».